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ARTICLE 784

PROCEDURE. - RADIATIONS. - SAISIES.
TAXE DE PUBLICITE FONCIERE

Prêts consentis à des français rapatriés par certains établissements de crédit.
Inscriptions prises pour la garantie de ces prêts et saisies pratiquées pour leur remboursement.
Mainlevées. - Modalités particulières et dispense de taxe.

LOI N° 69-992 DU 6 NOVEMBRE 1969
instituant des mesures de protection juridique en faveur des rapatriés et des personnes dépossédées de leurs biens d'outre-mer.
(J.O. du 7 ; J.C.P. 1969-III-36071)

ART. 2. - A titre provisoire, et jusqu'à l'entrée en vigueur des mesures législatives d'indemnisation visées à l'article 1er, est suspendue l'exécution des obligations financières contractées, auprès des organismes de crédit ayant passé des conventions avec l'Etat, par :

Les bénéficiaires des dispositions de la loi n° 61-1439 du 26 décembre 1961 en vue de leur installation en France, dans le cadre de ladite loi ;

Les bénéficiaires, entre les dates d'entrée en vigueur des décrets n° 62-533 du 28 avril 1962 et n° 65-3.2 du 20 avril 1965, des dispositions de la loi n° 61-1439 du 26 décembre 1961 en vue de leur installation en France, dans le cadre de ladite loi ;

Les bénéficiaires des mesures prises, avant l'entrée en vigueur des dispositions de la loi n° 61-1439 du 26 décembre 1961, en faveur des Français installés outre-mer, en vue de leur installation en France, dans le cadre desdites mesures.

ART. 5. - Les dispositions de la présente loi font obstacle à la poursuite de toute procédure d'exécution en cours au jour de son entrée en vigueur. En outre, les actes ou formalités auxquels il aurait été procédé cessent de produire leurs effets et, s'ils ont été mentionnés sur un registre public, leur radiation est opérée dans les conditions prévues aux alinéas 2 et suivants de l'article 6.

Il n'est porté atteinte ni à la validité des ventes et adjudications ni à celle des paiements, déjà intervenus.

ART. 6. - Toutes les sûretés réelles, y compris celles fournies par un autre que le débiteur, garantissant les obligations prévues à l'article 2, cessent de produire effet.

La radiation des inscriptions sur un registre public est opérée à la demande du débiteur, sur production d'une attestation délivrée par le créancier et authentifiée, en tant que de besoin, par un fonctionnaire désigné par le Ministre dont relève l'établissement prêteur.

En cas de refus du créancier :

L'attestation ci-dessus peut être établie par le Ministre intéressé ou son représentant ;

La radiation peut également être ordonnée, en la forme des référés, par le Président du Tribunal de Grande Instance ou, en matière commerciale, par le Président du Tribunal de Commerce, le créancier et l'agent judiciaire du Trésor dûment appelés. La juridiction compétente est celle du domicile du demandeur.

La radiation ne donne lieu à la perception d'aucun droit ou taxe au bénéfice de l'Etat.

ART. 10. - Tous jugements, ordonnances, actes de procédure, extraits, copies, expéditions ou grosses auxquels donne lieu l'application de la présente loi sont dispensés de timbre et enregistrés gratis, à la condition de porter la mention expresse qu'ils sont faits en application du présent article.

Observations. - L'art. 6 de la loi nouvelle apporte une double dérogation à la règle inscrite dans les art. 2157 et 2158 du Code Civil, selon laquelle les inscriptions hypothécaires sont radiées au vu de l'expédition, soit d'un acte authentique constatant le consentement du créancier, soit d'un jugement en dernier ressort ou passé en force de chose jugée.

Tout d'abord, aux termes du 2° alinéa de cet article, les inscriptions prises pour la garantie des obligations financières contractées auprès des établissements de crédit ayant passé des conventions avec l'Etat par les personnes que le texte définit par référence à la loi n° 64-1439 du 26 décembre 1961, instituant des mesures de protection juridique en faveur des Français rapatriés (Bull. A.M.C., art. 617 ; J.C.P. 1962 - III - 27.504), pourront être radiées " sur la production d'une attestation délivrée par le créancier et authentifiée, en tant que de besoin, par un fonctionnaire désigné par le Ministre dont relève l'établissement prêteur ".

Le texte ne précise pas en quoi consiste l'" attestation " qu'il vise. Mais ce ne peut être qu'un écrit par lequel le créancier reconnaît que la créance en cause entre dans le champ d'application de la loi du 6 novembre 1969 et consent en conséquence la mainlevée de l'inscription, désignée par date, volume et numéro, prise par lui pour la garantie de cette créance. Il n'est pas nécessaire que cet écrit soit dressé par un notaire ou qu'il revête la forme administrative ; il suffit qu'il soit " authentifié " par un fonctionnaire désigné par le Ministre dont relève l'établissement prêteur.

