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ARTICLE 1398

RADIATIONS.

Mainlevée administrative.
Inscription garantissant le recouvrement de sommes dues à un département.
Mainlevée consentie dans un arrêté signé par délégation du président du Conseil général.
Vérification de la capacité et de la qualité du signataire.

Dans un arrêté signé pour un président de Conseil général par le Directeur général des services départementaux, il a été donné mainlevée partielle de l'hypothèque légale prise sur des immeubles appartenant à un bénéficiaire de l'aide sociale " pour sûreté et recouvrement des prestations servies au titre de cette aide ". Dans le corps même de l'arrêté, cette réduction de gage est justifiée par le fait que la parcelle dégrevée a été vendue et que la totalité du prix obtenue a été versée au payeur départemental en remboursement partiel de la créance garantie ; il y a, d'autre part, été fait référence à une délibération " par laquelle le Conseil général a délégué ses pouvoirs en matière de mainlevée d'hypothèques ".

Par cette délibération le Conseil général, après avoir délégué à son bureau ses pouvoirs en matière de mainlevée d'hypothèque, a donné la possibilité à l'organe collégial ainsi investi " de confier cette délégation à son Président ou à quelqu'un de son choix si le besoin s'en faisait sentir ". En plus de cette délibération, il a été produit copie d'un arrêté du Président du Conseil général accordant au Directeur général des services départementaux, nommément assigné, une délégation de signature très étendue, puisque seuls en sont exclus les rapports au Conseil général et au bureau ainsi que les arrêtés comportant des dispositions réglementaires de portée générale.

Interrogée par le conservateur requis de radier sur la capacité et la qualité de l'auteur de cette mainlevée administrative, la commission juridique a émis l'avis rapporté ci-après :

La mainlevée d'hypothèque n'exige pas la même capacité selon qu'elle intervient ou non après paiement : la mainlevée sans paiement implique de pouvoir disposer d'un droit réel immobilier tandis que la mainlevée consécutive au paiement est un simple acte d'administration ; au cas du paiement, il faut assimiler toutes les situations dans lesquelles l'inscription a perdu son objet par suite de l'annulation de la créance, de sa remise ou pour tout autre motif.

Or, s'il ressort des dispositions des articles 25 et 31 de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982, relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions que " le président du Conseil général est l'organe exécutif du département " et " qu'il est seul chargé de l'administration ", l'article 46- 1° de la loi du 10 août 1871, relative aux Conseils généraux continue à attribuer au seul Conseil général le pouvoir de statuer sur l'aliénation des propriétés départementales mobilières ou immobilières. Toutefois, ainsi qu'il est prévu aux articles 45 et 46 modifiés (1) de la loi du 2 mars 1982, les délibérations de cette assemblée ou les décisions prises par délégation du Conseil général ne sont exécutoires qu'à condition qu'il ait été procédé à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département, lequel dispose d'un délai de deux mois pour les déférer au tribunal administratif s'il les estime contraires à la légalité ; pour les actes du président du Conseil général, cette procédure est limitée à l'exercice des pouvoirs de police afférents à la gestion domaniale, aux décisions à caractère réglementaire ainsi qu'à certaines décisions individuelles prises à l'égard des fonctionnaires du département.

(1) Dans leur rédaction issue de l'article 5 de la loi no 82-623 du 22 juillet 1982.

Il paraît donc possible d'admettre que le président du Conseil général tient de ses fonctions le pouvoir de renoncer à une inscription qui, prise pour garantir le recouvrement d'une créance départementale, a perdu son objet. Au contraire, la mainlevée sans paiement ne peut résulter que d'une délibération spéciale du Conseil général ; la radiation doit, en outre, être subordonnée à la justification par le requérant de l'absence de recours du préfet.

D'autre part, à l'exception des compétences budgétaires, lesquelles sont étrangères aux actes de disposition de droits réels immobiliers, le Conseil général peut déléguer une partie de ses attributions à son bureau (L. du 2 mars 1982, art. 24) ; s'il est fait usage de cette possibilité, le bureau doit exercer lui-même les pouvoirs ainsi transmis ; il n'est, en effet, autorisé par aucune disposition législative ou réglementaire à les subdéléguer. Quant au président, il est habilité à déléguer par arrêté l'exercice d'une partie de ses fonctions aux vice-présidents et, en l'absence ou en cas d'empêchement de ces derniers, à d'autres membres du Conseil général (L. du 2 mars 1982, art. 31) ; il dispose également en tant que chef des services du département de la faculté de donner délégation de signature en toute matière aux responsables desdits services (ibid., art. 25).

L'application de ces principes à l'espèce a conduit tout d'abord à remarquer que la parcelle dégrevée a été vendue, que son prix a été porté en recette par le payeur départemental, que ni ce comptable, ni aucune autre autorité départementale n'a manifesté son intention de demander la mise aux enchères et qu'ainsi, dans la mesure précisément où il a été consenti à sa radiation partielle; l'inscription en cause avait épuisé ses effets.

Il en a été déduit que la mainlevée administrative dont il s'agit constitue un acte d'administration entrant, dès lors, dans les attributions du président du Conseil général lequel, en la circonstance, a pu valablement être représenté par le directeur général des services départementaux dès lors que ce dernier était titulaire d'une délégation personnelle de signature donnée par arrêté et qu'il en était justifié.

Aussi a-t-il été estimé que le conservateur, auquel il incombe de vérifier la compétence de l'auteur de la mainlevée mais non de rechercher s'il a été fait un usage régulier des pouvoirs ainsi conférés, ne pouvait que conclure à l'efficacité de l'acte en vertu duquel il lui avait été demandé de radier.

Voir AMC n° 1509.