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Art. 109

MENTIONS EN MARGE DES INSCRIPTIONS.

Mention de subrogation à opérer en vertu d'un acte de cession de créance représentée par des traites.
- Conditions.

D. - Aux termes d'un acte du 12 avril 11949, M. B... a emprunté à M. A... la somme de 5.000.000 de francs, représentée à concurrence de 1.000.000 de francs par des traites accordées par le débiteur, le surplus de la créance conservant un caractère strictement civil. Le bordereau de l'inscription, prise le 29 avril 1949, indique que la garantie hypothécaire « couvre seulement la somme de 4.000.000 de francs non représentée par des traites ».

Un acte du 1er mars 1951 est, actuellement présenté, avec réquisition de « mention de subrogation », en marge de l'inscription précédente. Cet acte indique, dans l'exposé des faits, que, par un acte authentique du 8 septembre 1950 (donc postérieur à l'inscription, et qui n'a fait l'objet d'aucune mesure de publicité hypothécaire), M. X... et M. B... ont stipulé notamment que la créance hypothécaire ci-dessus de 4.000.000 de · francs serait désormais représentée par 8 traites, dont les échéances et le montant sont précisés.

Après cet exposé, il est stipulé que M. X... cède et transporte à un tiers dénommé, moyennant la somme payée de 2.000.000 de francs « sans autre garantie que celle de sa qualité de créancier et d'endosseur de toutes traites pouvant être Remises en représentation des causes de l'acte d'affectation hypothécaire sus-énoncé », une somme de 2.000.000 de francs à prendre par priorité et préférence au cédant et à tous autres, dans toutes les sommes dont M. B... peut rester redevable envers M. X.... « Cette délégation, est-il ajouté, est faite en garantie de toutes sommes pouvant être avancées par le bénéficiaire de la présente cession à M. X... par l'escompte de toutes traites acceptées par M. B..., à l'ordre de M. X... et endossées par ce dernier, les dites traites causées par la garantie hypothécaire visée au présent acte ».

Puis-je opérer la mention Requise sans autres justifications ?

R. - Certainement pas. Pour que la mention puisse être faite, il y aura lieu de tenir compte des observations suivantes :

1° Le Conservateur est responsable des énonciations portées par lui en marge d'une inscription : en particulier il ne peut mentionner une cession ou une subrogation de créance qu'à la condition notamment que l'acte constatant l'opération émane apparemment du propriétaire de la créance ayant capacité à cet effet. Lorsqu'il s'agit d'une créance soumise aux conditions de cession prévues par l'Art. 1690 C. Civ., il est aisé d'établir s'il y a identité de personne entre le cédant et le titulaire de la créance : il suffit de confronter à cet effet les indications d'état civil contenues dans le bordereau d'inscription, d'une part, et dans l'acte de cession d'autre part.

Toute autre est la situation, lorsque - comme au cas particulier - la créance est transmissible suivant les formes du droit commercial. L'acte de cession qui est présenté au Conservateur aux fins de mention, indique en effet de façon très nette, que par un acte antérieur, la créance (dont la cession ne pouvait, d'après le bordereau, être réalisée que suivant les règles du droit civil) est actuellement représentée par des traites. Du fait de cette mobilisation, que le Conservateur ne peut prétendre ignorer, puisqu'elle a été spécialement portée à sa connaissance, la créance cesse donc d'être attachée à la personne du créancier originaire, pour être matérialisée dans des effets susceptibles de circuler suivant les formes simplifiées du droit commercial.

Il est donc nécessaire, pour que le Conservateur puisse faire la mention, que l'acte de cession, qui rappelle cette mobilisation, contienne, en outre les énonciations indispensables pour établir que le cédant est encore fondé à disposer de la créance, c'est-à-dire qu'il agit bien en qualité de détenteur régulier des effets et qu'il ne s'en est pas déjà dessaisi par un endossement.

A cet égard, il est nécessaire que le notaire rédacteur atteste dans l'acte : 1° Que les traites représentant la partie de la créance cédée (nettement détaillées pour permettre leur identification) lui ont été représentées par le cédant; 2° Qu'il a constaté personnellement que les caractéristiques de ces effets (date, noms du bénéficiaire, signature du souscripteur, montant, échéances, valeur causée, etc.) correspondent bien à celles énoncées dans l'acte relatant leur création ; 3° Qu'il a constaté, en outre, par leur examen, que ces mêmes effets ne sont revêtus, au moment de la cession, d'aucune mention, et notamment d'aucun endos, susceptible de nuire ou de préjudicier aux droits du cédant à l'entière propriété des dits effets ; 4° Enfin, que, comme conséquence de la cession consentie, ils ont été immédiatement, et à sa vue, endossés au nom du cessionnaire.

2° En outre, la mention à opérer pour publier la cession doit nécessairement d'après les termes de l'acte produit à l'appui de la réquisition, faire état de la situation nouvelle de la créance résultant de la création des traites émises en représentation. Or, l'existence de ces traites, qui modifie entièrement le caractère de la créance, au point de vue des conditions de cession et de circulation, constitue un fait juridique nouveau qui, à ce jour, n'a pas été publié, ni par suite rendu opposable aux tiers; bien plus, elle est en contradiction avec les énonciations du bordereau d'inscription qui précisent formellement que l'affectation couvre seulement la partie de créance, alors « non couverte par des traites ». Le Conservateur ne pourra donc (sous les conditions ci-dessus indiquées) opérer la mention d'une cession qui se rattache étroitement à une situation de la créance contraire à celle publiée par le bordereau, qu'autant que la création des traites, réalisée par l'acte du 8 septembre 1950, aura elle-même été publiée, et que les énonciations du bordereau relatives à l'inexistence de traites auront été ainsi rectifiées. Cette publication devra se faire, en principe, au moyen d'une inscription nouvelle, prise en vertu de l'acte d'obligation originaire et de l'acte du 8 septembre 1950 ; la mention de cession serait alors faite en marge de cette dernière inscription. A la rigueur, la création des traites réalisées par l'acte du 8 septembre 1950 pourrait être publiée par une mention en marge de la première inscription du 29 avril 1949 - cette mention équivalant en fait à une mention de subrogation éventuelle au profit des endossataires successifs.

Annoter : C.M.L. n° 1296; Jacquet et Vétillard, V. Cession de créance, n° 21.