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ARTICLE 681

TAXE DE PUBLICITE FONCIERE.

Inscriptions. - Inscription définitive d'hypothèque judiciaire faisant suite à une inscription provisoire. - Exonération de la taxe proportionnelle subordonnée à la condition que l'inscription définitive soit de nature à se substituer rétroactivement à l'inscription provisoire.
Conséquence.

Aux termes dur 4° alinéa de l'article 54 du Code de Procédure civile (Bull. A.M.C., art. 282), lorsqu'un créancier a été autorisé par le Président du tribunal de grande instance, ou par le juge d'instance, à prendre une inscription provisoire d'hypothèque judiciaire. préalablement à l'introduction d'une action en justice tendant à la reconnaissance de sa créance, il doit, lorsque la décision sur le fond est intervenue, requérir une inscription définitive qui, sous certaines conditions, se substitue rétroactivement à l'inscription provisoire.

Par application de l'article 840, § I, 2° alinéa du Code général des Impôts, la taxe de publicité foncière exigible sur l'inscription définitive est la taxe fixe de 5 F. (dans la mesure où la créance garantie par cette inscription n'est pas d'un montant plus élevé que celle conservée par l'inscription provisoire).

Par une décision du 3 mai 1966, la Direction générale (Sous-Direction IV AD, Bureau IV, D2 D3) a limité l'application de la taxe fixe au cas où l'inscription définitive remplit effectivement les conditions exigées pour qu'elle se substitue rétroactivement à l'inscription provisoire.

Il en résulte que, contrairement à l'avis que nous avons exprimé dans les articles 588 et 613 du Bulletin, c'est la taxe proportionnelle de 0,60 p. 100 qui est exigible :

1° lorsque l'inscription provisoire est nulle parce que la demande en justice n'a pas été introduite dans le délai fixé par l'ordonnance qui a autorisé l'inscription ;

2° lorsque l'inscription définitive n'a pas été requise dans les deux mois au jour où la décision de justice statuant sur le fond est passée en force de chose jugée,

Les conservateurs ne peuvent que s'incliner devant l'interprétation de la Direction générale.

Mais l'application de la règle de perception en cause risque de soulever de sérieuses difficultés.

Sans doute, dans l'espèce soumise à la Direction générale, le conservateur était-il en mesure de constater, au vu du bordereau, que l'inscription requise ne pouvait se substituer rétroactivement à l'inscription provisoire. Le titre de la créance garantie par l'inscription consistait en effet en un arrêt de Cour d'appel contradictoire qui, n'étant susceptible ni d'opposition ni d'appel, était passé en force de chose jugée dès son prononcé (Bull. A.M.C., art. 613) et dont la date, énoncée obligatoirement au bordereau, était antérieure de plus de deux mois à l'inscription.

Mais la situation est différente lorsque, comme c'est le plus souvent le cas, il s'agit d'une inscription requise en vertu d'un jugement de première instance ou d'un arrêt d'appel rendu par défaut. La décision ne passe alors en force de chose jugée que lorsque le délai d'appel ou d'opposition est expiré et ce délai ne prend cours qu'à la date de la signification du jugement ou de l'arrêt. C'est de cette date, qui n'a pas à être énoncée dans le bordereau et qui ne l'est pas en fait, que le conservateur doit se faire justifier pour pouvoir apprécier si l'inscription requise comme inscription définitive peut ou non se substituer rétroactivement à l'inscription provisoire.

De même, pour savoir si l'inscription provisoire à laquelle doit se substituer l'inscription définitive n'est pas nulle, faute par le créancier d'avoir introduit sa demande en justice dans le délai imparti par l'ordonnance, il lui faut obtenir la justification de l'importance du délai par la production de l'ordonnance, celle du point de départ de ce délai qui court généralement de la signification de l'ordonnance par la production de l'exploit de signification et enfin celle de la date de la demande en justice par la présentation de l'exploit introductif d'instance.

Lorsqu'une inscription définitive sera requise sans que les pièces justificatives nécessaires accompagnent le bordereau, quelle devra être alors l'attitude du conservateur ? Devra-t-il refuser l'inscription ?

A ne considérer la question que du point de vue fiscal, la réponse devrait être affirmative. Mais, le refus de l'inscription définitive peut avoir des conséquences graves sur le plan civil. Il peut en effet empêcher la formalité requise en temps utile d'être réellement effectuée dans le délai prescrit et par suite lui faire perdre le bénéfice du rang que doit lui procurer sa substitution à l'inscription provisoire.

Sans doute, pour défendre à l'action en responsabilité qui serait éventuellement engagée contre lui de ce chef, le conservateur pourrait-il faire valoir que le responsable du retard est le requérant qui n'a pas justifié en temps utile que l'inscription satisfaisait aux conditions exigées pour être exonérée de la taxe proportionnelle.

Mais le bien-fondé, de cet argument suppose que la règle de perception contenue dans la décision précitée du 3 mai 1966 est indiscutable. Si elle venait à être contestée et que le tribunal reconnaisse que l'exonération est applicable aux inscriptions d'hypothèque judiciaire qui font suite à une inscription provisoire déjà assujettie à la taxe, même si elles ne peuvent pas se substituer rétroactivement à cette dernière inscription, le refus qu'aurait opposé le conservateur deviendrait indéfendable.

Nous estimons dès lors que les conservateurs agiraient prudemment en ne refusant pas les inscriptions définitives d'hypothèque judiciaire qui leur seraient présentées sans qu'il soit justifié qu'elles sont de nature à se substituer rétroactivement à l'inscription provisoire à laquelle elles font suite, sauf à w faire produire. ultérieurement les pièces justificatives nécessaires et à poursuivre éventuellement le recouvrement de la taxe exigible.

Annoter : C.M.L., 2° éd., n° 1895-I et 1 895-A (feuilles vertes).