Retour

ARTICLE 946

RADIATIONS.

Mainlevée notariée.
Inscriptions profitant à une Caisse départementale de Mutualité Sociale Agricole.
Conditions auxquelles doit satisfaire la mainlevée

JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE COUTANCES DU 28 FEVRIER 1973

Attendu que la MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE du département de la Manche a déposé à la Conservation des Hypothèques de Coutances l'expédition d'un acte reçu le 28 novembre 1970 par L..., notaire à L..., contenant mainlevée pure et simple d'une inscription d'hypothèque judiciaire prise à son profit le 12 avril 1968 contre Georges LAMY, cultivateur à Créances ; que le Conservateur, le sieur C..., ayant refusé de procéder à la mention de radiation en marge de l'inscription an motif que la Caisse ne pouvait donner mainlevée de l'inscription prise à son profit qu'avec quittance et intervention de l'agent comptable du recouvrement et ayant notifié ce refus au notaire le 7 mai 1971, la MUTUALITE l'a assigné devant le Tribunal pour avoir jugé mal fondé son refus et voir ordonner de procéder immédiatement à la publicité dudit acte par la mention, en marge de l'inscription hypothécaire dont s'agit, de sa radiation;

Attendu que, comme l'observent AUBRY, RAU et BARTIN, quand il s'agit de faire rayer une inscription sans paiement préalable de la créance qui en forme l'objet, la capacité de consentir mainlevée suppose celle de disposer de la créance même ;

Attendu que le Directeur de la Caisse demanderesse n'a reçu cette capacité d'aucune loi ni d'aucun décret, et qu'aucune loi ni aucun décret n'habilitent le Conseil d'administration de la Caisse à lui déléguer cette capacité dont il n'est lui-même pas investi ; qu'en effet le pouvoir de compter en non-valeur une créance, c'est-à-dire de constater qu'elle est définitivement irrécouvrable, ne peut être assimilé au pouvoir d'en disposer et de renoncer à la recouvrer alors que, par hypothèse, elle est garantie par l'inscription hypothécaire ;

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL,

Déboute la MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE du département de la Manche de sa demande et la condamne aux dépens....

Observations : Le jugement rapporté consacre l'opinion que nous avons exposée dans l'art. 831 du Bulletin selon laquelle une Caisse de Mutualité Sociale Agricole ne peut consentir valablement une mainlevée pure et simple des inscriptions de privilège ou d'hypothèque lui profitant (v. dans le même sens : Rép. Min. Econ. et Fin., 22 juin 1971, Bull. A.M.C., art. 862).

Sous réserve de l'appel formé contre cette décision, il est ainsi confirmé que les inscriptions dont il s'agit ne peuvent être radiées que si la mainlevée constate soit le payement de la créance - auquel cas cette constatation doit émaner de l'agent comptable de la Caisse -, soit l'annulation de cette créance.

Annoter : C.M.L., 2° éd., n° 1248, 1280 et 1282.