Retour

ARTICLE 273

ETATS HYPOTHECAIRE.

Réquisitions.
Désignation des personnes et des immeubles conformément aux prescriptions de l'art. 9 du décret du 4 janvier 1955.
Conséquences.

(Rép. Sec. d'Et. Budget 4 juillet 1956)

Question. - M. Etienne Rabouin demande à M. le Secrétaire d'Etat au Budget, en ce qui concerne la nouvelle loi sur la publicité foncière, si la moindre divergence dans la désignation des personnes ou des biens, contenue en la réquisition d'état et les documents, même anciens, aux mains des conservateurs, autorise ceux-ci à délivrer un état négatif. Le cas suivant se présente dans la pratique : une réquisition d'état est établie en conformité des prescriptions nouvelles et des documents d'état civil et cadastraux. Le bordereau d'inscription aux mains du conservateur contient une fausse date de naissance. Le conservateur est-il en droit de délivrer un état négatif, alors qu'il ne peut y avoir de doute sur l'identité de la personne et qu'en fait il existe une inscription.

Réponse. - Depuis le 1er janvier 1956, les réquisitions de copie ou d'extrait des inscriptions de privilège ou d'hypothèque prise à l'encontre d'une personne déterminée, ou de certificat qu'il n'en existe pas, doivent comporter, comme toutes les réquisitions, de copie, extrait ou certificat dont la forme est définie par l'article 9 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955, " l'identification des personnes du chef desquelles les renseignements sont requis " (alinéa 1er) et, en outre si elles se rapportent à des immeubles individuellement désignés, " toutes les indications prévues au premier alinéa de l'article 7 " du même décret (alinéa 2). Tous ces éléments sont, en effet, indispensable au conservateur pour identifier de façon certaine les personnes et les immeubles intéressés, et l'obligation de les énoncer dans les réquisitions constitue le corollaire de l'obligation absolue de les énoncer dans les documents (expéditions, extraits, copies, bordereaux) publiés à partir du 1er janvier 1956. Mais les nouvelles règles ne seront appliquées de façon rigoureuse qu'à l'égard des réquisitions portant sur ces derniers documents. L'article 44-1 du décret n° 55-1350 du 14 octobre 1955 comporte, en effet, des dispositions de caractère transitoire, selon lesquelles le conservateur peut déférer aux réquisitions qui ne contiennent pas la date et le lieu de naissance du propriétaire du ou des immeubles grevés lorsque ces réquisitions portent sur les formalités accomplies, soit avant le 1er janvier 1922, soit après la même date, mais seulement, en ce qui concerne cette dernière hypothèse, " dans les cas exceptionnels où il estime, après consultation du fichier immobilier ou des archives antérieures, qu'il est en mesure d'identifier, sans ambiguïté possible, les personnes insuffisamment désignés ". Lorsqu'il défère à la réquisition qui lui est présentée, le conservateur doit, toutes les fois où il est conduit à consulter des documents publiés antérieurement au 1er janvier 1956; a reporter, conformément aux errements anciens, à toutes les formalités susceptibles de concerner la personne désignée et délivrer copies ou extraits de celles qui la concernent effectivement; il en est ainsi même dans le cas où une discordance est relevée entre les éléments d'identification mentionnés dans les documents publiés et ceux énonces dans la réquisition, pourvu qu'aucun doute n'existe sur l'identification de la personne ou, éventuellement, de l'immeuble. Ce n'est que dans le cas et dans la mesure où elle existerait entre la réquisition et les documents publiés depuis le 1er janvier 1956 qu'une discordance concernant la désignation des personnes ou des immeubles motiverait la délivrance d'un certificat négatif.

(" J.O. " 4 juillet 1956, Déb. Cons Rép., p. 1358-1359.)

Observations. -- L'article 9 du décret du 4 janvier 1955, qui réglemente la forme des réquisitions, ne distingue pas selon que les renseignements requis portent sur la période courue depuis le 1er janvier 1956 ou sur la période antérieure. En principe, par conséquent, même pour cette dernière période, les réquisitions doivent indiquer la date et le lieu de naissance des personnes du chef desquelles les renseignements sont demandés et désigner les immeubles de la manière prévue au premier alinéa de l'article 7 du décret précité.

Toutefois, par dérogation à ces prescriptions, l'article 41 du même décret et l'article 4 du décret d'application du 14 octobre 1955 donnent aux Conservateurs la faculté d'accepter, dans certains cas, les réquisitions qui n'indiquent pas les date et lieu de naissance des personnes désignées.

De même, bien qu'il n'ait pas été prévu de dérogation analogue en ce qui concerne la désignation des immeubles, les Conservateurs peuvent déférer, sous leur responsabilité, à une réquisition où cette désignation, sans renfermer toutes les énonciations prévues à l'article 7, premier alinéa, du décret du 4 janvier 1955, permet néanmoins d'identifier sans ambiguïté possible les immeubles insuffisamment désignés.

Pour ce qui est des formalités opérées depuis le 1er janvier 1956, la stricte application des principes posés par l'article 9 du décret du 4 janvier est le corollaire des prescriptions des articles du même décret qui visent à assurer pour l'avenir l'identification certaine des personnes et des immeubles. Par contre, pour les formalités antérieures au 1er janvier 1956, elle peut conduire à des conséquences contraires aux intentions des auteurs du texte.

