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Art. 18

RADIATION.

Profits illicites. - Radiation de l'inscription prise en vertu de l'art. 19 de l'ordonnance du 6 janvier 1945.

D. - L'état délivré sur la transcription d'une vente immobilière a révélé, à l'encontre du vendeur, une inscription prise par le Trésor, en matière de profits illicites, en exécution de l'art. 19 de l'ordonnance du 6 janvier 1945.

Le Trésorier-Payeur général sollicité de donner mainlevée objecte qu'il n'y a pas lieu à radiation, que l'inscription de l'hypothèque générale s'étant substituée rétroactivement à la première inscription, elle devait être considérée comme disparue et ne pas être comprise dans l'état.

Cette affirmation est-elle fondée ?

R. - Certains auteurs ont exprimé l'avis que la première inscription prise par le Trésor, en matière de profits illicites (art. 19 de l'ordonnance de codification du 6 janvier 1945), n'a d'autre valeur que celle reconnue par certaines législations étrangères, et notamment par le droit civil allemand, aux formalités dites de" prénotation ". Ces formalités ont pour but d'aviser les tiers de l'existence d'un droit éventuel d'hypothèque, qui - lorsqu'il vient à se réaliser - doit faire l'objet d'une inscription régulière, dont le rang est toutefois déterminé par la date de la, prénotation, La prénotation ne constitue donc pas une inscription à proprement parlé : en tant que telle, elle n'a pas d'existence propre; elle anticipe seulement sur une inscription régulière, avec laquelle elle fera corps, et qui seule peut lui donner vie, si elle est effectivement formalisée.

Il est difficile d'étendre cette notion de la prénotation au droit français, qui l'a toujours ignorée. Rien d'ailleurs, dans le texte des ordonnances de 1944 et 1945 sur la confiscation des profits illicites, ne le permettrait.

En tous cas, il importe de remarquer que, dans l'espèce particulière, le Trésor n'attribue nullement à l'inscription de l'art. 19 la valeur d'une simple prénotation: bien souvent, en effet, il se contente de prendre celte première inscription, sans la faire suivre de l'inscription définitive, après décision de condamnation du Comité de Confiscation. C'est donc qu'il considère que la première formalité se suffit à elle-même, qu'elle a une existence propre, et affirme, à elle seule, la réalité du privilège, sans avoir besoin d'être ultérieurement vivifié par une seconde inscription.

Les Conservateurs agiront donc prudemment en ne procédant à la radiation de la première inscription qu'au vu d'une mainlevée visant formellement cette inscription, et il va de soi que cette inscription devrait être délivrée tant que la radiation n'en aurait pas été spécialement opérée, ou la péremption acquise (art. 2196 C. Civ.).

Annoter: C.M.L. 3323 bis; Jacquet et Vétillard, V° Radiations administratives n° 9 ter.