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ARTICLE 1418

REDRESSEMENTS ET LIQUIDATIONS JUDICIAIRES.

Conditions d'application des dispositions de l'article 57 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985.

S'agissant de la première difficulté signalée en la matière, il a paru utile de reproduire in extenso la réponse récemment adressée à l'un de nos collègues.

Par une lettre du 2 septembre 1988, Me M..., avocat au barreau de S..., vous a demandé de "veiller à ce qu'aucune publication ne puisse intervenir relative aux biens immobiliers dépendant du patrimoine de Mme R..., notamment un jugement d'adjudication, rendu par le Tribunal de Grande Instance de S... le 17 juin 1988, d'un immeuble situé à A..., l'adjudicataire étant M. P...". A l'appui de sa demande, votre correspondant a fait valoir que par un jugement du 1er juillet 1988, le tribunal de commerce de M... a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de Mme R... et qu'en application des dispositions de l'article 57 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, les actes et décisions judiciaires translatifs ou constitutifs de droits réels ne peuvent plus être inscrits postérieurement à un tel jugement ; mais vous avez estimé devoir passer outre à cette mise en garde : le jugement d'adjudication vous ayant été présenté le 6 septembre, vous n'avez aperçu aucun motif de refus ou de rejet et, en conséquence, vous l'avez formalisé.

En revanche, Me M... vous ayant le 12 septembre requis de publier le Jugement d'ouverture de la procédure de redressement, vous avez refusé le dépôt de cet acte pour les raisons littéralement rapportées ci-après : "la décision judiciaire dont la publication est demandée ne contient pas les indications visées par les articles 5 et 7 du décret du 4 janvier 1955, et 32 du 14 octobre 1955 (notamment, identification des immeubles concernés, titre du dernier disposant, etc.)". Le 21 septembre, vous avez pris le parti contraire à l'égard d'une assignation délivrée le 16 du même mois par les époux R... à M. P... ; ce dernier, pris en sa qualité d'adjudicataire de l'immeuble désigné ci-avant, a par cet acte d'huissier été cité devant le tribunal de grande instance de la situation du bien en vue notamment "d'ordonner la radiation du fichier immobilier de la conservation des hypothèques de S... de la publication opérée à la demande de M. P... du jugement d'adjudication rendu par le Tribunal de Grande Instance de S... le 17 juin 1988, publié à la conservation des hypothèques de S... le 6 septembre 1988, volume ... n° ... et concernant l'immeuble d'habitation de Mme R. et M. R... dont la désignation suit...".

Bien que vous n'ayez pas en l'état été appelé à l'instance ainsi introduite, vous souhaitez avoir l'avis de la commission juridique sur la conduite à tenir lorsque le jugement à intervenir aura été rendu.

Tout d'abord, je tiens à vous faire connaître que cette commission a pleinement approuvé les motifs invoqués au soutien de la décision en date du 12 septembre dernier portant refus du dépôt du jugement d'ouverture de la procédure de redressement. De même et quoique l'assignation du 16 septembre ne soit pas, compte tenu de son objet, au nombre des demandes en justice énumérées au 4° c) de l'article 28 du décret du 4 janvier 1955, il a été reconnu que l'application du principe de légalité énoncé à l'article 2199 C. Civ. excluait toute mesure de refus ou de rejet.

Quant à la publication du jugement d'adjudication du 17 juin 1988, elle ne pouvait qu'être effectuée dès lors qu'elle avait été requise et que toutes les conditions de forme exigées par les dispositions législatives et réglementaires sur la publicité foncière étaient réunies. Cette publication, en particulier, n'était pas susceptible d'être empêchée par la défense faite à l'article 57 de la loi du 25 janvier 1985, lequel n'ayant institué aucune cause nouvelle de refus ou de rejet ne permet pas de s'abstenir d'exécuter la formalité mais a seulement pour but de priver la publication effectuée des effets juridiques qui lui sont normalement attachés. Aussi appartient-il à l'autorité judiciaire et non au conservateur de constater cette déchéance et d'en tirer telles conséquences qu'il appartiendra.

Si donc la radiation de la publication vient à être ordonnée par un jugement, vous devrez, s'il vous est demandé de le faire, assurer l'exécution de cette décision de justice pour autant, ainsi qu'il est prévu à l'article 506 N.C.P.C., qu'il aura été justifié de son caractère exécutoire. Cette exécution cependant ne pourra pas être accomplie au moyen d'une mention en marge ; ce mode de publicité, en effet, fait figure d'exception et il ne peut, dès lors, être utilisé qu'à condition d'être autorisé par un texte spécial. Il y aura lieu, par suite, de se conformer aux règles de droit commun, c'est-à-dire de suivre les formes prévues pour la publicité des droits sur les immeubles autres que les privilèges et les hypothèques ; notamment, la publication "radiée" sera soulignée en rouge (D. 14 octobre 1955, art. 14) mais elle continuera à être délivrée dans les états en même temps que sa suppression (ibid. art. 43, 1er alinéa).

Annoter : Bull. A.M.C., art. 1347.