C'est ainsi que, lorsque la réquisition mentionne les date et lieu de naissance, le Conservateur est fondé, conformément à la règle tracée par le dernier alinéa de l'article 9, à éliminer de ses recherches toutes les personnes dont la date et le lieu de naissance sont différents de ceux indiqués. Une formalité antérieure au 1er janvier 1956, concernant effectivement la personne désigner dans la réquisition, peut dès lors n'être pas révélée dans un état du seul fait que la date de naissance a été inexactement indiquée dans le bordereau d'inscription ou dans l'acte transcrit.

Comme dans le passé, les erreurs dans les énonciations des dates de naissance ont été fréquentes, l'application littérale des nouvelles dispositions risquerait d'aboutir souvent à la délivrance d'états incomplets.

Les intéressés ont sans doute la possibilité d'échapper aux conséquences des erreurs commises au sujet des date et lieu de naissance dans les bordereaux déposés et les actes transcrits avant le 1er janvier 1956, en précisant dans leurs réquisitions que les date et lieu de naissance indiqués ne sont à retenir que pour la période courue depuis le 1er janvier 1956. C'est la recommandation faite aux notaires par le Conseil supérieur du Notariat. (V. Bull. A.M.C., art. 241.)

Mais, dans la pratique, cette réserve n'est formulée que d'une manière assez exceptionnelle. En outre, dans la rigueur des principes, le Conservateur n'est pas obligé de déférer à une telle réquisition.

Ainsi donc, appliqués à la lettre, les nouveaux textes ne donneraient pas aux usagers la possibilité d'obtenir, pour la période antérieure au 1er janvier 1956, des états hypothécaires comportant les mêmes garanties que par le passé.

Ce résultat ne serait certainement pas en harmonie avec l'esprit des décrets des 4 janvier et 14 octobre 1955 dont l'un des buts est de donner plus de certitude aux renseignements hypothécaires.

Il serait d'autant moins admissible que, pour la période antérieure au 1er janvier 1956, les Conservateurs ont à leur disposition les mêmes documents que par le passé et que rien, dès lors, ne s'oppose à ce que, pour cette période, ils délivrent les états dans les mêmes conditions que sous le régime antérieur.

Dans cette situation, l'intérêt bien compris des Conservateurs, autant que celui des usagers du service hypothécaire, commandent d'éviter une application trop stricte des textes sur les points qui viennent d'être examinés.

A cet effet, il conviendrait de distinguer selon la période sur laquelle portent les renseignements demandés. La rigueur des principes inscrits dans l'article 9 du décret du 4 janvier 1955 serait réservée au cas où les renseignements portent sur la période courue depuis le 1er janvier 1956. Pour la période antérieure, au contraire, ces textes seraient appliqués avec toute la souplesse compatible avec la sauvegarde de la responsabilité.

Dans cet ordre d'idées, on ne peut que conseiller aux collègues de s'abstenir, pour cette période, d'user de leur droit de refuser une réquisition n'indiquant pas les date et lieu de naissance (ou, ce qui revient au même, spécifiant que ces indications ne doivent être retenues que pour la période antérieure au 1er janvier 1956) toutes les fois que cette réquisition aurait été accueillie avant le 1er janvier 1956.

En outre, lorsque les date et lieu de naissance sont indiqués, il importe, pour la même période, que les recherches soient faites comme sous le régime antérieur et spécialement que des formalités ne soient pas éliminées du seul fait de la discordance des dates de naissance, lorsque les autres éléments d'identification, à valeur permanente, donnent la certitude qu'il y a identité entre la personne visée dans la formalité antérieure au 1er janvier 1956 et celle du chef de laquelle les renseignements sont demandés.

Ce sont ces considérations d'opportunité qui ont inspiré l'avis exprimé par le Secrétaire d'Etat au Budget dans la réponse à la question écrite de M. Rabouin.

De ce qui précède et de ce que la réponse ci-dessus recommande, dans le cas visé, d'effectuer les recherches suivant " les errements anciens ", il ne s'ensuit pas qu'il convient de les conduire et de certifier suivant le principe des équipollents aussi strictement que par le passé.

Ce système est condamné par le nouvel article 219 du Code civil et par l'article 41 du décret du 4 janvier 1955, aux termes duquel, même pour les réquisitions se rapportant à des formalités antérieures au 1er janvier 1956, dans le cas de l'omission des lieu et date de naissance, la désignation est incomplète et est réputée insuffisante au sens de l'article 2197. A plus forte raison dans le cas d'omission ou d'erreur dans les autres éléments d'identification permanente : noms et prénoms et, le cas échéant, nom du conjoint.

D'ailleurs, comme nous l'indiquons, la réponse ministérielle l'admet en précisant que, dans le cas de discordance existant entre les éléments d'identification, la formalité doit être délivrée " pourvu qu'aucun doute n'existe sur l'identification de la personne ou éventuellement de l'immeuble ". Comme le décide l'article 44 du décret du 14 octobre 1955. On peut donc ne relever que les comptes dont l'intitulé permet " d'identifier, sans ambiguïté possible. les personnes insuffisamment désignées ".

Annoter : C.M.L., 2° éd., n° 1595 A et 1641 A (feuilles vertes).