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Art.1936

INSCRIPTIONS
1) Hypothèque judiciaire définitive confirmant une hypothèque provisoire radiée
Rejet (non)
2) Montant de la créance garantie dans l'hypothèque judiciaire définitive
supérieur au montant garanti dans l'hypothèque judiciaire provisoire
Rejet (non) sauf si l'immeuble a été vendu entre temps

QUESTION :
Une hypothèque judiciaire provisoire, inscrite le 5 décembre 2003 et régulièrement renouvelée, a été radiée le 12 octobre 2009 au vu d'une ordonnance du juge de l'exécution d'un tribunal de grande instance en date du 24 septembre 2009.
L'immeuble grevé avait été vendu entre temps par acte du 12 décembre 2008, publié régulièrement.
Cependant, par ordonnance rendue le 15 décembre 2009, le président de la chambre des référés de la Cour d'appel a ordonné " le sursis à exécution du jugement du 24/09/2009 " ayant ordonné la radiation.
L'avocat du créancier, désirant inscrire l'hypothèque judiciaire définitive, a demandé au conservateur le rétablissement de l'inscription provisoire pour que ne lui soit pas opposée la vente de l'immeuble à des tiers le 12 décembre 2008, et déposé un bordereau d'inscription d'hypothèque judiciaire définitive, garantissant un montant supérieur à celui garanti par l'inscription judiciaire provisoire.
Le conservateur a notifié au requérant deux causes de rejet :
- la première au motif qu'une hypothèque définitive ne pouvait être inscrite, l'hypothèque provisoire radiée étant devenue inexistante (point 1),
- la seconde au motif que le montant de la créance garantie étant supérieur à celui de l'hypothèque provisoire et l'immeuble ayant été vendu entretemps la jurisprudence de l'arrêt Hédreul s'opposait à toute inscription supplémentaire sur l'immeuble vendu (point 2).
Il se demande si ces causes de rejet sont justifiées.

REPONSE :
Point 1 : Il n'appartient pas au conservateur de juger de la validité des inscriptions qu'on le requiert de publier. Il est seulement tenu de s'assurer que le bordereau déposé est accompagné d'un titre, lorsque celui-ci est exigé et renferme toutes les mentions obligatoires prévues à l'article 55 du décret du 14 octobre 1955. Il n'a donc pas à pousser plus loin son analyse en recherchant notamment si l'inscription est ou non efficace. Spécialement, il ne peut refuser le dépôt d'un bordereau d'inscription d'hypothèque judiciaire définitive ou rejeter la formalité au motif que l'inscription provisoire est périmée ou radiée (cf. Bull. art. 994, article 1325, et article 1840).
Cette position est fondée, en particulier, sur les dispositions de l'article 2452 du code civil qui interdisent de refuser ou de retarder une formalité en dehors des cas de refus ou de rejet expressément prévus par les textes législatifs ou réglementaires. Or, si le 2° du 1 de l'art 64 du décret du 14/10/1955 prévoit expressément le refus en cas de renouvellement d'une inscription périmée ou radiée, aucun texte ne le prescrit dans la situation évoquée d'une inscription judiciaire définitive déposée dans les délais pour confirmer une hypothèque judiciaire provisoire radiée.
Au demeurant, la solution de la question relative au rang des hypothèques judiciaires définitives faisant suite aux inscriptions provisoires radiées ne relève pas de la compétence du conservateur, mais exclusivement de celle de l'autorité judiciaire.
Dans ces conditions, la première cause de rejet notifiée ne pouvait être maintenue et il a été conseillé au conservateur de ne pas la confirmer, sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur l'effet réel de la radiation opérée sur ordonnance du JEX, compte tenu de l'ordonnance de référé en ayant ordonné le sursis à exécution.
Point 2 : En revanche, le rejet devait être confirmé, à défaut de régularisation, sur la seconde cause notifiée.
En effet, que l'immeuble ait ou non été revendu entre temps (AMC art 1840), l'inscription définitive régulièrement prise dans les délais visés aux articles 257 et 263 du décret n°92-755 du 31/07/1992 confirme rétroactivement l'inscription provisoire. Mais ce faisant, elle ne garantit que les sommes initialement conservées par celle-ci dont elle prend purement et simplement la place.
Ainsi, lorsque le montant de la créance constatée par la décision statuant au fond est supérieur à celui ayant fait l'objet de l'inscription provisoire, le surplus ne pourrait être garanti que par une inscription spéciale, prise dans les conditions prévues à l'article 2412 du code civil, et ne prenant rang qu'à sa date.
Il a certes été admis que dans cette hypothèse un seul bordereau pouvait être déposé pour garantir a la fois une somme égale à celle conservée par l'inscription provisoire et le surplus de cette somme conservée au titre de l'article 2412 du code civil précité (Cf AMC article 1013).
Mais cette faculté n'est concevable que si l'immeuble n'a pas été cédé dans l'intervalle, l'hypothèque judiciaire de l'article 2412 ne pouvant porter que sur les biens appartenant actuellement au débiteur.
En l'espèce, dès lors que l'inscription requise portait sur un montant supérieur à celui garanti par l'inscription provisoire et que l'immeuble avait été revendu entre temps le bordereau d'inscription d'hypothèque définitive, ne pouvait être publié en tant qu'il garantissait le surplus en présence de la jurisprudence de l'arrêt Hédreul.
L'inscription requise devait donc effectivement faire l'objet d'un rejet à ce titre.
A défaut de régularisation du bordereau sur ce point par réduction de la somme garantie à hauteur de celle précédemment portée dans le bordereau d'hypothèque provisoire, le rejet ne pouvait qu'être confirmé au terme du délai d'un mois réglementaire.
AMC art 994, 1013, 1325, 1840.