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Art : 1949

INSCRIPTIONS - MENTIONS EN MARGE DES INSCRIPTIONS
1) Inscription d'une hypothèque judiciaire de l'article 2412 du code civil, au vu d'une ordonnance du président du TGI rendant simplement exécutoire une transaction assortie d'une subrogation ( non)
2) Possibilité de mentionner une subrogation en marge d'une inscription à partir du simple dépôt d'une ordonnance de ce type depuis l'entrée en vigueur de l'article 710-1 du code civil ( non)

Question :

Un de nos collègues a évoqué la situation suivante :
Par ordonnance du 20/09/2011, le président du TGI de " C " a rendu exécutoire une transaction passée entre Mme " H.. " et le mandataire liquidateur de l'EURL " S " par laquelle :
- Mme H s'engage à lui verser, au lieu et place du débiteur (SCI du CHATEAU…), diverses sommes, déjà consignées à la CARPA,
- le mandataire liquidateur " manifeste la volonté de la subroger, à l'instant du paiement,.., dans les droits et actions détenus par lui-même, es qualités ", contre le débiteur et notamment dans " l'exercice de l'hypothèque judiciaire prise le 27/05/2009 ".
En s'appuyant sur cette ordonnance comme valant titre, un avocat dépose un bordereau d'inscription judiciaire, renvoyant, après le mot " judiciaire ", à la mention suivante portée au cadre " dispositions particulières " : "inscription se substituant rétroactivement par subrogation, en application des dispositions des articles 1250 et 1251 du code civil, aux droits résultant de l'inscription judiciaire du 27/05/2009."
La somme garantie (100 742  ) portée au bordereau est supérieure à celle figurant dans l'inscription de 2009 (74 000 ).
Le conservateur demande s'il peut accepter ce bordereau :
- soit comme se substituant à l'inscription de 2009 à hauteur des montants initialement conservés et valant hypothèque judiciaire prenant rang à sa date pour le surplus,

- soit comme valant hypothèque judiciaire prenant rang à la date du dépôt, pour la totalité.
Subsidiairement, peut-il publier la subrogation dont il est fait état, à l'occasion de l'inscription de l'hypothèque requise ?

Réponse :

a) Concernant l'inscription.
S'agissant de la nature de l'inscription judiciaire requise : l'inscription, prise le 27/05/2009, ne constituait pas une inscription provisoire, mais une hypothèque judiciaire relevant de l'article 2412 du code civil.
Ainsi, en dépit de l'ambiguïté de la mention de renvoi portée dans le bordereau, l'inscription requise ne saurait constituer une inscription définitive susceptible de prendre le rang de l'inscription de 2009, fût-ce dans la limite du capital conservé alors.
Par ailleurs, l'article 2412 du Code civil indique : " L'hypothèque judiciaire résulte des jugements soit contradictoires, soit par défaut, définitifs ou provisoires, en faveur de celui qui les a obtenus.
Elle résulte également des décisions arbitrales revêtues de l'ordonnance judiciaire d'exécution ainsi que des décisions judiciaires rendues en pays étrangers et déclarées exécutoires par un tribunal français ".
Ne tranchant aucun litige et ne rendant aucun arbitrage, l'ordonnance prise par le Président du TGI ne peut être rangée dans cette catégorie et donc servir de titre à une inscription judiciaire relevant de l'article 2412 du code civil.
Selon l'article 1441-4 du Code de procédure civile, " le président du tribunal de grande instance saisi sur requête par une partie à la transaction confère force exécutoire à l'acte qui lui est présenté." Ce texte permet aux parties à la transaction de demander au juge d'assortir leur convention de la force exécutoire et de lui donner ainsi la qualité de titre exécutoire visé à l'article 3 de la loi 91-650 du 09/07/1991, permettant l'inscription d'une hypothèque judiciaire provisoire sans autorisation préalable du juge en vertu de l'article 68 de cette même loi.
Le titre présenté ne pourrait donc justifier que l'inscription d'une hypothèque judiciaire provisoire, prenant rang à la date de son dépôt et devant par la suite être validée par une inscription définitive effectuée conformément au 2° de l'article 263 du décret du 31 juillet 1992.

a) Concernant la subrogation.
Le créancier subrogé dans les droits d'un créancier inscrit bénéficie de plein droit des inscriptions hypothécaires prises à son profit sur les biens du débiteur, que cette subrogation ait été ou non portée à la connaissance des tiers par la publication au fichier immobilier de l'acte la constatant. (Cass civ 3ème 20/12/1989, Defrénois article. 34761-25 de 1990).
Lorsqu'il souhaite assurer la publicité de sa qualité de créancier subrogé, pour l'information des tiers celui-ci peut :
- soit faire publier l'acte de subrogation en marge de l'inscription concernée ;
- soit indiquer au cadre " ad hoc " d'un bordereau de renouvellement son état civil et l'acte par lequel il est devenu propriétaire de la créance (article 61-2 du décret du 14/10/1955),
- soit faire valoir sa qualité au moyen de tout acte soumis à publicité foncière se rapportant à l'inscription hypothécaire concernée (commandement valant saisie notamment, cf Bulletin AMC art. 919).
Au cas particulier, l'inscription judiciaire prise en 2009, est une inscription judiciaire de l'article 2412 du code civil et non une inscription judiciaire provisoire susceptible d'être validée par une inscription définitive bénéficiant de son rang.
Le constat de la subrogation dans le bordereau déposé, qui ne constitue ni un renouvellement de l'inscription de 2009, ni une hypothèque judiciaire définitive pouvant y être liée au fichier immobilier, ne peut donc être publié à cette occasion.
Dans la situation évoquée, la voie normale de la publication de la subrogation aurait été celle de la mention en marge.
Mais, au stade actuel, on observera :
- d'une part, que la transaction homologuée par le jugement, manifeste simplement la volonté du mandataire liquidateur de subroger Mme " H " dans ses droits, lorsque le paiement sera intervenu ; or, en l'état rien n'indique que cette condition de la subrogation soit remplie, et que ;
- d'autre part, dès lors quelle rend simplement exécutoire une transaction et ne tranche aucun litige, l'ordonnance ne constitue pas une décision juridictionnelle publiable au sens de l'article 710-1 du code civil.
A ce titre, elle ne saurait donc servir de support de publication sous la forme visée à l'article 2430 du Code civil.
En conclusion, le bordereau déposé devra faire l'objet d'un rejet pour refus non opposé, tant en raison du fait que la nature du titre présenté, permettrait seulement l'inscription d'une hypothèque judiciaire provisoire, que du caractère inapproprié du renvoi effectué sur le bordereau après l'indication de la nature de l'hypothèque, laissant entendre à tort, que l'inscription requise prendrait rétroactivement rang à la date de celle prise en 2009 dans le cadre de l'article 2412 du code civil.