Retour

Art. 142

MENTIONS EN MARGE DES TRANSCRIPTIONS
RADIATIONS

Nullité d'une acquisition. - Transcriptions en marge desquelles peut être mentionnée l'arrêt qui la prononce. - Inscription qui peuvent être radiées en exécution de cet arrêt.

Lorsqu'un arrêt, après avoir prononcé la nullité d'une acquisition à l'encontre du légataire universel de l'acquéreur, ordonne la mention de l'arrêt « en marge des actes transcrits » et la radiation de toutes inscriptions au nom de l'acquéreur, de ses ayants droit ou de leurs acquéreurs, le Conservateur requis d'opérer ces mentions et radiations, tenu de sauvegarder les intérêts des tiers, ne commet pas de faute en exigeant de connaître la portée exacte de l'arrêt à l'égard de ceux-ci avant de déférer à la réquisition.

L'arrêt en cause, n'ayant pas statué sur la validité de l'attestation notariée constatant la transmission de l'immeuble au légataire universel, n'a pas à être mentionné en marge de cette attestation.

Par contre, la mention de l'arrêt doit être opérée en marge de l'acte constatant la vente de l'immeuble par le légataire universel, dès lors, d'une part, que le titre de l'acquéreur n'est devenu efficace à l'égard des tiers par la transcription que postérieurement à l'introduction de l'instance en nullité et, d'autre part, que sa signification de l'arrêt faite à l'acquéreur a mis celui-ci à même de faire valoir les moyens personnels dont il aurait pu disposer à l'encontre du demandeur en nullité.

Enfin, les tiers porteurs des grosses représentant la fraction non payée du prix de vente consentie par le légataire universel n'ayant pas été appelés à faire valoir leurs moyens personnels, le Conservateur, en prévision de ces moyens de tierce-opposition, refuse valablement de radier les inscriptions d'office jusqu'à ce que soit rapportée la preuve du consentement des créanciers ou qu'il soit établi qu'ils ont été mis à même de faire valoir leurs moyens de défense.

Tours, 21 novembre 1951.

Le Tribunal :

Attendu que le 4 mars 1938 la dame B..., épouse W..., achetait le château de la Bourdaisière, sis à... ; que le 14 avril 1939 elle acquérait 65 hectares de terres attenantes au château; que W... décédait le 14 mai 1943; que le 30 avril 1945, ascite de son mari, la dame D..., fille issue d'un premier mariage de W..., fait assigner la dame B..., veuve W..., quatrième épouse de son père, pour faire dire que l'acquisition du château de la Bourdaisière et des terres avoisinantes constituait des donations déguisées, nulles par application de l'Art. 1099, §2, du Code civil; que la dame B...-W... décédait le 8 mars 1946, avant qu'il ait été statué sur cette demande; que D..., légataire universel de la dame B...-W.., vendait le château de la Bourdaisière et les terres avoisinantes à C... par acte en date du 12 juin 1946, transcrit le lendemain; que le 13 septembre 1946, les époux D... reprenaient contre D... l'instance précédemment engagée à l'encontre de la dame B...-W...; que le 13 octobre 1948, la Cour d'Orléans déclarait que l'acquisition du château de la Bourdaisière constituait une donation déguisée entre époux et annulait cette donation ; qu'ainsi le château et ses dépendances, énumérées à l'acte du 4 mars 1938, rentraient dans l'actif successoral de W... ; que la radiation de toutes inscriptions au nom de la dame B..., veuve W..., de ses ayants droit ou de leurs acquéreurs, la mention de l'arrêt en marge des actes transcrits et de la transcription de l'acte de vente au nom de W... étaient en outre ordonnées; que les époux D..., se prévalant de cet arrêt devenu définitif, demandèrent au conservateur des hypothèques de T... ;

1° D'en faire mention en marge des actes suivants transcrits à son bureau, le 22 mars 1938, volume 1531, n. 35 (acquisition du château de la Bourdaisière des consorts de G..., acte reçu C..., notaire à Paris, le 4 mars 1938); le 13 juin 1946, volume 2137, n. 11 (attestation du 12 juin 1946 reçue Ch..., notaire à M..., concernant le droit de propriété de D... en qualité de légataire universel de la dame W..., notamment sur la propriété de la Bourdaisière); le 13 juin 1946, volume 2137, n. 12 (vente par D... à C..., notamment de la propriété de la Bourdaisière suivant acte reçu Ch..., notaire à M..., le 12 juin 1946);

