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ARTICLE 651

PUBLICATION D'ACTES.
TAXE DE PUBLICITE FONCIERE. - SALAIRES.

I. - Insuffisance présumée du prix ou de l'évaluation contenus dans un acte.
Refus injustifié.

II. - Déclaration estimative irrégulière. - Refus justifié.

PROCEDURE.

Reconnaissance d'une insuffisance de prix ou d'évaluation.
Forme de la procédure

(rép. Min. Fin. et Aff. Econ., 18 novembre 1965 ; B.O.E.D. 9730.)

Question. - M. Collette expose à M. le Ministre des Finances et des Affaires économiques que par acte de début 1965, M. X., en tant que seul liquidateur, a procédé au partage des immeubles sociaux appartenant à la Société civile immobilière Y, à Rennes. Pour le calcul des frais, et notamment pour les salaires de M. le conservateur des hypothèques, M. X. a évalué les biens partagés à une valeur vénale correspondant sensiblement au prix de revient des immeubles, ce qui a été accepté expressément par tous les associés. Lors du dépôt au bureau des hypothèques, le conservateur refuse la formalité en demandant d'estimer les immeubles à leur valeur vénale réelle à la date du partage, qu'il prétend être supérieure au chiffre, porté dans l'acte. Il apparaît au notaire rédacteur de l'acte que les déclarations qui sont faites dans l'acte doivent être admises par l'enregistrement comme par les hypothèques, sous réserve de rehaussement. Dans le cas ci-dessus, il semble que le conservateur ne peut refuser la formalité et qu'il doit, pour arriver à ses fins, demander à l'enregistrement une reconnaissance d'insuffisance. Le conservateur estime qu'aux termes de l'article 250 W de l'annexe III au Code Général des Impôts, la valeur des biens retenue pour la perception des salaires ne peut être inférieure à celle servant de base à la perception des droits d'enregistrement ou, en ce qui concerne les actes non assujettis aux droits proportionnels d'enregistrement, à la valeur vénale réelle des immeubles ou des droits faisant l'objet de la publication. Il en résulte, d'après lui, que les salaires doivent être calculés sur la valeur vénale réelle des biens à la date du partage ou de l'attribution partielle, à l'exclusion de tout autre mode d'évaluation tel que le montant nominal des actions annulées ou le prix de revient de l'immeuble attribué (cf. réponse de ¨M. le Secrétaire d'Etat au Budget à M. Parrot, Journal officiel, Débats A.N., du 29 octobre 1957, p. 4620 ; Code Général des Impôts annote art. 842, note 4, et art. 849, note 18 ; Marietti dictionnaire pratique de la taxe de publicité foncière et des salaires, V° sociétés de construction, 26 b). Le conservateur semble déplacer la question. L'acte établi porte bien une déclaration de la valeur vénale et le notaire est d'accord pour qu'il perçoive sur ce prix ses salaires, mais il se demande quels sont ses droits vis-à-vis du refus et du rehaussement. Il lui demande si, dans le cas qui vient d'être exposé, le conservateur a le droit de refuser la formalité ou si, au contraire, il doit admettre l'acte à la formalité, sauf à lui à faire procéder par l'administration de l'enregistrement à un rehaussement de la valeur vénale. (Question du 25 septembre 1965).

Réponse. - Sous réserve de l'appréciation souveraine de l'autorité judiciaire, il semble que le conservateur des hypothèques ne puisse refuser de publier l'acte de partage considéré pour le seul motif que l'évaluation des biens partagés lui paraît insuffisante, étant observé, toutefois, que l'estimation à fournir expressément par le requérant doit être celle de la valeur vénale réelle au jour de l'acte. Le rehaussement éventuel de l'évaluation est effectué suivant la procédure de redressement unifié prévue à l'article 24 de la loi n° 63-1316 du 27 décembre 1963. (J.O., Déb. parl., Ass. nat., 18 novembre 1965, page 4734.)

