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ARTICLE 621

RADIATIONS.

Mainlevée notariée. - Mandataire de justice.
Mainlevée sans paiement en vertu de pouvoirs conférés au mandataire par une ordonnance de référé. - Inefficacité.

Question. - A l'occasion d'une cession de bail, les parties ont remis le prix de la cession à un séquestre, M. A...

La remise des fonds par le séquestre aux vendeurs ayant fait l'objet de difficultés, une ordonnance de référé rendue le 28 septembre 1961 par le Président du Tribunal de Commerce a nommé un autre séquestre, M. C..., avec mission de se faire remettre par M. A... le prix dont il était détenteur.

Le 19 octobre 1961, M. C..., autorisé par une ordonnance du Tribunal de Grande Instance, a pris contre M. A... une inscription provisoire d'hypothèque judiciaire pour sûreté de la restitution de la somme dont il était détenteur. A la suite de la condamnation prononcée contre M. A... par le Tribunal de Grande Instance, l'inscription provisoire a été suivie, le 10 juin 1964, d'une inscription définitive.

En l'état, le Président du Tribunal de Commerce a, par une ordonnance du 5 janvier 1965, autorisé M. C... à donner mainlevée des inscriptions des 19 octobre 1961 et 10 juin 1964, " sans avoir à donner quittance du montant des inscriptions, mais seulement des sommes qui doivent lui revenir, et sans avoir à justifier au conservateur des Hypothèques du règlement entre ses mains du montant des inscriptions prises ".

Est-il possible de radier en vertu d'une mainlevée consentie par M. C... dans les conditions prévues par l'ordonnance du 5 janvier 1965 ?

Réponse. - Les pouvoirs des mandataires de justice - administrateurs ou séquestres - sont déterminés par la décision qui les a nommés (Précis Chambaz et Masounabe-Puyanne, 2° édit. n° 1172). Lorsqu'il s'agit d'un jugement, et que cette décision est opposable au créancier, il peut autoriser le mandataire à donner mainlevée sans payement (Jacquet et Vétillard, V° Mandat, n° 15, p. 451). Mais il en est différemment lorsqu'il s'agit d'une ordonnance de référé. Le juge des référés, qui ne rend que des décisions de caractère provisoire et non revêtues de l'autorité de la chose jugée (Bull. A.M.C., art. 434, Observ.) et qui ne peut, par suite, ordonner valablement une radiation (Précis Chambaz et Masounabe-Puyanne, 2° édit., n° 1361-4°; Jacquet et Vétillard, V° Jugement de radiation n° 37, p. 412 ; Etude de M. Masounabe-Puyanne : Le référé et la publicité foncière, J.C.P. 1963-I-1794, 7), ne saurait en effet, conférer à autrui plus de pouvoirs qu'il n'en a lui-même.

Il en résulte, au cas particulier, que M, C..., séquestre, n'a pas le pouvoir de donner mainlevée sans constatation de paiement

L'ordonnance du Président du Tribunal de Commerce du 5 janvier 1965, qui lui donne l'autorisation de consentir mainlevée sans paiement des deux inscriptions en cause, est, en effet, une ordonnance de référé qui, pour les motifs indiqués ci-dessus, ne peut être assimilée à un " jugement en dernier ressort ou passé en force de chose jugée " exigé par l'article 2157 du Code civil.

En l'état, la radiation ne peut être opérée qu'au vu d'une mainlevée constatant le paiement du prix. Cette constatation peut être l'oeuvre de M. C..., dont la mission, aux termes de l'ordonnance de référé du 28 septembre 1961, comportait l'encaissement de ce prix. Si cependant ce dernier a été reçu directement par le créancier, il faudrait faire intervenir ce dernier à la mainlevée pour donner quittance.

Il semble résulter des termes de la seconde ordonnance de référé que les inscriptions garantissent des sommes revenant personnellement au séquestre : probablement ses honoraires et débours. Dans cette mesure, M. C... agit à titre personnel, comme créancier maître de ses droits, et peut donner mainlevée sans paiement.

Annoter : Jacquet et Vétillard, V° Mandat n° 15, p. 451 ; C.M.L., 2° édit. n° 1172.