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ARTICLE 551

PROCEDURE.

Litige entre parties. - Mise en cause du conservateur.
Absence de grief. - Irrecevabilité.

ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS (14° CH.) DU 15 DECEMBRE 1962.

LA COUR,

Statuant sur l'appel régulièrement relevé par Denis, ès-qualité de Conservateur du 5° Bureau des Hypothèques de la Seine, d'une ordonnance du juge des référés du Tribunal de Grande Instance de la Seine, en date du 12 juillet 1962 ;

Considérant que dame de Tollenaere a été, par arrêt de la Cour d'Appel de Chambéry, déclarée débitrice d'une certaine somme d'argent envers Marco et la Société " Les Oisillons " ; que ces derniers ont, en vertu d'une ordonnance rendue par le président du Tribunal de Grande Instance de Bonneville, le 18 janvier 1962, pris au 5° Bureau des Hypothèques de la Seine, une inscription d'hypothèque judiciaire pour sûreté et garantie d'une somme de 45.000 NF en principal et accessoires ;

Considérant que dame de Tollenaere a assigné ses créanciers susnommés et l'appelant pour obtenir du juge des référés la mainlevée et subsidiairement le cantonnement de l'inscription dont s'agit ; que sa demande subsidiaire a été accueillie et que le Conservateur des Hypothèques a été maintenu en la cause ;

Considérant que l'appelant demande sur ce dernier point la réformation de l'ordonnance attaquée, alors que l'intimée conclut à la confirmation de l'ordonnance entreprise, Marco et la Société " Les Oisillons " n'étant plus en cause ;

Considérant que le Conservateur des Hypothèques est chargé par la loi de l'exécution des formalités prescrites pour la publicité foncière ; que les radiations d'hypothèque ne peuvent être effectuées qu'en vertu d'un jugement ou d'une convention portant mainlevée, auxquels il n'a pas été partie ; qu'il ne peut être appelé en cause que dans les cas où, notamment par application des articles 2197, 2202 et 2203 du Code civil, sa responsabilité personnelle est recherchée ;

Considérant qu'en l'espèce, Denis a été assigné impersonnellement; qu'il n'a aucun intérêt personnel dans le litige opposant l'intéressée à ses créanciers ;

Qu'il n'a été saisi avant l'instance d'aucune demande de radiation ; qu'il s'est, devant le premier juge, déclaré prêt à accomplir toutes les formalités hypothécaires dont il serait régulièrement requis et par suite à radier, le cas échéant, l'inscription dont s'agit ;

Considérant qu'il a donc à tort été appelé dans la cause,

PAR CES MOTIFS :

Reçoit Denis, ès-qualité, en son appel et y faisant droit, dit qu'il a été appelé à tort dans la procédure ; prononce sa mise hors de cause ;

Condamne dame de Tollenaere aux dépens de référé de ce chef et de l'appel dont distraction...

Observations. - Devant le juge des référés, notre collègue, appelé à une instance entre parties tendant à obtenir la radiation d'une inscription, sans qu'aucun grief soit formulé contre lui, avait demandé sa mise hors de cause ; mais le juge avait refusé de faire droit à sa demande.

En raison du développement de la pratique, préjudiciable aux Conservateurs, qui consiste à appeler ces derniers à intervenir dans des instances entre parties, en particulier dans des instances en radiation, à seule fin que la condamnation soit prononcée en sa présence, l'A.M.C. a conseillé à notre collègue d'interjeter appel contre le chef de l'ordonnance qui l'avait maintenu en cause.

L'arrêt qui accueille la demande est clairement motivé. Il pose explicitement en principe que le Conservateur des Hypothèques ne peut être appelé en cause que dans les cas où sa responsabilité personnelle est recherchée.

La particularité de l'affaire est que la réformation du chef de la décision du premier juge qui avait maintenu le Conservateur en cause formait l'objet exclusif de la décision de la Cour et non pas un chef accessoire de l'arrêt, sommairement du même implicitement motivé, comme dans les décisions qui ont déjà statue dans le même sens (C. Paris, 5 mars 1948, J.C.P. 4308 ; C. Aix, 13 janvier 1949, J.C.P. 4814 : - C. Riom, 14 janvier 1952, Bull. A.M.C., art. 13 ; - C. Rennes, 24 mars 1958, Bull. A.M.C., art. 353 ; C. Angers, 25 février 1959, Bull. A.M.C., art. 433 ; - C. Poitiers, 24 février 1960, J.C.P. 11741 ; - C. Agen, 11 juillet 1960, J.C.P. 11808 ; - C. Aix. 12 juin 1961, J.C.P. 12482 ; - C. Bordeaux, 29 janvier 1962, Bull. A.M.C., art. 514, J.C.P. 12722 ; - C. Paris, 26 juin 1962 Bull. A.M.C., art. 528) et que cette circonstance particulière confère à l'arrêt rapporté une plus grande autorité.

Annoter : C.M.L. 2° éd., n° 2048.