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Art. 134

INSCRIPTION D'OFFICE.

Privilège et Hypothèque légale du Trésor sur les biens des comptables.
Percepteurs des Contributions directes. - Pas d'inscription.

(Déc. Agent judiciaire du Trésor, 21 janvier 1953.)

Lors de la transcription d'un acte constatant une acquisition d'immeuble par un percepteur des Contributions directes, un de nos collègues a cru devoir inscrire le privilège du Trésor sur l'immeuble acquis, en exécution de l'Art. 7 de la loi du 5 septembre 1807, et, conformément aux prescriptions de la même disposition, il a envoyé un exemplaire du bordereau d'inscription à l'agent judiciaire du Trésor.

A la suite de cette transmission, il a reçu de l'agent judiciaire du Trésor une lettre du 21 janvier 1953, ainsi conçue :

" Comme à votre lettre visée en référence, par laquelle vous m'avez transmis un bordereau de l'inscription hypothécaire que vous avez prise d'office, en vertu de la loi du 5 septembre 1807, contre M. Tharagonnet, percepteur des Contributions directes, j'ai l'honneur de vous faire connaître que ce comptable n'est pas assujetti à l'inscription d'office instituée par l'Art. 7 de la loi du 5 septembre 1807.

Ce texte énumère, en effet, les comptables du Trésor qui sont tenus d'énoncer leurs titres et qualités dans les actes translatifs e propriété qu'ils souscrivent. Cette énumération est rigoureusement limitative et ne comprend pas les percepteurs des Contributions directes. Ceux-ci sont donc affranchis de l'obligation qui précède. Par suite, le receveur qui enregistre un des actes ci-dessus mentionnés concernant un percepteur, ainsi que le conservateur des Hypothèques qui le transcrit, doivent s'abstenir de requérir ou de prendre inscription au profit du Trésor, alors même que le percepteur aurait énoncé sa qualité dans l'acte.

" En conséquence, je vous renvoie le bordereau d'inscription communiqué en vous priant de vouloir bien procéder à son annulation. "

Observations. - Le Trésor possède sur les biens de certains de ses comptables :

1° Soit un privilège, lorsqu'il s'agit de biens acquis à titre onéreux par le comptable depuis sa nomination. Ce privilège grève également les biens acquis depuis la même date par la femme du comptable, même séparée de biens, à moins qu'il ne soit justifié que les deniers employés à l'acquisition lui appartenaient personnellement. (Loi du 5 septembre 1807, art. 4.)

2° Soit une hypothèque légale, lorsqu'il s'agit d'immeubles appartenant au comptable lors de sa nomination ou acquis depuis autrement qu'à titre onéreux. (Même loi, art. 6.)

Le privilège visé au n° 1 de l'alinéa qui précède, de même que l'hypothèque visée au n° 2, doivent être inscrits à la diligence des receveurs de l'Enregistrement ou des conservateurs des Hypothèques lorsqu'ils sont appelés à enregistrer ou à transcrire des actes de vente, d'acquisition, de partage ou d'échange ou d'autres actes translatifs de propriété ayant pour objet des immeubles grevés du privilège ou de l'hypothèque. Ces fonctionnaires sont en outre tenus d'envoyer un exemplaire du bordereau à l'agent judiciaire du Trésor. ·(Même loi, art. 7; Rép. Alph. Enr. V° Répertoire n° 92.)

La question de savoir si les percepteurs des Contributions directes entraient dans la catégorie des comptables dont les biens sont grevés du privilège ou de l'hypothèque du Trésor était, jusqu'à présent, controversée (v. Précis Chambaz et Masounabe, n° 56). La décision de l'agent judiciaire du Trésor du 21 janvier 1953 rapportée ci-dessus, la résout par la négative: L'auteur de cette décision étant compétent au premier chef pour déterminer la portée de la loi du 5 septembre 1807, les conservateurs peuvent sans risque s'en rapporter à son interprétation.

La décision susvisée précise en outre que les seuls comptables visés par la loi du 5 septembre 1807 sont ceux désignés à l'Art. 7 de cette loi dont l'énumération est rigoureusement limitative, c'est-à-dire " tous receveurs généraux du département, les receveurs particuliers d'arrondissement, tous payeurs généraux et divisionnaires, ainsi que les payeurs de départements des ports et des armées ". Cette opinion rejoint celle de la Direction Générale pour qui la loi ne vise que les comptables principaux et non les comptables subordonnés. (Rép. alph. Enreg., V° Répertoire n° 92, J. C. P. 1951, IV-1014, note M. P., B.A. 5361. ) Des renseignements recueillis officieusement auprès des services centraux du Ministère de Finances, il résulte qu'aux comptables ainsi désignés par le texte de 1807 correspondent actuellement : le receveur central des Finances de la Seine, le payeur général de la Seine, les Trésoriers-payeurs généraux des départements et des territoires d'outre-mer, les receveurs particuliers des Finances, les trésoriers-payeurs des territoires d'outre-mer et les payeurs aux armées.

Au sujet de ces derniers, le Journal des Conservateurs (art. 12253, in fine) observe : " Il paraîtrait que le titre de " payeur aux armées " serait actuellement attribué à des agents n'ayant pas le maniement des deniers ou ne relevant pas de la juridiction de les Cour des Comptes. Le conservateur ne saurait avoir égard à cette allégation, même confirmée, tant que la loi des 5-15 septembre 1807 n'aura pas été abrogée ou son texte modifié ". Cette conclusion s'impose d'autant plus que, selon les renseignements recueillis, si les payeurs subordonnés ne sont pas soumis en fait aux prescriptions de la loi de 1807, il en est autrement des payeurs supérieurs. Les conservateurs, qui ne seraient d'ailleurs pas en mesure de faire la distinction au vu de l'acte présenté à la transcription, ne peuvent que faire application de la loi dès lors que l'acte révèle la qualité de " payeur aux armées " de l'intéressé.

Annoter : C.M.L. n° 56 ; - de France n° 46.