ARTICLE 415 PUBLICATION D'ACTES. Actes constatant le changement de dénomination d'une société. Question. - M. Isorni demande à
M. le Ministre des Finances de lui faire connaître, sous réserve
de l'interprétation souveraine des tribunaux, si un Conservateur
des Hypothèques est fondé à refuser la publicité
d'un acte notarié constatant le changement de la dénomination
d'une société, sous prétexte que le document ne contient
pas la désignation exacte des immeubles situés dans la circonscription
de la Conservation, ni la référence à la publication
des titres depuis le 1er janvier 1956, alors que les cas de l'espèce
semblent régis exclusivement par l'article 28, n° 9, du décret
du 4 janvier 1955 et par l'article 70 du décret du 14 octobre 1955,
dont les dispositions ne prévoient pas les énonciations
exigées par le Conservateur, étant rappelé au surplus
que l'article 38 du décret du 14 octobre 1955 dispense, pour les
formalités de cette même nature, de la certification d'identité.
(Question du 26 juillet 1958.) Réponse. - Réponse négative,
sous réserve de 1er interprétation souveraine des tribunaux.
(Journ. Off. du 4 octobre 1958, Débats parl., Ass. Nat. page 2764.)
Observations. - Sur chacun des deux points sur
lesquels elle se prononce, la réponse qui précède
appelle les remarques suivantes. I. - Désignation des immeubles. - En ce
qu'elle exprime l'avis que les actes constatant le changement de dénomination
d'une société peuvent être publiés, même
s'ils ne renferment pas la désignation exacte des immeubles qu'ils
concernent, la réponse dont il s'agit est en contradiction avec
le premier alinéa de l'article 7 du décret du 4 janvier
1955, aux termes duquel « tout acte ou décision judiciaire
sujet à publicité dans un bureau des hypothèques
doit indiquer, pour chacun des immeubles qu'il concerne, la nature, la
situation, la contenance et la désignation cadastrale... ».
Pour que cette dernière disposition ne soit pas
applicable aux actes en cause, il faudrait que ceux-ci en soient expressément
dispensés, comme ils l'ont été de la certification
de l'identité de la société par l'article 38-1 du
décret du 14 octobre 1955. Or les textes qui régissent la matière
ne renferment aucune dispense de cette nature. Sur le plan des principes, les actes constatant le changement
de dénomination d'une société doivent donc, pour
pouvoir être publiés, contenir la désignation des
immeubles en considération desquels la publication est requise.
Du point de vue pratique, l'absence de cette désignation peut n'être pas sans inconvénients. A cet égard, il faut distinguer selon qu'il s agit immeubles ruraux ou d'immeubles urbains. Dans le premier cas, les formalités opérées
depuis le 1er janvier 1956, sous l'ancienne dénomination de la
société, ont été annotées à
la fiche personnelle créée au nom de cette dernière.
La publication de l'acte constatant le changement de dénomination
n'entraîne dès lors que la modification de l'intitulé
de cette fiche et la création de fiches annexes au nom de la société
sous sa nouvelle désignation (ou, dans les conservations où
il n'est pas utilisé de fiches annexes, la création de nouvelles
fiches personnelles correspondant à la nouvelle dénomination
de la société et l'établissement de références
entre fiches anciennes et nouvelles). La désignation des immeubles ruraux appartenant
à la société ne présente pas dès lors
d'intérêt essentiel; elle aurait seulement l'avantage de
permettre de s'assurer que tous les immeubles ayant fait l'objet d'une
formalité ont bien été annotés à la
fiche et qu'il n'a pas été créé d'autre fiche
au nom de la même société à la suite d'une
erreur commise, dans certains des actes publiés, soit dans l'énoncé
de la dénomination de la société, soit dans l'indication
de la date de la constitution définitive ou du numéro d'immatriculation
au registre de commerce. La situation est différente au cas des immeubles
urbains. Les formalités concernant ces immeubles ont été
inscrites, avec l'ancienne dénomination de la société,
à la fiche de chaque immeuble; par suite, en dehors des modifications
à apporter à la fiche personnelle, comme au cas des immeubles
ruraux, il faut annoter le changement de dénomination à
chacune des fiches d'immeubles. Il est, dès lors, indispensable
pour procéder à ces annotations, de connaître les