2° De radier définitivement les inscriptions suivantes, en ce qu'elles frappent la propriété de la Bourdaisière faisant l'objet de la vente reçue C..., notaire à Paris le 4 mars 1938, transcris le 22 mars 1938, volume 1531, n. 35 : 13 juin 1946, volume 337, n. 131 (inscription au profit de D... contre C...) et, à la même date, volume 337, n. 132, inscription au profit du même contre le même pour sûreté du solde du prix de la vente, reçu par acte Ch..., notaire à M..., le 12 juin 1946, transcrite le lendemain, volume 2137, n. 12; que le conservateur des hypothèques transcrivit l'arrêt de la Cour d'Orléans mais se refusa à opérer les mentions et radiations demandées ; que les époux D... ayant à nouveau saisi la Cour, celle-ci, rectifiant une erreur matérielle, indiqua que l'acquisition du château de la Bourdaisière par la dame B...-W... avait eu lieu le 4 mars 1938 et non le 14 mars comme le portait le précédent arrêt ; que la nouvelle décision en date du 3 mai 1950 déclarait en outre qu'il n'y avait pas lieu de compléter les dispositions de l'arrêt du 13 octobre 1948 relatives aux radiations et mentions à opérer; que, requis à nouveau, le conservateur des hypothèques de T... mentionna l'arrêt du 13 octobre 1948 en marge de l'acte de vente reçu C..., notaire à Paris, le 4 mars 1938, mais que, pour le surplus, il persista, dans son refus; que les époux D... ont alors assigné B..., conservateur des hypothèques de T... pour qu'il soit condamné à opérer les mentions et radiations demandées; qu'ils lui réclament, en outre, 500.000 francs de dommages-intérêts; que B... résiste à ces prétentions et réclame, par voie reconventionnelle, 50.000 francs de dommages-intérêts ;

Sur les mentions de radiations :

a) Mention en marge de l'attestation établie par Ch..., notaire à M..., le 12 juin 1946, transcrite le 13 juin 1946, volume 2137, n. 11 ;

Attendu qu'aux termes de l'Art. 4 de la loi du 23 mars 1855, les jugements à mentionner en marge d'un acte transcrit sont ceux prononçant la résolution, nullité ou rescision de cet acte; que l'arrêt du 13 octobre 1948 n'a pas statué sur la validité de l'acte purement déclaratif que constitue l'attestation notariée ; que la mention en marge n'a donc pas à être opérée ;

b) Mention en marge de l'acte de vente de D... à C... de la propriété de la Bourdaisière, acte reçu Cn..., notaire à M..., le 12 juin 1946, transcrit le 13 juin 1946, volume 2137, n. 12 :

Attendu que le titre d'acquisition de C... n'est devenu efficace à l'égard des tiers par la transcription que postérieurement à l'introduction de l'instance qui a abouti à l'arrêt de la Cour d'Orléans du 13 octobre 1948; qu'en effet, la demande en nullité de donation déguisée, remonte au 30 avril 1945, alors que C... n'a fait transcrire son acte d'acquisition que le 13 juin 1946; qu'ainsi l'arrêt intervenu à la requête des époux D... est opposable à C... ; qu'enfin C...a été mis à même de faire valoir les moyens personnels dont il aurait pu disposer à l'encontre des époux D..., l'arrêt de la Cour d'Orléans lui ayant été signifié le 19 octobre 1949 ; que la mention en marge sera donc ordonnée ;

c) Radiation des inscriptions le 13 juin 1946, volume 337, n, 131 et 132, inscriptions prises au profit de D... contre C... du privilège du vendeur résultant de l'acte reçu Ch..., notaire à M..., le 12 juin 1946, transcrit le lendemain ;

