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Art. 195

INSCRIPTION D'OFFICE .

I. - Jugement d'adjudication et quittance notariée du prix présentés ensemble à la transcription. - Pas d'inscription d'office.
II. - Vente de biens de mineurs. - Remploi du prix. Inscription d'office seulement si le remploi forme une condition formelle de la validité de l'aliénation.

Question. --·M. Jarrosson demande à M. le Secrétaire d'Etat au Budget si un Conservateur des hypothèques est fondé à prendre inscription d'office lors de la transcription d'un jugement d'adjudication de biens immobiliers rendu par un tribunal civil : 1° pour garantir le paiement du prix d'adjudication, lorsqu'un acte constatant le payement de ce prix et le désistement du privilège de vendeur est présenté à la transcription avec la grosse du jugement d'adjudication ; 2° pour garantir le remploi de la partie du prix d'adjudication revenant à des colicitants mineurs. (Question n° 9266 du 22 octobre 1953.)

Réponse. - D'après l'Art. 2197 du Code Civil, les Conservateurs des hypothèques sont personnellement responsables des opérations qui leur sont confiées. Par suite, ils ont seuls qualité pour trancher, sous le contrôle des tribunaux judiciaires, les difficultés que soulèvent ces opérations et l'administration des Finances ne saurait intervenir dans l'examen des. cas particuliers sans risquer de substituer sa propre responsabilité à celle que la loi impose à ces agents (cf. notamment Rép. aux questions écrites : n° 9329 posée le 1er mars 1949 par M. Paul Bastid, député, J.O. du 4 mars 1949, Déb. parl. A.N., p. 1846; n° 11460 posée le 18 octobre 1949 par M. Louis Chevallier, député, J.O. 16 novembre 1949, Déb. parl p. 6145 ; n° 15366 posée le 17 juillet 1950 par M. Jean Crouzier, député, J.O. 7 octobre 1950, Déb. parl. A.N., p. 6874). J.O. 5 décembre 1953, Déb. parl. A.N. p. 6051.

Observations. - I. Pour que le Conservateur soit dispensé de prendre l'inscription d'office, il faut, mais il suffit, que la transcription de l'acte de vente révèle la libération de l'acquéreur. Il en est ainsi, non seulement lorsque l'acte transcrit indique que le prix a été payé, mais encore lorsque sont présentés simultanément à la transcription l'acte de vente formant le titre de la créance du prix et l'acte de quittance constatant le paiement de ce dernier.

En droit strict peut-être pourrait-on soutenir que, pour que la transcription de deux actes soit simultanée il faut que ces deux actes fassent l'objet d'un bordereau unique terminé par un seul certificat de collationnement.

Il en résulterait dans l'espèce qui fait l'objet de la question écrite que le procès-verbal d'adjudication et l'acte de quittance du prix ne pourraient faire l'objet d'une transcription simultanée, puisque l'établissement d'un bordereau unique est impossible du fait que l'officier qualifié pour signer le certificat de collationnement est le greffier du tribunal pour le premier des actes et le notaire pour le second. Le Conservateur serait alors fondé à formaliser l'inscription d'office lors de la transcription du jugement d'adjudication, sans avoir égard à la quittance du prix présentée en même temps à la formalité.

Toutefois cette interprétation, basée sur des considérations de pure forme, n'est pas en harmonie ni avec le principe, ni avec la pratique courante. Celle-ci est en effet fixée en ce sens que la transcription de deux actes connexes est considérée comme simultanée lorsque les deux actes sont présentés en même temps à la formalité ; même si chacun d'eux faisait l'objet d'un bordereau distinct (Rappr. Bull. A.M.C., art. 106, § 13-I). D'autre part, si les deux actes font l'objet d'une transcription unique, sous un même numéro, cette transcription unique, qui révèle à la fois la créance du prix et l'extinction de cette créance, n'autorise pas le Conservateur à prendre l'inscription d'office. Enfin la situation serait encore la même si les deux actes étaient transcrits l'un à la suite de l'autre (où même simplement dans la même journée) sous des numéros différents. Dans une telle hypothèse, en effet, la publicité donnée au privilège par la transcription de l'acte de vente n'existe que pour le trait de temps qui sépare cette transcription de celle de l'acte de quittance qui publie l'extinction du privilège. Et ce trait n'existe pas juridiquement dans le cas de dépôt simultané des deux actes. Et il en serait de même en cas de dépôt dans la même journée dans l'opinion doctrinale qui n'accorde aucune force probante aux numéros d'inscription au registre des dépôts.

II. - En cas de vente de biens de mineurs, la libération de l'acquéreur n'est subordonnée au remploi du prix par le tuteur que si la décision qui a ordonné la vente a fait de ce remploi une condition formelle de la validité de l'aliénation (Précis Chambaz et Masounabe, n° 81-IV). c'est seulement dans cette hypothèse que l'inscription d'office doit être prise.

Annoter : C.M.L. n° 70, 81-IV J: Jacquet, Traité du privilège du vendeur, n° 118-2 et 187 ; de France, n° 153 et 155.