immeubles qui ont fait l'objet d'une formalité depuis le 1er janvier
1956. Sans doute le conservateur peut-il rechercher lui-même
les fiches d'immeubles à annoter, au moyen des énonciations
de la fiche personnelle. Mais, tout d'abord, ces recherches ne lui incombent
pas. De plus, les recherches, dont il s'agit ne sont pas toujours faciles
ni sans danger, spécialement lorsqu'il s'agit de sociétés
ayant pour objet le commerce des immeubles et dont les fiches personnelles
sont revêtues de nombreuses annotations. Le risque d'erreur est
encore aggravé par le fait que, souvent, parmi les sociétés
immobilières, des sociétés différentes ont
des dénominations presque identiques et prêtant à
confusion. Au surplus, si le conservateur doit faire la recherche
lui-même, il lui faut prendre parti sur le point de savoir si l'annotation
doit ou non être faite sur la fiche des immeubles qui ont déjà
sortis du patrimoine de la société (et, de ce fait, soulignés
en rouge sur la fiche personnelle) au moment de la publication du changement
de dénomination. Si, par prudence, il résout la question
par l'affirmative, il risque alors de se trouver amené à
annoter un nombre de fiches élevé (certaines sociétés
qui procèdent à la vente d'immeubles par appartements ont
déjà, sur leurs fiches personnelles, des références
à plus d'une centaine de lots, correspondant à autant de
fiches d'immeubles) et qui ira en croissant avec le temps. Si, au contraire,
il ne mentionne le changement de dénomination que sur les fiches
des immeubles demeurés dans le patrimoine de la société
il prend la responsabilité de cette limitation, laquelle n'est
certainement pas sans danger. Le Conservateur n'aurait pas à prendre
cette responsabilité, qui normalement ne lui incombe pas, s'il
exigeait, comme le texte légal le lui permet, la désignation
des immeubles que concerne l'acte à publier. Dans cette situation, l'attitude à adopter à
l'égard des actes constatant le changement de dénomination
d'une société qui n'indiquent pas les immeubles qu'ils concernent,
est toute de circonstance. Toutes les fois que la désignation des
immeubles apparaît, soit inutile parce qu'il s'agit d'immeubles
ruraux, soit facile à retrouver parce que la fiche personnelle
de la société en cause ne mentionne qu'un seul ou qu'un
nombre restreint d'immeubles urbains, on peut ne pas insister pour que
la désignation figure dans l'acte. Par contre, il est prudent d'exiger
cette désignation lorsque le nombre des immeubles figurant à
la fiche personnelle ou toute autre circonstance ne permettent pas de
déterminer avec certitude les fiches d'immeubles à annoter
du changement de dénomination II. - Références aux formalités antérieures opérées depuis le 1er janvier 1956. - L'absence de la référence aux formalités antérieures accomplies depuis le 1er janvier 1956, ou au moins à l'une d'elles, est-elle une cause de refus de publication de l'acte constatant le changement de dénomination d'une société ? La question comporte une réponse affirmative si
on admet, avec le Président du tribunal civil de Nice. (Ordonnances
des 4 octobre et 1er décembre 1958; J.C.P. 1959-II-11060), que
le Conservateur est fondé à refuser de publier les actes
dont la publication n'est pas prévue par le texte légal.
Faute de référence à une formalité antérieure
opérée depuis le 1er janvier 1956, l'acte n'entre pas, en
effet, avec certitude dans la catégorie des actes assujettis à
publicité par l'art. 28-9° du décret du 4 janvier 1955.
Au contraire, si on décide comme l'a fait le tribunal
de la Seine. (Jugement du 26 novembre 1958, J.C.P. 1959-II-11060), que
les intéressés ont la faculté de soumettre volontairement
à la formalité, les actes dont la publication n'est pas
prévue par les textes, il faut alors considérer que l'acte
constatant le changement de dénomination d'une société
doit être publié, même s'il ne renferme pas la référence
à une formalité antérieure accomplie depuis le 1er
janvier 1956. En l'état, il est prudent de ne pas faire de l'absence
de cette référence une cause de refus, sans s'être
assuré auparavant qu'effectivement aucune formalité de publicité
n'a été accomplie depuis le 1er janvier 1956 au nom de la
société dont la dénomination est modifiée.
Annoter : C.M.L., 2° éd., n° 690 A (feuilles
vertes)
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