Attendu que l'acte de vente reçu Ch... le 12 juin 1946 prévoyait que pour la fraction du prix non payée comptant, soit 3.500.000 francs, il serait délivré deux grosses au porteur, l'une pour 2.500.000 francs et l'autre pour 1.000.000 de francs; que le paiement de ces sommes était garanti par le privilège du vendeur d'immeubles inscrit d'office par le conservateur; que les créanciers privilégiés sont représentés par leur débiteur dans les décisions judiciaires rendues contre lui quant à la chose grevée du privilège, lorsqu'ils ne peuvent opposer à ces décisions que les droits de leur débiteur, mais qu'ils peuvent les repousser, comme étant à leur égard res inter alios judicata, lorsqu'ils les combattent à l'aide de moyens qui leur sont personnels: qu'en l'espèce, les tiers porteurs des grosses, créanciers de C..., n'ont jamais été appelés à faire valoir leurs moyens personnels; que le conservateur des hypothèques, en prévision de ces moyens de tierce opposition, a valablement refusé d'opérer la radiation des inscriptions prises du chef de C..., jusqu'à ce que les époux D... rapportent la preuve du consentement des créanciers à cette radiation ou établissent qu'ils ont été mis à même de faire valoir leurs moyens de défense;

Sur les demandes de dommages-intérêts:

Attendu que les époux D... font grief au conservateur des hypothèques de ce que C... ne leur a pas permis de jouir du domaine de la Bourdaisière ; que c'est C... seul, et non le conservateur, qui est à l'origine de ce préjudice; que le conservateur, tenu de sauvegarder les intérêts des tiers, n'a pas commis de faute en exigeant de connaître la portée exacte de l'arrêt du 13 octobre 1948 à l'égard de ceux-ci ; qu'enfin, en transcrivant le 13 juin 1946 l'acquisition, de C..., il n'a fait que se conformer à des prescriptions légales et impératives et notamment aux dispositions de l'Art. 2200 du Code civil; que le conservateur des hypothèques n'a donc commis aucune faute pouvant donner lieu à dommages-intérêts; que les époux D..., se méprenant sur la portée exacte de l'arrêt de la Cour d'Orléans, n'ont pas introduit à l'égard du conservateur des hypothèques une instance à caractère abusif ; que la demande reconventionnelle en dommages-intérêts sera rejetée; -- Attendu que les époux D... supporteront les dépens, aucune faute incombant à B.,. ne permettant de les mettre à la charge de celui-ci ;

Pour ces motifs :

Dit que B..., conservateur des hypothèques de T..., devra mentionner l'arrêt de la Cour d'appel d'Orléans du 13 octobre 1948 en marge de la transcription, effectuée le l3 juin 1946, sous le n. 12, volume·2137, de la vente par D... à C... de la propriété de la Bourdaisière, suivant acte reçu Ch..., notaire à M..., le 12 juin 1946;

Condamne les époux D... aux dépens...

Observations. I. - Un résumé succinct des faits de la cause permettra de mieux comprendre la question posée au Tribunal.

A la requête de l'héritière d'un sieur W..., la Cour d'appel d'Orléans a, par un arrêt du 13 octobre 1948, reconnu que l'acquisition par la dame B..., quatrième épouse du sieur W..., du domaine de la Bourdaisière dissimulait une donation entre époux.

La dame B..., épouse W..,, contre laquelle la demande de nullité avait été originairement formée, est décédée an cours de l'instance, laquelle a été reprise contre D..., son légataire universel. Par ailleurs, entre le décès de la dame B..., épouse W..., et la reprise de l'instance contre lui D... a vendu le domaine de la Bourdaisière à un tiers, C...

En l'état, l'arrêt du 13 octobre 1948, après avoir annulé l'acquisition faite par la dame W..., en tant qu'elle constituait une donation entre époux, a ordonné « la radiation de toutes inscriptions au nom de la dame W..., de ses ayants droit ou de leurs acquéreurs, la mention de l'arrêt en marge des actes transcrits et la transcription de l'acte de vente au nom de W... ».

Requis d'opérer les formalités prescrites par l'arrêt, le conservateur a procédé à la transcription de l'arrêt, mais refuse d'effectuer les mentions en motivant son refus par l'absence d'indication dans l'arrêt des formalités en marge desquelles les mentions devaient être inscrites.

Les parties demandèrent alors à la Cour d'Orléans de compléter sa première décision: mais celle-ci, par un arrêt du 3 mai 1950, estima son précédent arrêt suffisamment explicite et refusa de la compléter.

