Retour

Art. 135

TAXE HYPOTHECAIRE. - SALAIRES.

Immeubles en copropriété. - Ventes de fractions indivises d'un terrain à bâtir. - Désignation dans l'acte de l'appartement attribué à l'acquéreur dans l'immeuble à construire sur le terrain.

(R.M.F., 5 octobre 1952.)

Question - M. Joubert demande à M. le Secrétaire d'Etat au Budget en vertu de quels textes, lors de la transcription des ventes de fractions de terrains destinés à la construction d'un bâtiment en copropriété et permettant à chaque acquéreur de posséder la propriété exclusive et particulière d'un appartement, les conservateurs des Hypothèques sont en droit de percevoir :
1° une demi-taxe hypothécaire.
2° un salaire proportionnel, sur la valeur de l'appartement à construire pour lequel ils exigent des parties une estimation dudit appartement dans son état d'achèvement, et cela en plus de la taxe hypothécaire et du salaire proportionnel calculés aux tarifs normaux sur les prix de vente des fractions de terrain. Il est précisé :
1° que le vendeur de fractions de terrain a établi seul, avant toutes les ventes, un cahier des charges avec règlement de copropriété en vue de la vente par fractions dudit terrain destiné à la construction future de l'immeuble collectif désigné audit règlement, ainsi que la composition de chacun des appartement et que, par suite, ce cahier des charges-règlement de copropriété a été transcrit au tarif minimum et au salaire fixe;
2° que, dans les ventes de fractions de terrain, chaque acquéreur a déclaré acquérir, en vue d'avoir la propriété exclusive et particulière, une fois le bâtiment collectif édifié, d'un appartement composé conformément à ce qui est stipulé au cahier des charges-règlement de copropriété auquel il a adhéré par l'acte même d'acquisition des fractions de terrain ;
3° que les ventes intervenant avant la construction du bâtiment collectif, il ne saurait être question d'attribution ou d'actes déclaratifs de propriété immobilière ou droits immobiliers dans le sens du décret-loi du 30 octobre 1935, puisque d'une part la construction n'existe pas encore et qu'au moment des acquisitions des fractions de terrain, on ne peut savoir si l'immeuble collectif projeté sera effectivement édifié et, d'autre part, que la construction sera faite avec les fonds personnels à chaque acquéreur et affectés à leur appartement respectif, ce qui bannit tout état d'indivision à l'origine et par suite tout partage ou attribution ;
4° que si les prétentions des Conservateurs des hypothèques devraient être maintenues, le bénéfice de la loi du 18 septembre 1950 relative aux acquisitions de terrains à bâtir et destinés à la construction de maisons d'habitation serait virtuellement supprimé. (Question n° 3820 du 27 mai 1952).

Réponse. - L'insertion, dans les actes considérés, de clauses permettant à chaque acquéreurs de posséder la propriété exclusive et particulière d'un appartement a pour effet juridique certain de conférer à l'acquéreur du titre susceptible de faire échec à la présomption de copropriété indivise qui, en l'absence de telles clauses, résulterait des Art.s 552 et 553 du Code Civil. De ce chef, ces actes contiennent un allotissement des constructions futures dans leur état futur d'achèvement et motivent l'application des Art.s 843, 1° du Code général des Impôts et 1er, 8°, du décret n° 48-1677 du 29 octobre 1948 portant révision du taux du salaire des Conservateurs des hypothèques, d'après lequel la taxe hypothécaire et les salaires exigibles à l'occasion des transcriptions sont liquidés sur le prix ou la valeur des immeubles faisant l'objet de la transcription. Il est toutefois précisé, en ce qui concerne les salaires, que ces derniers formant la contrepartie de la responsabilité que la loi civile impose aux Conservateurs, les contestations qui peuvent s'élever au sujet de leur perception sont de la compétence exclusive des tribunaux judiciaires et que l'Administration n'a pas, en conséquence, à intervenir en cette matière (Journal Officiel, 5 octobre 1952, Débats parl. A.N., p. 4010).

Observations. - La réponse reproduite ci-dessus confirme la règle de perception préconisée sous l'art. 68 du Bulletin.

Ainsi que l'observe justement cette réponse, si les futurs propriétaires des appartements se bornaient à acquérir une fraction indivise du terrain sur lequel l'immeuble doit être construit, la construction, une fois édifiée, leur appartiendrait dans l'indivision, en application de la présomption résultant des art. 552 et 553 du Code Civil. Pour que chacun d'eux devienne propriétaire exclusif d'un appartement déterminé, il leur faudrait procéder entre eux à un partage de la construction, une fois celle-ci terminée.

C'est ce partage que les intéressés opèrent par anticipation lorsque, dans l'acte d'acquisition de leur part indivise du terrain, ils désignent, par voie de référence au règlement de copropriété, celui des appartements dont ils auront la propriété exclusive dans la construction à édifier. D'une part, en effet, ils renoncent à tous droits sur les appartements futurs autres que celui désigné ; d'autre part, ils acquièrent du propriétaire du terrain le bénéfice des renonciations identiques que celui-ci a déjà obtenues ou obtiendra par la suite des autres acquéreurs de fractions indivises du terrain.

La clause portant désignation de l'appartement apparaît ainsi comme un allotissement dans la construction à édifier dans son état d'achèvement (1). A ce titre, elle donne ouverture la taxe au demi-tarif et au salaire sur la valeur des parties non communes de l'appartement à construire.

A noter que les acquéreurs qui estiment sans intérêt de rendre opposable aux tiers le titre de propriété de leur appartement, avant l'achèvement de la construction ont la faculté de ne faire transcrire qu'un extrait limité aux dispositions relatives à l'acquisition du terrain. Ils n'ont alors à acquitter que la taxe et le salaire correspondant à cette acquisition.

Annoter : C.M.L. n° 1928, 1944 et 2039; -- de France, n° 296, 380 et 563.

(1) ll a déjà été reconnu par la jurisprudence que les ventes d'un immeuble considéré dans son état futur d'achèvement donnait ouverture, comme celle d'un immeuble déjà édifié, au droit de mutation immobilière (Cass. req., 28 novembre 1933, Instr. 4424, § 18, Rev. de l'Enreg. art. 11347; Cass. req., 27 janvier 1941, Instr. 4570, § 24, R.E. 11825, 1er esp.)

Par identité de motifs, le partage portant sur un immeuble à construire donne ouverture aux mêmes droits que le partage d un immeuble déjà construit. L'effet d'un tel partage étant subordonné à l'édification de la construction, l'exigibilité du droit d'enregistrement sur un tel partage ne serait sans doute pas immédiate ; par contre, la taxe hypothécaire qui est due même sur les actes conditionnels doit être perçue au moment de la transcription.