ARTICLE 973 INSCRIPTIONS. Titre. - Hypothèque judiciaire. - Condamnation alternative. PROCEDURE. Dommages-intérêts. - Assignation abusive et vexatoire. JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE LE TRIBUNAL, Attendu qu'il résulte des productions des parties et notamment d'un jugement du Tribunal de Grande Instance de Brest, en date du 3 mars 1971, et d'un arrêt partiellement confirmatif, exécutoire, de la Cour d'Appel de Rennes du 28 septembre 1971 que par acte sous seing privé, en date du 17 mars 1967, V... s'est engagé à céder à T..., ou à la société C..., un immeuble sis à Brest, 47, rue de Traverse, pour un prix de 250.000 F et que T..., sauf à se substituer la société C..., s'est engagé à acquérir ledit immeuble dès qu'aurait été définitivement examinée par les instances administratives compétentes la demande de prime de développement industriel présentée par la société C... dans le cadre de son implantation à Brest; que le tribunal de Brest et la Cour d'Appel de Rennes, en leurs décisions susdites, analysant ainsi tout au moins ledit acte sous seing privé et le Tribunal estimant, la Cour confirmant, contrairement aux conclusions soutenues par T... et la C..., que la condition suspensive était réalisée et que la vente stipulée était dès lors définitive et parfaite entre les parties, ont jugé, la Cour par confirmation de la décision entreprise, que T... ou la société C..., si elle se substitut à lui, devrait régulariser l'acte en la forme authentique dans le délai d'un mois à compter de la signification de la décision ; que passé le délai ladite décision vaudrait vente et, en conséquence, condamné T... ou la société C... si elle se substituait à lui, à payer à V... la somme de 250.000 F pour prix de la vente, ce avec intérêts de droit du 20 juillet 1970 ; Que, au vu de ces décisions dont la dernière a été signifiée à T... le 28 octobre 1971, V... avait, dès le 13 octobre 1971, requis et obtenu l'inscription litigieuse à titre d'hypothèque définitive ayant effet jusqu'au 12 octobre 1981 du chef de T... sur un immeuble lui appartenant à la Grande-Paroisse, cadastré section AD n° 82 et 84 aux lieux dits Rubrettes en nature de maison, sol et verger d'une superficie de 11 ares 17 ca, d'une part, 1 are 60 ca, d'autre part, et un autre immeuble à usage destination d'usine sis, à Montereau-Fault-Yonne, 5, rue des Chomats, cadastré section AN 78 pour 80 ares 33 ca, ce, pour valoir sûreté de la somme principale de 50.000 F, montant des condamnations prononcées par le jugement de Brest à l'arrêt de Rennes, des intérêts décomptés au taux de 5 % du 20 juillet 1970 au 20· octobre 1971, soit 15.625 F des frais de procédure évalués à 2.000 F, sauf à parfaire ou diminuer et réserve faite des intérêts au règlement ; Attendu qu'il est incontestable que le jugement du tribunal de Brest en date du 3 mars 1971, tel qu'il a été partiellement confirmé par l'arrêt de la Cour d'Appel de Rennes, rendu le 28 septembre 1971, qui ne l'a émondé que sur une condamnation au paiement de dommages et intérêts non maintenue, comportait condamnation non conjointe mais alternative de T... et de la société C... à régulariser la vente d'immeuble objet de l'acte sous seing privé du 17 mars 1967 avec effet du 20 juillet 1970 et à payer le prix convenu ; Attendu qu'une telle condamnation comportait donc à la charge de T... une obligation, dont certes l'option d'achat de la société C... pouvait éventuellement le relever, mais garantie, dès lors qu'elle était déclarée par une décision le condamnant à y satisfaire, par l'hypothèque judiciaire qui, aux termes de l'article 2123 du Code Civil, résulte de droit de tout jugement soit contradictoire ou par défaut, définitif ou provisoire, en faveur de qui les a obtenu dès lors qu'il en résulte une créance ; Attendu que, aux termes du même article du Code Civil, V... pouvait donc requérir l'inscription de cette hypothèque, sur tout immeuble appartenant à T..., et il n'est pas contesté que ce fut le cas, en exécution de l'arrêt de la Cour d'Appel de Rennes, et même, comme il l'a fait en raison du caractère purement conservatoire de l'acte et conformément à la jurisprudence, avant sa signification, dès lors que cette décision avait un caractère définitif, même si elle ne pouvait à ce moment être rament à exécution puisqu'un délai d'un mois était laissé, aux parties condamnées pour régulariser l'une à défaut de l'exercice de