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Art. 90

Radiations.
Sociétés. - Mandataires.
Composition du Conseil d'administration modifiée entre l'époque où celui-ci a conféré le mandat et celle où le mandataire a fait usage de ce mandat.

- Conséquences.

Saisi par une banque d'une difficulté survenue à l'occasion d'une radiation requise par un de ses directeurs régionaux, le Président de l'A.M.C. lui a fait parvenir la réponse suivante :

« Monsieur,

« Dans une lettre du 25 avril 1951 que la Direction générale des Impôts m'a transmise pour suite à donner, vous avez posé la question de savoir si un Conservateur des Hypothèques est fondé à refuser d'effectuer la radiation d'une inscription ayant pour objet une hypothèque dont Directeur régional de votre société a donné mainlevée, pour ce motif que le Conseil d'administration de qui le Directeur régional tient ses pouvoirs en la matière a dû normalement être remanié avant la date de l'acte de mainlevée, et qu'il serait indispensable, dans ces conditions, que le nouveau Conseil confirmât la délégation des pouvoirs.

Cette question appelle de ma part les observations suivantes :

« Je dois indiquer, à titre préliminaire, que le Conservateur des Hypothèques est personnellement responsable sur tous ses biens des formalités qu'il effectue; d'où il suit qu'il est seul juge - sous le contrôle des tribunaux, bien entendu - des justifications qu'il doit exiger, le cas échéant, pour accomplir les dites formalités, et spécialement les radiations d'inscriptions, lesquelles, plus manifestement que toutes autres, sont de nature à engager directement sa responsabilité. Aucune règle ne pouvant lui être imposée a priori à ce sujet, il est inéluctable qu'à la faveur de cette liberté d'appréciation, certaines difficultés, prêtant plus particulièrement à interprétation soient parfois tranchées d'une conservation à l'autre de façons différentes, sans qu'il soit possible d'ériger en ligne de conduite indiscutable la solution admise par l'une ou par l'autre.

« Il va de soi que je ne puis fournir, sur la question que vous posez, qu'un avis qui, bien que représentant le point de vue du Bureau de l'Association, peut ne pas être partagé par tous les Conservateurs.

« Sous le bénéfice de cette observation, j'estime que le mandat, donné par le Conseil d'administration de votre société, à un Directeur régional pour opérer mainlevée d'hypothèque vaut, sauf révocation de ce mandat portée à la connaissance des intéressés (et spécialement des Conservateurs des Hypothèques), soit jusqu'à l'expiration des fonctions du Directeur régional de l'époque du mandat, soit même indéfiniment, suivant que le mandat a été donné a un Directeur régional expressément dénommé ou au Directeur régional pris impersonnellement.

« On doit, en effet, ce semble, considérer qu'en l'occurrence le véritable mandat est la société elle-même dont les statuts habilitent le Conseil d'administration à donner mainlevée, que, par conséquent, le véritable mandataire est le Conseil d'administration, et., que le Directeur régional n'agit que comme un mandataire substitué. Or, si, comme il est vraisemblable, le mandat conféré en la matière par les statuts de votre société au Conseil d'administration est donné à celui-ci pris impersonnellement, c'est-à-dire indépendamment de sa composition, ce mandat est évidemment valable sans limitation de durée, sauf les cas d'extinction du mandat prévus par l'art. 2.003 du Code Civil. Par voie de corollaire on doit admettre, à mon avis, que dans la mesure où, avec l'autorisation des statuts, le Conseil se substitue purement, et simplement un tiers pour l'exécution de ce mandat, le tiers a également qualité pour agir, au nom de la société, dans les limites du mandat faisant l'objet de la substitution, sans limitation de durée, quelques modifications qui aient pu intervenir dans la composition du Conseil postérieurement a la substitution.

« Je dois reconnaître cependant que la solution contraire semblerait pouvoir s'appuyer sur l'opinion selon laquelle, lorsqu'une personne qui a qualité pour gérer les affaires d'autrui (en l'espèce le Conseil d'administration) charge quelqu'un (en l'espèce le Directeur régional) de faire pour elle quelqu'une des dites affaires, le mandat s'éteint lorsque le pouvoir qu'avait le mandant de gérer l'affaire (en l'espèce le Conseil d'administration tel qu'il était composé au moment de la délégation du pouvoir) vient à cesser (dans ce sens, jurisprudence générale Dalloz, V° mandat n° 473, Paul Pont. Comment. Traité des petits contrats, t. 1; n° 1.154).

« Veuillez agréer, etc...

Annoter : C.M.L. n° 1.333, 2°; Jacquet et Vétillard, V° Sociétés. n° 31.