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Art. 125

RADIATIONS.

Ouvertures de crédit du Sous-Comptoir des Entrepreneurs.
Avances représentées par des billets à ordre. - Conditions de la radiation.

(Avis du Comité de l'A.M.C.)

Les actes constatant les ouvertures de crédit consenties par le Sous-Comptoir des Entrepreneurs renferment généralement une clause aux termes de laquelle le Sous-Comptoir pourra exiger du crédité, au moment de chaque remise de fonds, des billets à ordre escomptables par la Banque de France. Ils stipulent, en outre, que la souscription des billets et leurs prorogations successives n'entraîneront aucune novation de la créance résultant de la réalisation du crédit et ne feront qu'une seule et même chose avec cette créance.

Ces actes prévoient par ailleurs la constitution d'une garantie hypothécaire et indiquent les conditions dans lesquelles sera donnée la mainlevée de l'inscription. Aux termes de certains actes, cette mainlevée ne pourra être consentie que par le Sous-Comptoir. Selon d'autres, elle pourra être l'oeuvre du Sous-Comptoir, mais il ne lui est pas conféré d'exclusivité à cet effet.

En l'état, un Conservateur a estimé que, dans le premier cas, le consentement du Sous-Comptoir dégageait sa responsabilité; sans qu'il ait à rechercher si des billets à ordre ont été effectivement créés et mis en circulation. Il lui a semblé, par contre, que, dans le second cas, il ne pouvait opérer la radiation que s'il lui était justifié soit qu'il n'avait pas été créé de billets en représentation des avances, soit que ces billets étaient restés entre les mains du Sous-Comptoir ou y étaient revenus à l'époque où la mainlevée a été consentie.

Invité à fournir des justifications sur ce point, le Président Directeur Général du Sous-Comptoir a fait parvenir à notre collègue une lettre dans laquelle il lui donne l'assurance que les billets souscrits par les crédités ne sont pas mis en circulation dans le public, qu'ils ne sont présentés à l'escompte ou au réescompte qu'au Crédit Foncier ou à la Banque de France et qu'ils sont toujours retirés par le Sous-Comptoir avant que la mainlevée ne soit consentie.

Dans cette situation, la question s'est posée de savoir si, en présence de cette attestation, le Conservateur pouvait opérer la radiation sans autres justifications. En raison du nombre élevé des inscriptions de l'espèce, notre collègue a, avant de prendre parti demandé à l'A.M.C. de faire connaître son avis sur la difficulté.

Saisi de celle-ci, le Comité de l'A.M.C. a estimé que le point de vue de notre collègue était justifié en droit.

La jurisprudence reconnaît, en effet, que, dès lors que la souscription des billets à ordre a été prévue par l'acte constitutif de la créance et n'en constitue ainsi qu'une modalité, l'endossement de billets à ordre emporte, sans qu'il soit besoin de subrogation expresse, la transmission au porteur des billets de la sûreté réelle qui est l'accessoire de la créance. C'est ce qui a été jugé notamment, dans le cas des effets créés en représentation des avances consenties en exécution d'une ouverture de crédit (Cass. 29 janvier 1915, J. Cons. 5781 ; Cass. réq. 7 mai 1940, Inst. 4486 § 13, J. Not. 42484), ainsi que pour les billets de fonds (Cass. civ. 19 février 1946, JCP 1946 II 3113). Il n'en est autrement que s'il a été spécialement convenu, expressément ou tacitement, que la garantie hypothécaire ne profitera qu'au créancier originaire.

Pour ce qui concerne spécialement des ouvertures de crédit du Sous-Comptoir, lorsqu'une clause du contrat a réservé à l'établissement prêteur le pouvoir de donner seul mainlevée, on peut en conclure que la garantie hypothécaire a été stipulée exclusivement au profit du Sous-Comptoir ou, tout au moins, que ce dernier a reçu des porteurs des billets le mandat de consentir la mainlevée, lequel mandat étant l'exécution d'une convention synallagmatique (C. Pau, 26 novembre 1873, D. 74-5-327), est à ce titre irrévocable (Aubry et Rau, § 416).

Dans le dernier des deux cas envisagés ci-dessus, la radiation, peut donc être opérée au vu de la mainlevée du Sous-Comptoir, sans que le Conservateur ait à se préoccuper du sort des billets créés par le crédité.

Par contre, dans le second cas où aucune clause du contrat ne permet de considérer que le Sous-Comptoir s'est réservé le bénéfice de la garantie hypothécaire, celle-ci se trouve transférée aux porteurs des billets. Le Sous-Comptoir n'a dès lors qualité pour donner mainlevée que s'il est porteur des billets créés par le crédité. Strictement l'acte de mainlevée doit alors constater que les billets ont été représentés au notaire et que celui-ci a fait mention de la mainlevée sur chacun d'eux.

Toutefois, en raison du caractère semi-officiel du Sous-Comptoir des Entrepreneurs et de la pleine confiance que l'on peut attacher aux assurances données par son président directeur général à notre collègue et confirmées dans une lettre du 2 décembre 1952 adressée au Président de notre association (Annexe), le Comité de l'A.M.C. est d'avis qu'il est sans inconvénient d'accepter une mainlevée consentie par le Sous-Comptoir, même si elle ne fait pas mention des billets dont le création était prévue au bordereau d'inscription.

Dans l'un et l'autre des deux cas envisagés, la mainlevée devra, conformément aux prescriptions de l'art. 10 des statuts du Sous-Comptoir, être signée, non seulement par le représentant de cet établissement, mais aussi par celui du Crédit Foncier.

ANNEXE

Paris, le 2 décembre 1952.

SOUS-COMPTOIR
DES ENTREPRENEURS
PRES
LE CREDIT FONCIER DE FRANCE
6, rue Volney, Paris-2°

Monsieur le Président de l'Association Mutuelle des Conservateur des hypothèques de France, 35, rue du Plateau, Paris.

Monsieur le Président,

Par votre lettre du 14 novembre, vous avez bien voulu me questionner sur la portée des assurances données par ma lettre du 31 juillet dernier à M. le Conservateur du 7° Bureau des Hypothèques de la Seine en ce qui concerne le régime applicable à la circulation des effets souscrits par nos accrédités.

Je vous confirme que ces assurances sont valables pour tous les crédits hypothécaires sans exception, consentis par notre Etablissement.

Les billets souscrits par nos accrédités ne peuvent être présentés à l'escompte qu'au Crédit Foncier. Ils sont réescomptables exclusivement à la Banque de France et à la Caisse des Dépôts et Consignations.

En outre, toutes les fois que le Sous-Comptoir donne mainlevée d'une inscription hypothécaire, il. a toujours retiré au préalable les billets du Crédit Foncier, de telle sorte qu'aucun tiers porteur ne peut se prévaloir des droits attachés à ces billets.

Toutes ces dispositions ont un caractère impératif et résultent des accords passés entre le Crédit Foncier de France et le Sous-Comptoir des Entrepreneurs.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'expression de notre considération la plus distinguée.

Le Président, Directeur Général, signé : APPERT.

Annoter : C.M.L. n° 1296; Jacquet et Vétillard, V° Cession de créances, n° 21.