En l'état, la demanderesse requit le conservateur :

1° De mentionner l'arrêt du 13 octobre 1948 en marge de la transcription :

a) De l'acte constatant l'acquisition faite au nom de la dame W... ;

b) De l'attestation notariée constatant la transmission par décès de l'immeuble au légataire universel de; la dame W...;

c) De l'acte de vente par D... à C... :

2° De radier définitivement, en ce qu'elles grèvent le domaine en cause. les inscriptions d'office prises contre C... au profit des porteurs des grosses représentant la partie non payée du prix de la vente consentie par D...

Mieux informé par les précisions contenues dans la nouvelle réquisition, le conservateur accepta alors de mentionner arrêt du 13 octobre 1948 en marge de la transcription de l'acte annulé. Il maintint par contre son refus antérieur en ce qui concerne les autres mentions.

II. - Le conservateur, requis de porter une mention en marge d'une formalité, ne doit déferrer à cette réquisition que si lui est désignée la formalité à émarger. Il n'a pas à déterminer celle-ci lui-même ; il ne serait d'ailleurs pas toujours à même de le faire et, en tous cas, aucun texte ne l'y oblige. En outre, en s'abstenant de se faire préciser la formalité en marge de laquelle la mention doit être inscrite, il courrait le risque de commettre une erreur ou une omission dont il devrait éventuellement supporter les conséquences dommageables (Cass. req. 19 avril 1836, S. 1836-1-562, J.C. 283; Cass, req. 11 juillet 1843, R.H. 80).

Aussi reconnaît-on généralement que le conservateur ne commet aucune faute en refusant d'opérer une mention, lorsque la formalité en marge de laquelle cette mention doit être portée n'est pas individualisée par l'indication des noms et prénoms des parties, de sa date et des volume et numéros du registre (Troplong, sous l'art. 214 B.C.C. ; Jacquet et Vétillard, Introduction, n° 27 ; Chambaz et Masounabe-Puyanne, n° 1072 et 1400 et la jurisprudence citée).

A noter qu'il n'est pas indispensable que la formalité à annoter soit individualisée dans le jugement ou l'arrêt même qui ordonne la mention. Elle peut l'être dans une réquisition émanant des parties.

C'est donc à bon droit que, dans l'espèce, le conservateur a refusé toute mention de l'arrêt du 13 octobre 1948 avant que lui aient été données des précisions sur les dates, volume et numéro des formalités à émarger. Le tribunal a reconnu qu'en procédant ainsi, il n'avait pas commis de faute.

III. - Le tribunal a en outre approuvé le conservateur d'avoir maintenu son refus, même une fois la formalité individualisée, en ce qui concerne la mention de l'arrêt en marge de l'attestation notariée constatant la transmission du domaine de la Bourdaisière à D... en sa qualité de légataire universel de la dame W... Pour se prononcer en ce sens, il s'est appuyé sur le fait que l'arrêt du 13 octobre 1948 n'a pas statué sur la validité de l'attestation.

En effet, aux termes de l'art. 4 de la loi du 23 mars 1855, « tout jugement prononçant la résolution, nullité ou rescision d'un acte transcrit doit... être mentionné en marge de la transcription, faite sur le registre ».

C'est par suite exclusivement en marge de l'acte résolu, annulé ou rescindé que la mention peut être opérée en exécution de cette disposition.

IV. - Pour le même motif, le jugement aurait dû également décider que l'arrêt du 13 octobre 1948 n'avait pas non plus à être mentionné en marge de la transcription de l'acte constatant la vente par D.., à C..., dont l'annulation n'était pas prononcée.

Il ordonne cependant cette mention.

Pour motiver sa décision, le tribunal observe tout d'abord que l'acte d'acquisition de C.... n'a été transcrit que postérieurement à l'introduction de l'instance qui a abouti à l'arrêt du 13 octobre 1948 et en conclut que cet arrêt était dès lors opposable a C...

Il se rallie ainsi à la thèse selon laquelle l'acquéreur dont le titre est transcrit après l'introduction de l'instance en nullité est représenté dans cette instance par son vendeur (Cass. civ., 15 mars 1947, D.P. 18471-155 ; Dalloz, J.C., V. Appel civ., n° 543 et suiv. ; Plasson et Colmet-Daage, 2° éd., n° 970).

