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ARTICLE 417

PUBLICITE DES TRANSMISSIONS PAR DECES

Transmissions et constitutions par décès de droits réels immobiliers :
Attestation notariée obligatoire. - Extinctions de droits et transmissions à titre onéreux, résultant d'un décès. - Attestation notariée non prescrite.
Application pratique.

PUBLICATION D'ACTES.

Caractère immobilier des droits faisant l'objet des actes soumis à la formalité.
Pouvoir d'appréciation du Conservateur.

(Rép. Min. Finances, 8 avril 1959).

Question. - M. Deliaune expose à M. le Ministre des Finances et des Affaires Economiques, que le décret du 4 janvier 1955 exige la publication au fichier immobilier des attestations notariées établies en vu de constater la transmission ou la constitution par décès de droits réels immobiliers. Il demande : 1° S'il y a lieu d'établir et de publier une attestation notariée pour constater la réunion de l'usufruit à la nue-propriété ou l'extinction par décès de droits immobiliers tels que droit d'usufruit légal ou conventionnel, droit de retour légal on conventionnel, action résolutoire ou révocatoire, etc. Cette publicité ne risque-t-elle pas d'alourdir inutilement le fichier immobilier et d'encombrer les archives des conservations hypothécaires, sans aucune utilité pratique, puisque le propriétaire de l'immeuble grevé, possède déjà une fiche personnelle : 2° Si la solution est la même dans le cas où la création de droit réel immobilier est antérieure au 1er janvier 1956 et n'a pas été publiée ou a été publiée antérieurement à cette date; 3° Si la solution est la même dans le cas où le droit réel est incessible et soumis à la réalisation d'une condition; 4° Si un droit d'usage et d'habitation portant sur des immeubles, est un droit réel ou personnel et si le Conservateur des hypothèques est lié par la qualification donnée par les parties (question n° 171 du 17 février 1959).

Réponse. - 1°, 2° et 3°. - Il n'y a lieu d'établir et de faire publier une attestation notariée, ni dans le cas où la réunion d'un usufruit à la nue-propriété d'un immeuble s'opère par le décès de l'usufruitier, ni dans le cas d'extinction, par le décès de son titulaire, soit d'un droit de retour conventionnel ou légal, soit d'une action résolutoire ou révocatoire; 4° Le droit d'usage ou d'habitation, sorte d'usufruit restreint, est, comme ce des dernier, un démembrement de la propriété et présente incontestablement le caractère d'un droit réel (Dalloz, Répertoire pratique, V° Usage habitation, n° 3 et 34). Il semble qu'un Conservateur des hypothèques ne soit pas lié par la qualification donnée à un acte par les parties et puisse, si cette qualification est en contradiction manifeste avec les autres clauses de l'acte, rétablir le véritable caractère de la convention, en vue d'apprécier s'il doit ou non opérer la publicité (Journal Officiel du 8 avril 1959, Débats parl., Ass. nat., page 269).

Observations. - I. - Les art. 28-3° et 29 du décret du 4 janvier 1955, ne prescrivent l'établissement d'une attestation notariée qu'en vue de constater la transmission ou la constitution par décès de droits réels immobiliers. Ces dispositions excluent par conséquent le cas où un décès, entraîne l'extinction d'un tel droit.

Il n'y a pas lieu, dès lors, à la publication d'une attestation notariée :

1° En cas de réunion de l'usufruit à la nue-propriété par suite du décès de l'usufruitier. (Rép. Sec. d'Etat au Budget, 7 décembre 1956, Bull. A.M.C., art. 341; v. la réponse ci-dessus; Rappr. art. 35-1 du décret du 14 octobre 1955);

2° En cas d'extinction d'un droit d'usage et d'habitation par suite du décès de son bénéficiaire;

3° En cas d'extinction, par le décès de son titulaire, d'un droit de retour conventionnel ou légal ou d'une action résolutoire ou révocatoire (v. la réponse ci-dessus).

De même, la publication d'une attestation notariée n'est pas obligatoire au cas de réversion de propriété ou d'usufruit consécutive à un décès, lorsque cette réversion n'a pas le caractère juridique d'une transmission par décès.

Il en est ainsi en particulier en cas de réversion opérée, au profit du survivant de deux acquéreurs conjoints, en exécution d'une clause insérée dans l'acte d'acquisition, soit d'un droit de propriété. (Recueil de solutions administratives, § LXX-2), soit d'un droit d'usufruit (v. art. 416 du Bulletin, observations, § I).

Par contre, lorsque la réversion peut être considérée comme une transmission par décès, ou qu'elle modifie la dévolution d'une succession, une attestation peut être exigée, si on applique à la lettre les art. 28 et 29-3° du décret du 4 janvier 1955. Il en est ainsi :

1° En cas de réversion d'usufruit stipulée au profit du survivant de deux vendeurs ou de deux donateurs, et insérée dans un acte de vente ou de donation d'une nue propriété. (Rép. Min. Finances, 8 avril 1959, Bull. A.M.C., art. 416 et les observations, § II);

2° En cas d'usufruit successif résultant d'un testament ou d'une dévolution héréditaire, lors du décès du premier usufruitier survivant avant celui du second (Bull. A.M.C. art. 416 observations § III);

3° En cas d'usufruit conjoint avec clause d'accroissement au profit du survivant constitué par testament, lors du décès du premier mourant des deux légataires conjoints. (Bull. A.M.C., art. 416, observations, § III).

Toutefois, dans ces trois derniers cas de réversion d'usufruit, si la lettre des art. 28-3° et 29 du décret du 4 janvier 1955 permet d'exiger l'établissement dune attestation notariée, l'esprit de ces textes conduit à une solution contraire. C'est pourquoi on a cru devoir conseiller aux collègues de ne pas insister, d'ans les cas dont il s'agit, pour la publication d'une attestation. (V. Bull. A.M.C., art. 416, observations, § IV).

II. - Dans la réponse reproduite ci-dessus, le Ministre des Finances exprime l'avis que les Conservateurs des hypothèques ne sont pas liés par la qualification donnée aux actes par les parties et qu'ils sont fondés, pour refuser de publier un acte, de rétablir le véritable caractère, mobilier ou immobilier, de la convention qui y est contenue.

A supposer qu'un tel droit doive être reconnu aux Conservateurs par les tribunaux, ce qui n'est pas certain, on ne peut que conseiller aux collègues de n'en user qu'avec une extrême prudence et de ne refuser de publier un acte en raison du caractère mobilier du droit qui en fait l'objet, que si ce caractère est absolument indiscutable.

Pour ce qui concerne spécialement le droit d'usage et d'habitation - visé dans la question écrite - les auteurs sont unanimes à lui reconnaître le caractère d'un droit réel immobilier. (Planiol et Ripert, traité élémentaire, t-I, n° 3789; Aubry et Rau, 6° édition: § 237-1° ; Beudant, 2° édition, t-IV, n° 61 et 414).

Annoter : C.M.L. 2° éd., n° 755, 762 A (feuilles vertes) et 837 (antépénultième alinéa)