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Art. 1859

SAISIES

 

 

Commandement de saisie non daté
Acte faisant l'objet d'une signification dans un autre Etat de l'Union européenne
Circonstance indifférente - Refus de dépôt justifié

Question : Un avocat a requis la publication d'un commandement de saisie non revêtu de sa date, auquel était joint un procès-verbal de transmission de la demande de signification dans un autre Etat membre de l'Union européenne, conformément au droit européen et en particulier à la réglementation relative à la signification et à la notification dans les Etats membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matières civile et commerciale.
En effet, ce commandement dirigé contre un citoyen anglais, domicilié en Italie, devait être signifié à la demande de l'huissier français qui l'avait établi, par un organisme en résidence à Rome.
L'absence de date du commandement constitue-t-elle une cause de refus de publier et dans l'affirmative, compte tenu des circonstances particulières évoquées ci-dessus au regard de la procédure, le refus demeure-t-il justifié ?

Réponse : Réponse affirmative
1- Le commandement en cause est établi en France par un officier ministériel français afin de saisir un bien immobilier situé en France. Il se trouve soumis à la législation française en ce qui concerne tant les règles de son établissement que les règles de la procédure de saisie. Il en va de même en matière de publicité foncière, notamment quant au rôle et à la responsabilité du conservateur.
Aux termes de l'article 648 du nouveau code de procédure civile (NCPC) visant la forme des actes d'huissier " Tout acte d'huissier de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs :
1- sa date ; …"
Aux termes de l'article 673 du code de procédure civile ( ancien ) " Pour parvenir à la vente sur saisie d'un immeuble, le créancier fait signifier un commandement à la personne ou au domicile du débiteur ".
Enfin, l'article 674 du même code stipule notamment que " le commandement vaut saisie des biens qui ont été désignés à partir de sa publication au bureau des hypothèques de la situation des biens. "
La combinaison de ces dispositions conduit à penser que le conservateur ne peut, sans engager sa responsabilité, accepter de publier un acte dans lequel serait omis un renseignement aussi important que la date de cet acte. En effet, bien que non juge de la validité ni de l'efficacité des actes (Etant observé que la mention de la date est une formalité substantielle exigée à peine de nullité -Cass. Civ. 2ème, 8 oct.1970, qu'une date illisible équivaut à une absence de date - CA. Paris 24 oct. 1979. Il en est de même d'une date raturée sans approbation de la rature - Cass. Civ. 20 juin 1968 ou s'il y a divergence de date entre l'original et la copie - Cass. Civ. 9 nov. 1921, il est tenu de veiller à ce que les tiers soient informés des éléments essentiels pour la conduite de la procédure. Or, la date du commandement (qui est celle de sa signification) est expressément visée par l'article 674 CPC (ancien) précité . C'est ainsi que les états sur la formalité de publication ne peuvent " être requis du conservateur des hypothèques avant vingt jours écoulés depuis la date du commandement ". De même " si le créancier laisse écouler plus de quatre-vingt-dix jours entre le commandement et la publication au bureau des hypothèques, il ne peut reprendre les poursuites qu'en le réitérant dans les formes et avec les délais ci-dessus."

2 - Concernant les circonstances particulières tenant au contexte international dans lequel est mise en œuvre la procédure, le formalisme prévu par le règlement n° 1348 (CE) du Conseil de l'Union européenne du

29 mai 2000, relatif à la signification et à la notification dans les Etats membres des actes judiciaires et extrajudiciaires ( le texte du Règlement (CE) n° 1348/2000 du 29 mai 2000 est reproduit dans le code Dalloz dans la partie nouveau code de procédure civile - Droit international - édition 2003 p.761.), est sans incidences sur les qualités que doit remplir le commandement pour être publié.
Ce règlement, qui envisage différentes modalités de détermination de la date de signification en considération des différences de législation des Etats membres (art. 9), prévoit la possibilité de renvoyer à " l'entité d'origine " une attestation de signification ou notification accompagnée d'une copie de l'acte notifié ou signifié (art. 4-5 et art.10-1). C'est au demeurant la procédure suivie en l'espèce selon les énonciations du procès-verbal de transmission de la demande de signification figurant dans les documents à publier.
Dès lors, il appartenait à l'auteur du commandement de communiquer à l'avocat requérant, en vue de la publicité foncière, le second original dûment daté de la date de la signification effectuée en Italie et renvoyé en France par l'organisme étranger chargé de cette formalité.
Rien ne s'opposait donc à ce que l'avocat puisse déposer un commandement, daté éventuellement au vu de l'attestation de signification accompagnant l'acte restitué ou auquel serait jointe cette attestation.