Il importe cependant de remarquer que la représentation de l'acquéreur par son vendeur ne vaut que dans la mesure ou le second aurait eu à opposer à la demande les moyens du second. Pour ce qui est de ses moyens personnels, l'acquéreur peut les faire valoir par la voie de la tierce opposition (Garsonnet et Lézar-Bru, t. III, n° 545; Plasson, Tissier et Morel, t. III, n° 885).

C'est sans doute à cet aspect de la question que le jugement fait allusion lorsqu'il constate que C... a été mis à même de faire valoir ses moyens personnels, l'arrêt du 13 octobre 1948 lui ayant été signifié.

Mais de ce que cette signification a mis C... à même de former tierce opposition contre l'arrêt, il ne résulte pas que celui-ci lui soit dès maintenant opposable. La voie de la tierce-opposition est en effet ouverte aux intéressés pendant trente ans à partir du jour ou ils ont connaissance de la décision qui leur fait grief (Tissier, n° 162 ; Plasson et Colmet Daage, 2° éd., t. II, n° 1043), de telle sorte que, dans l'espèce actuelle, à moins d'un acquiescement de C... à l'arrêt du 13 octobre 1948, lequel n'est pas allégué, cet arrêt est encore susceptible d'être rétracté sur sa demande.

Quoi qu'il en soit, le conservateur, condamné a opérer la mention, ne pouvait qu'exécuter le jugement du 21 novembre 1951, ou former opposition contre cette décision. En fait, en optant pour son exécution, le conservateur ne courait pas grand risque étant donné, d'une part, qu'il est peu vraisemblable que C... ait à faire valoir contre l'arrêt de la Cour d'Orléans des moyens personnels susceptibles d'en motiver la rétractation et, d'autre part, qu'une mention constatant exclusivement l'annulation du titre de son vendeur, dont la réalité n'est pas discutable, n'étant pas de nature à lui porter préjudice.

Notre collègue a cependant été amené à faire appel incident du jugement sur ce point, la demanderesse: ayant, de son côté, formé un recours analogue contre les chefs de la décision qui lui étaient contraires.

V. - Le tribunal a, au contraire, approuvé l'attitude du conservateur en ce que ce dernier avait refusé de radier les inscriptions d'office prises au profit de D... contre les époux C...

Il est de principe, en effet, que la radiation d'une inscription ne peut être opérée, en vertu d'un jugement ou d'un arrêt, que si cette décision est opposable au bénéficiaire de l'inscription (Planiol, Ripert et Becqué, n° 859 ; Baudry, Lacantinerie et de Loynes, n° 1856 et 1862 ; Jacquet et Vétillard, V. Jugement de radiation n° 4 ; Chambaz et Masounabe, n° 1398 ; Cass. civ. 6 décembre 1859, D.P. 1660-1-17, J.C. 1542).

A cet égard, le jugement observe fort justement que c les créanciers privilégiés sont représentés par leur débiteur dans les décisions judiciaires rendues contre lui quant à la chose grevée du privilège, lorsqu'ils ne peuvent opposer à ces décisions que les droits de leur débiteur, mais qu'ils peuvent les repousser, comme étant à leur égard res inter alios judicata, lorsqu'ils les combattent à l'aide de moyens qui leur sont personnels ».

OR, en l'espèce, bien que D..., le vendeur, ait été partie à l'instance en nullité, l'arrêt du 13 octobre 1948 qui a terminé cette instance n'était pas néanmoins opposable aux bénéficiaires des inscriptions d'office : celles-ci ont été prises, en effet, au profit, non de D... personnellement, mais des porteurs des deux grosses dont la création était prévue en représentation de la partie du prix de vente non payée comptant ; d'autre part, les porteurs de grosses sont demeurés étrangers à l'instance en nullité et peuvent encore faire valoir éventuellement leurs moyens personnels contre l'arrêt du 13 octobre 1948 par voie de tierce-opposition.

Cet arrêt ne remplissait pas dès lors les conditions nécessaires pour autoriser la radiation et c'est à bon droit que le conservateur a refusé de l'effectuer.

Annoter : C.M.L. n° 1026, 1072 et 1400; de France, n° 412; Jacquet et Vétillard, Introduction n° 27 et V°. Jugement de radiation, n° 4.