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Article 1885

SAISIES

 

 

  Concours de saisies

Dérogations au principe de non publication d’une seconde saisie posé par l’article 680 du code de procédure civile (ancien) depuis la loi du 29 juillet 1998 1°

Seconde saisie pratiquée par le crédit foncier et les autres organismes financiers bénéficiaires d’une dérogation:suppression de celle-ci ( refus de publier) 2° Seconde saisie pratiquée
dans le cadre de la réalisation de l’actif immobilier des entreprises en liquidation judiciaire:
maintien de la dérogation (publication de l’ordonnance du juge commissaire)

    Question : En mars 2005, un avocat a déposé pour publication, en application de l’article 674 du Code de procédure civile (ancien), la grosse d’une ordonnance d’un juge commissaire à la liquidation judiciaire datée de septembre 2004, autorisant le Crédit foncier de France à poursuivre la vente aux enchères publiques à la barre du Tribunal de grande instance d’un bien immobilier suivant les formes prescrites pour la saisie immobilière. Est joint à cette ordonnance la grosse du jugement du tribunal de commerce de mars 2005 rendu sur opposition de la partie saisie et la confirmant . Ce dépôt intervenait dans le cadre d’une procédure collective ouverte en avril 1992 et ayant déjà donné lieu au dépôt par le liquidateur en vue de la vente d’une précédente ordonnance du juge commissaire valant saisie, publiée au bureau des hypothèques en décembre 1994 et prorogée en 2003 jusqu’en 2006. Il est à noter que c’est en raison de la carence d’enchères ayant affecté la vente judiciaire diligentée en 1995 à la suite du premier commandement de 1994 que le juge commissaire a, dix ans plus tard, autorisé le Crédit foncier, dont la créance avait été déclarée et admise par le liquidateur, à exercer son droit de poursuite individuel, conformément à l’article L 622-23 du Code de commerce. Dans les circonstances rappelées ci-dessus, le conservateur se trouvait en présence d’un concours de saisies, la publication de la première ordonnance par le liquidateur n’étant pas périmée. Se pose dès lors la question de la conduite à tenir en raison de la qualité du second saisissant (Crédit foncier) et à la fois de l’auteur du commandement (juge commissaire) et du cadre juridique dans lequel il s’insert (procédure collective).

Réponse : La situation évoquée ci-dessus appelle plusieurs observations en raison des changements intervenus en matière de concours de saisies: 1°/ Sur les principes applicables en cas de concours de saisies, il convient de rappeler qu’en vertu de l’article 680 du code de procédure civile (ancien) " le conservateur, s’il y a eu un commandement précédemment publié, mentionne, en marge de la copie publiée à son bureau, dans l’ordre de la présentation, tout commandement postérieurement présenté…Il constate également, en marge ou à la suite du commandement, son refus de publier ;… ". Mais le principe ainsi posé du refus de publier un autre commandement concernant les mêmes personnes et les mêmes immeubles par les articles 679 et 680 du code de procédure (ancien) comportait deux catégories de dérogations: la première concernait le Crédit foncier de France et divers organismes assimilés, l’autre résultait de dispositions propres aux procédures collectives. Or, depuis 1998 les dérogations à la règle " saisie sur saisie ne vaut " ont été en partie abrogées. Dès lors, dans la mesure où la question posée vise le cas particulier où la seconde saisie, à la fois émane du Crédit foncier et revêt la forme d’une ordonnance d’un juge commissaire à une liquidation judiciaire, chacune de ces caractéristiques appelle une réponse particulière. 2°/ Aux termes de l’article 33 du décret-loi du 28 février 1852 modifié, le commandement signifié à la requête d’une société de crédit foncier " est publié au bureau des hypothèquesnonobstant toute publication antérieure ". La même dérogation profitait également à un certain nombre d’autres organismes financiers en application de textes particuliers. La loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d’orientation relative à la lutte contre les exclusions, dans son article 105, a abrogé les dispositions des articles 32 à 42 du décret du 28 février 1852 précité et, de ce fait, a supprimé les différentes dispositions emportant dérogation qui y renvoyaient. En conséquence désormais, quel que soit le créancier poursuivant, il y a lieu d’appliquer dans les conditions de droit commun le refus de publier un deuxième commandement. 3°/ En revanche la loi du 29 juillet 1998 susvisée n’a pas supprimé la dérogation relative aux saisies pratiquées dans le cadre des dispositions spéciales relatives à la réalisation de l’actif immobilier des entreprises en liquidation judiciaire. Aux termes de l’article 154 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises (article L 622-16 du code de commerce), s’agissant de la réalisation de l’actif, " les ventes d’immeubles ont lieu suivant les formes prescrites en matière de saisie immobilière ". D’autre part, en vertu de l’article 125 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 " le juge commissaire qui autorise, en application de l’article 154 de la loi du 25 janvier 1985, la vente des immeubles par voie de saisie immobilière " détermine les modalités de la vente. Enfin, l’article 126 du même décret précise que l’ordonnance du juge se substitue au commandement et est publiée " même si des commandements ont été antérieurement publiés ". Dès lors, compte tenu des dispositions rappelées ci-dessus, il n’y a pas lieu d’opposer un refus à la réquisition de publier une ordonnance d’un juge commissaire intervenant dans ce cadre juridique, même si un ou plusieurs commandements non périmés ni radiés ont déjà fait l’objet d’une publication. 4°/ Dans le présent cas exposé, depuis 1998, la qualité de société de crédit foncier est inopérante pour autoriser la publication d’une seconde saisie. Seule l’autorisation sous forme d’ordonnance d’un juge commissaire permet au Crédit foncier, comme à tout autre créancier poursuivant titulaire d’une sûreté et ayant déclaré ses créances, de déroger au principe de non publication posé par l’article 680 du Code de procédure civile (ancien).

Rapp : Bulletin, art. 252, 581, 587, 797, 934, 1321 et 1705. Tel était le cas de la Caisse de crédit agricole mutuel, de la Caisse nationale de crédit agricole (art.745 du code rural), des sociétés de crédit immobilier (art. L 443-6 du code de la construction et de l’habitation), de la Caisse centrale de crédit hôtelier, commercial et industriel.