La possibilité de donner mainlevée sous la forme de l'attestation ainsi définie est limitée au cas où la créance garantie entre dans les prévisions de l'art. 2 et où le débiteur est l'une des personnes désignées au même article (v., pour ce qui concerne les personnes désignées aux art. 1er et 3 de la loi du 26 décembre 1961 : Bull. A.M.C., art. 617, note 1). Le Conservateur, juge de la validité de la mainlevée, doit, en principe, s'assurer de l'accomplissement de ces conditions. Toutefois, en raison de la qualité des établissements de crédit qui seront appelés à délivrer l'attestation, laquelle sera au surplus authentifiée par le représentant du Ministre dont dépend l'établissement créancier, on peut sans risque considérer comme certain qu'il est satisfait aux conditions requises.

Le 3° alinéa de l'art. 6 prévoit, par ailleurs, le refus de l'organisme de crédit créancier de délivrer l'attestation.

Dans cette hypothèse :

ou bien l'attestation sera délivrée par le Ministre ou son représentant ;

ou bien la radiation sera " ordonnée, en la forme des référés, par le Président du Tribunal de Grande Instance ou, en matière commerciale, par le Président du Tribunal de Commerce, le créancier et l'agent judiciaire du Trésor dûment appelés ".

Dans le cas de l'attestation établie par le Ministre ou son représentant, elle doit renfermer les mêmes énonciations que lorsqu'elle est délivrée par l'établissement créancier ; mais, bien entendu, elle n'a pas à être authentifiée par le fonctionnaire désigné par le Ministre. Bien que le texte ne le précise pas, le Ministre compétent pour délivrer l'attestation en cas de refus de l'organisme créancier ne peut être que celui dont relève cet organisme.

Comme dans le cas d'attestation délivrée par l'établissement créancier, le Conservateur devrait, en principe, s'assurer que la mainlevée entre bien dans le champ d'application de la loi du 6 novembre 1969. Mais la qualité de l'auteur de l'attestation parait constituer à cet égard une garantie suffisante.

Lorsque, à la suite du refus de l'établissement créancier, la radiation est, non plus consentie par le Ministre, mais ordonnée par le Président du Tribunal de Grande Instance ou par le Président du Tribunal de Commerce, on se trouve en présence d'une décision de justice dont la régularité, à la différence de celle de l'attestation, est présumée et échappe au contrôle du Conservateur. Celui-ci a seulement à s'assurer, d'une part, que l'ordonnance a été rendue par application de la loi du 6 novembre 1969 - circonstance que l'ordonnance mentionnera explicitement, en exécution de l'art. 10 de ladite loi, pour bénéficier de la dispense des droits de timbre et de l'enregistrement - et, d'autre part, que, non seulement le créancier, mais aussi l'Agent judiciaire du Trésor ont été appelés à l'instance comme le prescrit l'avant-dernier alinéa de l'art. 6 de la loi.

L'ordonnance, rendue " en la forme des référés " n'est pas susceptible d'opposition ; mais elle peut être attaquée, par la voie de l'appel, lequel doit être formé dans la quinzaine suivant la signification (art. 809 du Code de Proc. Civ.). Elle ne peut dès lors être exécutée que s'il est justifié qu'elle est définitive (art. 548 du Code de Proc. Civ. ; Bull. A.M.C., art. 643).

La procédure spéciale instituée par les 2° et 3° alinéas de l'art. 6 n'est pas applicable seulement aux inscriptions prises contre le débiteur lui-même. Le 1er alinéa de cet article englobe en effet, parmi les sûretés réelles qui cessent de produire effet, " celles fournies par un autre que le débiteur ". Peuvent par suite être également radiées dans les conditions qui viennent d'être indiquées les inscriptions qui grèvent les immeubles appartenant à une caution.

Par ailleurs, du fait de la référence aux 2° et 3° alinéas de l'art. 6 contenue dans le 1er alinéa de l'art. 5, la même procédure est encore applicable à la radiation des saisies pratiquées contre le débiteur ou une caution pour le recouvrement de créances entrant dans les prévisions de l'art. 2.

Le dernier alinéa de l'art. 6 dispose que " la radiation ne donne lieu à la perception d'aucun droit ou taxe au bénéfice de l'Etat ".

Cette disposition est sans objet tant pour ce qui concerne les radiations d'inscriptions qui sont déjà dispensées de la taxe par l'art. 8 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 (Bull. A.M.C., art. 699) qu'à l'égard des radiations de saisies qui n'y sont pas assujetties par l'art. 838 du Code Général des Impôts.

La loi nouvelle ne renferme par ailleurs aucune disposition au sujet des salaires qui continueront à être perçus comme par le passé.

Annoter : C.M.L., 2° éd., n° 966-1 et 3°, 983 et 1361-4° ; Jacquet et Vétillard, Introduction, n° 10 (p. 13) et V° Jugement de radiation, n° 37 (p. 412).