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ARTICLE 594.

PROCEDURE. - RADIATION.

Radiation d'une hypothèque judiciaire provisoire ordonnée par le Président du Tribunal dans la forme prévue aux art. 54 et 55 du Code de procédure Civile.

Décision ayant le caractère d'un jugement.

Exécution lorsqu'elle est devenue définitive.

JUGEMENT
DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MARSEILLE (1ere Ch.)
DU 27 MAI 1964.

Attendu que, par acte du 27 février 1964, la dame Blanche Martel a signifié aux parties à l'instance principale et à l'instance en garantie un acte de désistement d'instance, et a offert le paiement des frais de justice qu'elles ont nécessité : que ce désistement a été accepté sans réserves par Georges Martel, le 6 mai 1964, mais que, par conclusions signifiées le 10 mars 1964. la dame Martin demande qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle n'acceptera le désistement proposé que lorsque l'inscription d'hypothèque provisoire inscrite sur l'immeuble situé 22, rue Roussel-Doria, à Marseille, lui appartenant," sera radiée ; qu'elle demande en conséquence la condamnation de dame Martel à rapporter cette radiation dans un délai de un mois à partir du prononcé du jugement et sous astreinte comminatoire ; qu'elle précise ; que, malgré une ordonnance de référé rétractant l'ordonnance ayant autorisé la dite inscription, le Conservateur des Hypothèques du bureau dont dépend l'immeuble aurait refusé de procéder à cette radiation ;

Attendu que la dame Martel soutient que cette demande est sans objet, la radiation de l'hypothèque provisoire ayant été ordonnée par une décision de justice ;

Attendu que, par ordonnance rendue le 4 septembre 1963, sur requête de la dame Blanche Martel, par le Président de ce siège, celle-ci a été autorisée à inscrire provisoirement une hypothèque sur l'immeuble 22, rue Roussel Doria, appartenant à la dame Martin, en garantie du paiement des sommes dont, par l'instance introduite par l'assignation du 27 décembre 1963, elle poursuit le recouvrement, mais que, par ordonnance du 18 octobre 1963, le juge des Référés a rapporté les dispositions de l'ordonnance du 4 septembre 1963, en précisant que la radiation de l'hypothèque provisoire pourrait être requise au vu d'une expédition de sa décision ;

Attendu que, sans avoir à rechercher si les articles 50, 54 et 55 du Code de Procédure Civile énumérant les cas où le juge des référés peut ordonner la radiation d'une hypothèque provisoire peuvent ou non se combiner avec les dispositions générales de l'article 2157 du Code Civil, relatif à la radiation des hypothèques définitives, ou si, au contraire, ces textes spéciaux doivent être interprétés restrictivement et considérés comme contenant une énumération limitative, il suffit de constater que l'article 548 du Code de Procédure civile est applicable aux ordonnances de référé, que l'ordonnance de référé rendue le 18 octobre 1963, ordonnant la radiation de l'hypothèque provisoire inscrite le 18 septembre 1963 sur l'immeuble 22, rue Roussel Doria, a été signifiée le 8 novembre 1963 , n'a pas été frappée d'appel, ainsi qu'il résulte d'un certificat délivré par le greffe de la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence, le 28 janvier 1964, qu'elle est, par suite, exécutoire par les tiers ou contre eux et notamment à l'égard du Conservateur des Hypothèques du bureau de la situation de l'immeuble ;

Attendu qu'en conséquence, la demande formée par la dame Martin, qui possède un titre lui permettant d'obtenir la radiation de l'hypothèque provisoire frappant l'immeuble litigieux, doit être déclarée sans objet ;

Par ces motifs,

Le Tribunal...

Donne acte aux parties du désistement par dame Martel de l'instance introduite par assignation du 27 décembre 1963 .

Dit n'y avoir lieu d'ordonner la radiation de l'hypothèque provisoire inscrite sur l'immeuble 22, rue Roussel-Doria, le 18 septembre 1963, volume 917, n° 78, au 1er Bureau des Hypothèques de Marseille.

Observations. - Si les ordonnances du référé rendues dans les conditions prévues aux articles 806 et suivants du Code de Procédure civile, qui n'ont qu'un caractère provisoire et n'ont pas l'autorité de la chose jugée, ne peuvent ordonner valablement une radiation, il en est autrement des ordonnances rendues en 'exécution des art. 54 et 55 du même Code. Ces ordonnances ont le caractère d'un véritable jugement et doivent être exécutés comme une décision de justice lorsqu'elles sont devenues définitives (Bull. A.M.C., art. 434).

Sans doute, les art. 54 et 55 du Code de Procédure civile énumèrent-ils limitativement les cas où le magistrat est habilité à ordonner une radiation. Mais l'autorité de la chose jugée qui s'attache à sa décision donne à cette dernière une présomption de régularité que le Conservateur n'a pas qualité pour discuter. Il ne peut que s'assurer que l'ordonnance a le caractère définitif; dans l'affirmative, il doit l'exécuter (Etude Masounabe-Puyanne, Bull. A.M.C., art. 385).

Tel était, semble-t-il, le cas dans l'espèce qui fait l'objet du jugement reproduit ci-dessus où, selon les termes de cette décision, l'ordonnance du Président du Tribunal du 18 octobre 1963 ordonnant la radiation avait été rendue dans les conditions prévues à l'art. 54 du Code de Procédure civile.

Annoter : C.M.L. 2° éd., n° 1369, 1384 bis A (feuilles vertes) ; Jacquet et Vétillard, V° Jugement de radiation, n° 26, pages 399 et 400.