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ARTICLE 641

PUBLICATION D'ACTES.

Opposabilité aux tiers. - Procès-verbal de carence.
Acte de vente sous seings privés non reproduit dans le procès-verbal publié, ni annexé à celui-ci.

ARRET DE LA COUR DE CASSATION, 1ère CHAMBRE CIVILE, DU 20 JUILLET 1965.

La cour,
Sur le moyen unique ;

Vu les articles 4, 28-1°, 30-1° du décret du 4 janvier 1955 et 68 du décret du 14 octobre 1955 dans leur rédaction initiale, applicables en la cause ;

Attendu que les conventions ou dispositions contenues dans un acte sous seing privé ne peuvent être portées à la connaissance des tiers ou leur devenir opposables par leur publicité que si elles sont constatées dans un acte authentique.

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt infirmatif attaqué que veuve Morlon, ayant acquis de Cristini un immeuble par acte sous seing privé, le somma d'avoir à comparaître devant notaire pour réitérer la vente par acte notarié ; que le procès-verbal de carence dressé par le notaire fut publié au bureau des hypothèques " que Cristini ayant été par la suite déclaré en faillite. Pin, syndic, inscrivit l'hypothèque de la masse sur l'immeuble ayant fait l'objet de cette mutation ;

Attendu que la Cour d'Appel a déclaré la vente opposable à la " masse des créanciers, au motif que le procès-verbal de carence, dont la publication a été opérée, relatait la date de l'enregistrement de l'acte de vente sous seing privé, et que cette mention était suffisante pour renseigner les tiers ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'Appel a violé par fausse application les textes sus-visés ;

Par ces motifs ;

 

Casse et annule l'arrêt rendu entre les parties par la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence, le 11 janvier 1962.

 

Observations. - Le procès-verbal de carence en cause avait été publié avant l'entrée en vigueur du décret n° 59-89 du 7 janvier 1959, dont l'article 9 ajouté à l'article 37 du décret du 4 janvier 1955 un paragraphe 2 règlementant spécialement la publication des actes de l'espèce et de leurs annexes sous seings privés.

 

Sous ce régime, la publication des actes sous seings privés étaient purement et simplement interdite (Décret du 4 janvier 1955, art. 4). Les conventions contenues dans ces actes ne pouvaient être rendues opposables aux tiers par leur publication qu'à la condition d'être " constatées à nouveau dans un acte dressé en la forma authentique " (Décret du 14 octobre 1955, art. 68-2). Par suite, au cas d'un procès-verbal de carence auquel était annexé l'acte sous seings privés dont la réalisation authentique n'avait pu être obtenue, seul pouvait être publié le procès-verbal de carence à l'exclusion de son annexe.

 

Dans l'espèce, la Cour de Cassation a cassé l'arrêt de la Cour d'Appel qui avait déclaré opposable aux tiers l'acte sous seings privés non publié mais relaté dans le procès-verbal de carence.

 

Il importe de remarquer que; pour motiver sa décision, la cour ne relève pas que la vente faisant l'objet de l'acte sous seings privés n'a pas été constaté à nouveau dans le procès-verbal de carence, étant donné que ce dernier acte ne reproduit pas les éléments essentiels de la vente te qu'au surplus seul l'acquéreur y comparait, ce qu'elle n'aurait pas manqué de faire faire si elle avait entendu appliquer littéralement l'article 68-2 du décret du 14 octobre 1955. Elle souligne, par contre, que la Cour d'Appel a constaté que le procès-verbal de carence publié relatait la date de l'enregistrement de l'acte de vente sous seings privés et a jugé que cette mention était suffisante pour renseigner les tiers.

 

En présence de ces motifs, on est porter à penser que la décision de la Cour de Cassation aurait été différente si les énonciations du procès-verbal de carence avaient été suffisantes pour informer les tiers de tous les éléments constitutifs essentiels de la vente.

 

Cette décision est à rapprocher sur ce point d'un arrêt de la Cour d'Appel de Bordeaux du 11 mars 1965 (Bull. A.M.C., art. 626) qui a reconnu, sous l'empire de l'article 37-2 du décret du 4 janvier 1955, complété par le décret n° 59-89 du 7 janvier 1959, que la publication d'une demande en justice tendant à la réalisation authentique d'un acte sous seings privés avait pu rendre opposable aux tiers la vente dont elle relatait les éléments essentiels, bien que l'acte sous seings privés n'ait pas été annexé à la demande, ni reproduit dans celle-ci, comme le prescrit l'article 37-2 sus-visé.

 

Annoter : C.M.L., 2° éd., n° 488-A-III (feuilles vertes), 679 et 690-A, 4° groupe, B (feuilles vertes)