Observations. - La taxe de publicité foncière et le salaire auxquels donne ouverture la publication d'un acte sont payables d'avance ; en conséquence, le conservateur est en droit de refuser la publication si la taxe et le salaire exigible ne sont pas versés au moment où la formalité est requise (Code Général des Impôts, art. 847 et 851 ; Précis, Chambaz et Masounabe-Puyanne, 2° éd., n° 1888 et 1943).

Mais il n'en peut être ainsi que si la taxe et le salaire non versés sont immédiatement exigibles. Au cas où le conservateur présume que le prix ou la valeur estimative exprimés dans un acte sont entachés d'insuffisance, l'exigibilité de la taxe et du salaire correspondant à cette insuffisance n'est qu'éventuelle. Elle ne deviendra actuelle que lorsque l'insuffisance aura été reconnue amiablement ou constatée par une décision de justice.

En principe, par conséquent, l'insuffisance présumée du prix ou de la valeur estimative énoncés dans un acte n'autorise pas le conservateur à refuser la publication de cet acte. C'est l'opinion déjà exprimée par le Ministre des Finances et des Affaires économiques dans une précédente réponse à question écrite du 19 juillet 1960 ; Journal Off., Débats parl. Ass. nat., p. 1991 ; (Recueil des solutions en matière de publicité foncière, § XCVIII-IV b, p. 315).

Cette règle suppose toutefois que la base de calcul de la taxe et du salaire contenus dans l'acte est apparemment régulière.

Dans l'espèce qui fait l'objet de la question écrite, la perception devait, ainsi que le rappelle explicitement la réponse du Ministre, être basée sur la valeur réelle de l'immeuble en cause au jour de l'acte. Or, il ressort nettement des termes de la question que l'évaluation avait été établie sur la base du prix de revient de l'immeuble partagé. Si les termes de la déclaration estimative permettaient de savoir que celle-ci avait pour objet le prix de revient et non la valeur réelle actuelle, cette déclaration était irrégulière et son irrégularité qui équivalait à l'absence de déclaration, autorisait le conservateur à refuser la publication (Rapp. C.G.I., art. 845).

Si, au contraire, la déclaration estimative était apparemment régulière, la seule possibilité laissée au conservateur consistait à faire reconnaître l'insuffisance.

D'après la réponse ministérielle, la reconnaissance de l'insuffisance devrait être poursuivie suivant la procédure de redressement unifiée prévu par l'article 24 de la loi n° 63-1316 du 27 décembre 1963 (B.O.E.D. 1964-9050).

Si l'acte donnait ouverture à la taxe, de publicité foncière, la procédure dont il s'agit serait certainement applicable à la poursuite du rehaussement de l'évaluation souscrite pour la perception de cette taxe. Le rehaussement éventuellement obtenu entraînerait alors ipso facto celui de la base de la perception du salaire qui est assis sur la même somme.

Mais la même procédure pourrait-elle être employée au cas, qui paraît être celui de l'espèce en cause, où la publication serait exonérée de la taxe et où le salaire serait seul exigible ? La Direction Générale a répondu à cette question par l'affirmative et a même exprimé l'avis que cette procédure ne pourrait être mise en action que par l'agent de contrôle, le conservateur n'ayant plus la possibilité de poursuivre lui-même le redressement de l'évaluation présumée insuffisante (note du 30 décembre 1965, B.O.D.G.I., numéro spécial sur la réforme du contentieux, p. 61, n° 65, B.O.E.D. 9730).

Cette opinion ne saurait être acceptée sans réserves. Malgré la formule très compréhensive de l'article 24 précité, il est extrêmement douteux que le champ d'application de cette disposition puisse être étendu à la matière des salaires des conservateurs qui forment la créance personnelle de ces derniers.

Annoter : C.M.L. 2° éd., n° 1880-4°, 1888, 1943 et 1952.

Voir AMC n°1270.