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ARTICLE 581.

SAISIES.

Concours de saisies.

I. - Seconde saisie pratiquée par un créancier autre que le Crédit Foncier.
Publication irrégulière quel que soit le premier saisissant (même s'il s'agit du Crédit Foncier).

II. - Seconde saisie pratiquée par le Crédit Foncier.
Refus de publier non justifié.

I. - L'article 680 du Code de Procédure civile interdit aux conservateurs des Hypothèques de publier une saisie lorsqu'une précédente saisie portant sur le même immeuble du chef des mêmes débiteurs a déjà été publiée. Bien que ce texte ne prévoie pas explicitement d'exception, les auteurs le considéraient jusqu'à maintenant comme inapplicable lorsque la première saisie avait été pratiquée par le Crédit Foncier de France (Chambaz et Masounabe-Puyanne, 2° éd., n° 790 e ; de France et olive, Traité alphabétique des droits d'enregistrement; 3° éd., n° 406 ; Répertoire alphabétique des droits d'enregistrement, V° Hypothèques, n° 754 ; Etude Périer, Revue hypothécaire, art. 62-78; J.C.P. 1953-IV-1559). La raison en était selon ces auteurs, que les saisies du Crédit Foncier sont régies par des dispositions particulières (décret du 28 février 1852) et qu'il était généralement admis que, de ce fait, il n'était pas possible à un autre créancier de se faire subroger dans les poursuites exercées par le Crédit Foncier.

Or, par un jugement du 21 mars 1963, le tribunal de grande instance de la Seine a ordonné la radiation de la publication d'une saisie pratiquée contre un débiteur à l'encontre duquel le Crédit Foncier avait antérieurement fait publier un commandement. Dans ses motifs, le jugement observe que la seconde saisie aurait dû, en application de l'art. 680 du Code de Procédure civile, « faire l'objet d'un refus de publier suivi éventuellement d'une demande de subrogation dans les poursuites du Crédit Foncier de France ».

Cette décision ayant été rendue à la requête du Crédit Foncier, le Président de l'A.M.C. s'est mis en rapport avec le Secrétaire général de cet Organisme et lui a demandé si le jugement du 21 mars 1963 était motivé par des conséquences particulières à l'affaire dans laquelle il est intervenu ou si, au contraire, le Crédit Foncier, estimait qu'une saisie publiée à sa requête faisait obstacle, d'une manière générale, à la publication postérieure d'une autre saisie.

De la réponse du Crédit Foncier, il ressort qu'une jurisprudence maintenant bien établie admet la subrogation d'autres créanciers dans les poursuites de saisie immobilière engagées par le Crédit Foncier. En pareil cas, la procédure est continuée par le tiers subrogé, dans les formes du droit commun, à partir du dernier acte valable de la procédure spéciale de saisie accompli par le Crédit Foncier, conformément au décret du 28 février 1852.

En l'état, le motif qui avait incité les auteurs à admettre qu'une saisie pouvait être publiée malgré la publication antérieure d'une précédente saisie pratiquée par le Crédit Foncier n'existe plus. Il n'y a plus dès lors de raison de ne pas appliquer strictement, dans ce cas, l'article 680 du Code de Procédure.

On conseille, en conséquence, aux collègues, en cas de précédente publication de saisie, de refuser la publication d'une nouvelle saisie portant sur les mêmes immeubles du chef des mêmes débiteurs, sans distinguer selon que la première saisie a été pratiquée, ou non, par le Crédit Foncier.

II. - Il existe en revanche une dérogation à l'article 680 du Code de procédure civile dans l'hypothèse inverse où c'est la seconde des deux saisies successives qui est pratiquée par le Crédit Foncier.

Elle résulte de l'article 33 du décret-loi du 28 février 1852 modifié par l'article premier du décret du 14 juin 1938 (Journ. Cons., art. 12-200), aux termes duquel le commandement signifié à la requête d'une société de crédit foncier qui est publié au bureau des hypothèques... nonobstant toute publication antérieure ».

En présence de cette disposition formelle, il est sans difficulté que la publication d'une première saisie, qu'elle soit pratiquée par le Crédit Foncier de France ou par un autre créancier, ne peut faire obstacle à la publication ultérieure d'une seconde saisie émanant du Crédit Foncier de France.

Annoter : C.M.L., 2° éd. n° 790 e et 792 ; de France de Tersant et Olive (traité alphabétique des droits d'enregistrement, 3° éd.) n° 406.