son option par l'autre la vente à elle consentie et par elle acceptée ; Attendu qu'ainsi il ne peut être fait par les époux T... ni à V... et encore moins au Conservateur des Hypothèques, sauf à en contester la forme pour l'incidence, ce qu'ils ne font pas, aucun grief de l'inscription de l'hypothèque litigieuse le 13 octobre 1971 ; Attendu qu'entre les époux T. et le Conservateur des Hypothèques de Fontainebleau, le Tribunal ne peut que constater que le fonctionnaire appelé en cause ne pouvait refuser l'inscription litigieuse dès lors, qu'il lui était présenté des décisions assorties assurément d'une hypothèque judiciaire grevant les immeubles de T... ; qu'il ne pourrait de toute façon radier de lui-même l'inscription régulièrement prise ni, en conséquence, être personnellement condamné à le faire à quelque moment que ce soit, n'y ayant lieu à rectification ou annulation de ses actes ; Attendu que dans ces conditions les demandes formées contre lui par les époux T... doivent être immédiatement rejetées et que le défendeur justifiant de frais dus à l'instance, ayant été contraint de mettre en oeuvre une défense et, à ses fins, de constituer un avoué et de commettre un avocat, ne serait-ce que pour faire valoir des évidences, moyens auxquels le Tribunal aurait certes pu suppléer d'office, et ses fonctions par leur importance et par le fait qu'elles sont assorties expressément par la loi d'un principe de responsabilité personnelle lui faisant moralement obligation, ne serait-ce qu'à l'égard du département ministériel qui l'a investi de ses fonctions, de ne négliger en rien les débats oraux, il y a lieu d'admettre sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts, d'autant plus que celle-ci, nullement excessive, répond à celle finalement ajoutée, non sans légèreté par les époux T..., aux conclusions signifiées avec les actes d'assignation, qui apparaissent, en l'absence de toute justification sérieuses, abusives et vexatoires. Attendu que, si les dépens doivent être réservés entre les époux T... et V..., les demandeurs doivent les supporter entièrement et définitivement à l'égard du Conservateur des Hypothèques dont l'appel en cause était mal fondé et de toute façon inutile ; PAR CES MOTIFS, Constate que du jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Brest le 3 mars 1971 entre T... et V..., confirmé par arrêt de la Cour d'Appel de Rennes en date du 22 septembre 1971, il résultait à la date du 13 octobre 1971, où elle fut inscrite à la Conservation des Hypothèques de Fontainebleau sur divers immeubles appartenant T..., une hypothèque judiciaire contre ledit T... et au profit de V... ; Dit et juge en conséquence valablement requise par V... et effectuée par le Conservateur des Hypothèques de Fontainebleau, l'inscription d'hypothèque judiciaire définitive publiée à la Conservation des Hypothèques de Fontainebleau le 13 octobre 1971, volume 1654, n° 81 ; Dit et juge en conséquence les époux T... mal fondé en leurs demandes de radiation formulées et de dommages intérêts pour faute dans l'acceptation de l'inscription litigieuse directement contre le Conservateur des Hypothèques de Fontainebleau, les en déboute; Dit et juge abusive et vexatoire leur action en tant que dirigée contre ledit Conservateur des Hypothèques et celui-ci fondé de ce chef en sa demande reconventionnelle et condamne conjointement les époux T... à lui payer la somme de 1.000 F à titre de dommages-intérêts ; Condamne les époux T... aux entiers dépens au profit du Conservateur des Hypothèques de Fontainebleau, dit que les époux T... conserveront définitivement la charge de ceux qu'ils ont engagés par leur action ou leur défense contre cette partie. Observations. - I. - Une condamnation alternative donne naissance à l'encontre de chacun des condamnés à une obligation éventuelle qui peut être garantie par l'hypothèque judiciaire établie par l'art. 2123 du Code Civil (Précis Chambaz et Masounabe-Puyanne, 2° éd., n° 278). La seule production de la décision de justice qui prononce une condamnation alternative autorise par conséquent à requérir l'inscription de cette hypothèque contre chacun des condamnés. C'est en ce sens que s'est prononcé le Tribunal de Grande Instance de Fontainebleau et sa décision doit être approuvée. II. - Pour ce qui concerne la condamnation à des dommages-intérêts : Rappr. C. d'Appel de Montpellier, 29 octobre 1968, Bull. A.M.C., art. 771 |