ARTICLE 1544 PROCEDURE. Rejet de la formalité. Arrêt de la Cour d'appel de Chambéry du 17 juin 1991 Faits: Me S..., notaire, a, le 5 avril 1990, reçu un acte portant mainlevée totale d'une inscription d'hypothèque prise au bureau de Bonneville le 3 juin 1965 au profit d'un établissement de crédit. Cet acte qui ne contient pas le consentement formel du créancier à la radiation n'a pas non plus été assorti d'une réquisition de radier. Sa publication ayant été demandée, il a été inscrit au registre des dépôts le 12 juin 1990 mais le conservateur s'est abstenu de mentionner la mainlevée en marge de l'inscription déjà citée. En effet, notre collègue a, le 21 août 1990, notifié la cause de rejet suivante : « Absence d'éléments permettant d'apprécier la validité du consentement à mainlevée. Il revient, en effet, au conservateur, avant de procéder à la publication d'un acte de mainlevée, de s'assurer que les énonciations de l'acte sont suffisantes pour justifier la validité du consentement des parties (Cass. civ. 3e, 16 juillet 1975 D 1975, 593). Or tel n'est pas le cas en l'espèce, à défaut de présentation des justifications de la capacité des parties (mandants, créanciers, comparants) à consentir la mainlevée en cause » Me S..., loin de déférer à cette demande dans le délai légal d'un mois qui lui avait été imparti, fit le 29 août 1990 assigner son auteur devant le président du tribunal de grande instance de Bonneville afin que soit ordonnée la publication de la mainlevée à la date du 12 juin 1990. Une ordonnance rendue le 13 décembre 1990 déclara cette action recevable mais la rejeta au fond si bien que M S... se pourvut devant la Cour de Chambéry. Dans sa défense en appel, le Conservateur, comme il l'avait fait en première instance, a conclu à titre principal à l'irrecevabilité du recours en soutenant que seul le rejet constitue une décision susceptible d'être déférée à l'autorité judiciaire par application de l'article 26 du décret du 4 janvier 1955. Il fut fait droit à cette fin de non recevoir par les motifs rapportés ci-après: « Sur la recevabilité : « Attendu en droit qu'aux termes de l'article 26
du décret du 4 janvier 1955, « en cas de rejet d'une formalité
de publicité par application des dispositions des articles 2148,
2149 et 2154 du code civil, le recours de la partie intéressée
contre la décision du conservateur des hypothèques est porté,
dans les 8 jours de la notification de cette décision, devant le
président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel
sont situés les immeubles » ; qu'un tel recours ne peut être
admis que contre la décision de rejet ; « Attendu en l'espèce que Me S... a exercé
un recours contre la notification de la cause empêchant en l'état
la publication de l'acte sollicité, à savoir la mainlevée
totale de l'inscription hypothécaire volume 57 C F n° 62 du
3 juin 1965, un délai d'un mois lui ayant été accordé
pour régulariser le document avant que ne soit prononcée
la décision de rejet (notification du 211 août 1990) ; « Que Monsieur le Conservateur des hypothèques
de Bonneville, par cette notification de cause de rejet, n'avait pas encore
pris de décision en ce qui concerne l'admission ou le rejet de
la formalité sollicitée, une telle décision dépendant
de la régularisation ou non des documents par Me S... ; « Que Me S... était donc irrecevable à
exercer un recours contre cette notification ». Observations : Dans l'ordonnance du 13 décembre
1990, rendue comme en matière de référé, le
président du tribunal de grande instance de Bonneville, pour admettre
la recevabilité de l'action engagée par Me S... considère
que « le conservateur ne saurait valablement prétendre qu'une
notification de cause de rejet n'est pas susceptible de recours ».
Il a, pour justifier cette affirmation, exposé d'une part que «
les textes ne prévoient pas une telle distinction entre une cause
de rejet et un rejet » et, d'autre part, que « le droit de
régularisation laissé au déposant n'est qu'une faculté
qu'il est libre de ne pas utiliser en exerçant immédiatement
son recours ». Mais de toute évidence, il n'y avait pas lieu,
pour le premier juge, de se livrer à une telle démonstration.
En effet, l'article 26 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955
qui ajoute une attribution supplémentaire aux « pouvoirs
du président », tels que ceux-ci sont fixés par les
articles 808 à 813 du nouveau code de procédure civile,
habilite ce magistrat à censurer « la décision du
conservateur des hypothèques » « en cas de rejet d'une
formalité de publicité » ; ces dispositions ont un
sens clair et complet et dès lors, elles ne doivent pas être
interprétées, mais appliquées exactement à
la situation qu'elles envisagent. Elles sont d'ailleurs dans le droit
fil de la distinction opérée par le Conseil d'Etat statuant
au contentieux entre les décisions administratives de nature à
faire grief, seules susceptibles d'être l'objet d'un recours en
annulation, et les mesures préparatoires ou d'instruction, lesquelles
sans, bien entendu, être discrétionnaires, échappent
à tout contrôle juridictionnel immédiat. |