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ARTICLE 1761

PUBLICATIONS D’ACTES

Substitution aux actes et décisions à publier d’extraits analytiques

établis par les officiers publics ou ministériels

Procédure contraire aux dispositions des articles 3 et 34 du décret du 4 janvier 1955

et 67-3 du décret du 14 octobre 1955

Refus justifié

Question : Un de nos collègues a notifié une cause de rejet en s’appuyant sur l’article 1546 du Bulletin. Dans cet article, l’AMC s’est prononcée sur la nécessité de la publication d’une convention de modification de régime matrimonial et du jugement l’ayant homologuée préalablement au dépôt d’une attestation constatant l’entrée dans la nouvelle communauté d’immeubles antérieurement propres aux époux. Le notaire a contesté cette position en soutenant que le conservateur disposant grâce à l’attestation de l’ensemble des éléments indispensables à l’annotation du fichier immobilier, il n’avait pas à formuler d’autres exigences.

Convient-il de maintenir la position de l’AMC ?

Réponse : Réponse affirmative.

Cette position, en effet, est conforme à la lettre et à l’esprit de dispositions législatives et réglementaires régissant la publicité foncière. Il s’agit de celles combinées de l’article 2196 du code civil, du 1 de l’article 34 du décret 55-22 du 4 janvier 1955 et de l’article 67-3 du décret n° 55-1350 du 14 octobre 1955. Ces dispositions ont pour objet de permettre " à tous ceux qui le requièrent " d’obtenir dans les bureaux des hypothèques - soit la copie intégrale des actes ou décisions judiciaires ayant créé, constaté, transféré, consolidé ou modifié des droits sur les immeubles autres que les privilèges et les hypothèques, - soit des extraits littéraux desdits actes et décisions lorsqu’ils ou elles doivent ou peuvent être divisés.

Or ainsi qu’il ressort des dispositions de l’article 3 du décret du 4 janvier 1955 qui énonce la règle dite de l’effet relatif, ces actes et ces jugements sont les titres des droits publiés et donc les écrits-mêmes dans lesquels les juges et les contractants ont exprimé leurs volontés. Les attestations notariées dont la publicité est prescrite au 3° de l’article 28 du même décret sont exclusivement celles établies " en vue de constater la transmission ou la constitution par décès de droits réels immobiliers ".

Ces attestations se bornent à constater la dévolution résultant du décès alors que les titres, soit suscitent des situations juridiques nouvelles, soit, tout au moins, confirment des conventions ou jugements déjà publiés avec lesquelles il faut pouvoir les rapprocher. Aussi, aux 1 et 2 de l’article 32 du décret du 14 octobre 1955, les attestations de transmission par décès sont-elles distinguées des actes et décisions judiciaires qui, eux et elles, sont des titres.

C’est pourquoi le libre accès de tous aux titres afférents à la propriété immobilière fait figure de principe fondamental du droit français où, avant comme depuis la réforme de 1955, " la publicité a toujours pour fonction de compléter, à l’égard des tiers, la règle de la relativité des contrats sans pouvoir couvrir le défaut de droit " ( R.A. Enregistrement V° Hypothèques Livre III n° I, édit. 1er janvier 1958 ).

En effet, en conséquence de cette publicité et en vertu des dispositions de l’article 30 du décret du 4 janvier 1955, les volontés des contractants et des juges deviennent opposables à ceux qui, ayant acquis du même auteur des droits concurrents sur le même immeuble, ne les ont pas fait publier avant. Corrélativement, les personnes évincées pour ce motif doivent être mises en mesure d’apprécier aisément la valeur du titre qui est préféré au leur. A cette fin, il est indispensable qu’elles-mêmes et leurs ayants-droit en particulier, n’en soient pas réduits à l’analyse du titre faite par les conservateurs sur les fiches en exécution du second alinéa de l’article 1er du décret du 4 janvier 1955.

Il faut également qu’elles puissent, si elles le souhaitent, acquérir les photocopies des écrits en formant les instruments complets. Par suite, chargés de veiller à la formation régulière des registres publics placés sous leur garde, nos collègues ne peuvent que s’opposer à l’entrée dans ces registres d’extraits analytiques qui, établis par les notaires, feraient écran à la transparence complète voulue par les dispositions législatives et réglementaires en vigueur. Ce faisant, ces fonctionnaires ne s’érigent pas en juges de la validité ou de l’efficacité des documents à publier; Ils constatent simplement que ces documents ne sont ni des copies, ni des extraits littéraux des actes ou décisions judiciaires qui y sont résumés.

Cela suffit à justifier le refus du dépôt en invoquant les dispositions impératives des articles 34, par.1 du décret du 4 janvier 1955 et 67-3 du décret du 14 octobre 1955.