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ARTICLE 955

RADIATIONS.

Mainlevée judiciaire. - Règlement judiciaire.
Inscription de masse.
Mainlevée consentie par le créanciers dans le concordat. - Régularité.

Sous le régime antérieur à la loi n° 67-563 du 13 juillet 1967, sur le règlement judiciaire et la liquidation des biens (J.O. du 14 ; J.C.P. 1967 - III 33238 ; Bull. A.M.C., art. 703), il était admis sans difficulté que les créanciers qui accordaient un concordat à leur débiteur pouvaient statuer en même temps sur le sort de l'inscription de masse prise sur les immeubles de ce dernier, soit en consentant immédiatement la mainlevée dans le concordat lui-même, soit en donnant au commissaire à l'exécution du concordat le pouvoir de consentir cette mainlevée (Bull. A.M.C., art. 402, p. 5 ; Jacquet et Vétillard, V° Faillite et liquidation judiciaire, n° 35 ; Précis Masounabe-Puyanne, 2° éd., n° 1050-II, 1°).

La question a été posée de savoir si, sous l'empire de la loi précitée du 13 juillet 1967, les créanciers possèdent encore le pouvoir de consentir directement dans le concordat la mainlevée de l'inscription de masse ou si la seule possibilité qui leur est laissée consiste à habiliter le commissaire à l'exécution du concordat à donner cette mainlevée.

Elle est motivée par les termes du deuxième alinéa de l'art. 74 de la nouvelle loi qui est ainsi conçu :

" S'il n'en a pas été décidé autrement par le concordat, l'homologation conserve à chacun des créanciers, sur les immeubles du débiteur, le rang de l'hypothèque inscrite en vertu de l'art. 17. Dans ce cas, le syndic est tenu de requérir, en vertu du jugement d'homologation, une nouvelle inscription sur les mêmes immeubles. Toutefois, le syndic pourra être dispensé par le concordat de la prise de la nouvelle inscription, mais seulement dans le cas où le ou les commissaires à l'exécution du concordait, prévus, à l'art. 73, seraient habilités par le concordat à donner mainlevée de l'inscription prise en conformité de l'art. 17 de la présente loi "

De ce que cette disposition ne vise, au sujet de la mainlevée de l'inscription de masse, que l'hypothèse ou le o· les commissaires à l'exécution du concordat ont reçu le pouvoir de la consentir, faut-il déduire que c'est là désormais le seul moyen de parvenir à la radiation ?

Cette question comporte, à notre avis, une réponse négative.

Lorsque, comme c'est le plus souvent le cas, le concordat stipule que les immeubles du débiteur seront vendus au profit de la masse des créanciers, ceux-ci entendent généralement subordonner la mainlevée de l'inscription de masse au payement du prix par l'acquéreur. A cet effet, ils donnent au ou aux commissaires à l'exécution du concordat le mandat de consentir la mainlevée lorsqu'ils auront encaissé le prix.

Mais il arrive encore assez fréquemment que rien n'est prévu à ce sujet dans le concordat ; la radiation de l'inscription de masse ne peut alors être effectuée, au moins dans la rigueur des principes, que sur le consentement de tous les créanciers ou en vertu d'une décision de justice à eux opposable (Bull. A.M.C., art. 402, p. 6 ; Jacquet et Vétillard, V° Faillite et liquidation judiciaire, n° 34 ; Précis Masounabe-Puyanne, 2° éd., n° 1050-11-2°). Il en résulte de sérieuses difficultés pour parvenir à cette radiation (v. Bull. A.M.C., art. 691).

La partie finale de l'art. 74 susvisé vise à prévenir cette lacune du concordat en incitant les créanciers à habiliter le ou les commissaires à l'exécution du concordat à consentir la mainlevée.

Mais rien dans cette disposition ne s'oppose à ce que, s'ils le jugent bon, les créanciers donnent eux-mêmes la mainlevée dans le concordat sans attendre la vente des immeubles.

Si le texte susvisé n'envisage pas cette hypothèse, c'est tout simplement parce que l'inscription concordataire qu'il réglemente, étant destinée, à conserver les effets de l'inscription de masse, n'a d'objet que si les créanciers n'ont pas d'ores et déjà renoncé à cette dernière inscription en vertu d'une mainlevée contenue dans le concordat.

Il est d'ailleurs à remarquer qu'en conférant aux commissaires à l'exécution du concordat le pouvoir de donner mainlevée de l'inscription de masse, les créanciers renoncent au bénéfice de cette inscription et il n'y a pas de motif pour que cette renonciation, qui leur est ainsi permise par l'intermédiaire d'un mandataire, leur soit interdite lorsqu'elle est consentie directement.

Un Conservateur ne saurait dès lors, à notre avis, refuser de procéder à la radiation d'une inscription de masse en vertu de la mainlevée, qui en est consentie directement par les créanciers dans le concordat.

Annoter : C.M.L., 2° éd., n° 100l - II - 1° ; Jacquet et Vétillard, V° Faillite et liquidation judiciaire, n° 35.