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Art. 1820

Publications d'Actes

Forme de la publication
Traité de fusion par voie d'absorption
Immeubles situés dans le ressort de plusieurs conservations

Question : Des documents concernant l'absorption d'une société par une autre ont été remis par un notaire à l'un de nos collègues afin d'être publiés. Ils étaient constitués :

- d’une part, par des copies des procès-verbaux des assemblées générales extraordinaires des deux sociétés, ainsi que par différentes pièces telles, notamment, les reproductions tant du projet de traité de fusion que de publications légales à la fois de ce projet et de sa réalisation. Certains de ces écrits constataient le transfert des biens de la société absorbée mais ils visaient globalement ceux figurant à son actif, tandis que d'autres contenaient des listes d'immeubles ne se trouvant pas tous dans la circonscription du même bureau des hypothèques. Tous ces documents avaient été déposés au rang des minutes d'un notaire autre que le requérant. Cet acte de dépôt figurait dans les documents déposés. Observation est faite que les procès-verbaux déjà cités, bien qu'établis après le 1er juillet 1999, ont, d'après la mention qui y est reproduite, été irrégulièrement enregistrés dans une recette principale des impôts.

- d’autre part, d’un acte complémentaire qui, lui, avait été reçu par le notaire requérant la publication et dans lequel il est procédé à la relation des opérations de fusion-absorption et à l'identification des seuls immeubles concernés par la publication requise. Cette identification était faite conformément aux dispositions de l’article 7 du décret du 4 janvier 1955, mais elle était limitée à une partie seulement des immeubles situés dans le ressort du bureau, alors que par ailleurs, le traité d’apport-fusion déposé pour publication faisait apparaître l’ensemble des immeubles situés dans le ressort du bureau.

Le conservateur estimant que cet acte identifiait une partie seulement des immeubles situés dans le ressort du bureau et que les documents constituant l’ensemble déposé n’étaient pas reproduits à la suite sur la formule spéciale exigée par l’article 67-3 du décret du 14 octobre 1955, a pensé refuser de publier ce dépôt.

Cette position est-elle justifiée ?

Réponse : Réponse affirmative.

En effet, le registre assurant la publicité des droits sur les immeubles autres que les privilèges et hypothèques est généralement constitué des copies intégrales et, exceptionnellement, d'extraits littéraux des titres desdits droits, c'est-à-dire des actes et décisions judiciaires les créant, les confirmant, les modifiant ou encore procédant à leur transfert ou leur extinction.

A ces copies intégrales et ces extraits littéraux ne peuvent être substitués des documents analytiques qui, même établis par les notaires avec l'accord des parties, empêcheraient l'exercice du droit, reconnu à tous ceux qui le requièrent, d'obtenir communication des titres, lequel est l'un des pivots du système français de publicité foncière.

Les propositions qui précèdent ont été énoncées, expliquées et justifiées dans les articles 1546, 1547 et 1761 du Bulletin. Elles trouvent leur base légale dans les dispositions combinées de l'article 2196 du code civil, du 1 de l'article 34 du décret du 4 janvier 1955 et de l'article 67-3 du décret du 14 octobre 1955.

Or, dans le cas d'un traité d'apport-fusion générant des mutations de droits immobiliers, le titre de propriété de la société absorbante est formé par les délibérations concordantes de l'assemblée générale extraordinaire de chacune des sociétés qui participent à cette opération. C'est ce qui résulte de l'article 376 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales. En outre, aux procès-verbaux de ces assemblées doivent être éventuellement ajoutés ceux de la ou des réunions au cours desquelles la fusion a été ratifiée par les assemblées spéciales d'actionnaires mentionnées aux articles 156 et 269-4 de la loi déjà citée.

Afin de faciliter la publication de ces délibérations formant ensemble l'instrument complet du déplacement de la propriété, les auteurs du I de l'article 1er du décret n° 59-89 du 7 janvier 1959, d'où est issu le second alinéa de l'article 4 du décret du 4 janvier 1955 modifié, ont assoupli l'obligation d'être dressé en la forme authentique imposée par le premier alinéa dudit article à tout acte sujet à publicité. Dans ce but, ils ont décidé que " même lorsqu'ils ne sont pas dressés en la forme authentique, les procès-verbaux des délibérations des assemblées générales préalables ou consécutives à l'apport de biens ou de droits immobiliers à une société ou par une société peuvent être publiés à la condition d'être annexés à un acte qui en constate le dépôt au rang des minutes d'un notaire ".

De la sorte, il est dérogé au droit commun de l'authentification d'un acte sous seing privé tel qu'il est fixé au 1 de l'article 68 du décret du 14 octobre 1955. Aussi, le second alinéa de l'article 4 du décret du 4 janvier 1955 est-il un texte d'exception dont l'application, partant, ne peut qu'être strictement limitée à la situation qu'il prévoit, qu'il s'agisse de la nature des documents ou de leur objet.

En revanche, comme dans le cas général, l'acte de dépôt doit être reçu par le notaire qui entend, par ce truchement, obtenir la publication des documents en la forme s.s.p. mis au rang de ses minutes.

D'autre part, comme il est prescrit au second alinéa de l'article 67-3 du décret du 14 octobre 1955, l'acte de dépôt et les procès-verbaux, ainsi qu'éventuellement les actes auxquels il est fait référence, doivent, sous peine de refus, faire l'objet d'un seul certificat de conformité et donc être reproduits à la suite sur la formule réglementaire 3265.

Enfin, lorsque les éléments composant l'actif immobilier transféré ne se trouvent pas tous dans la circonscription de la même conservation, des extraits littéraux " comprenant seulement, sous peine de refus de dépôt, les immeubles et les droits immobiliers qui l'intéressent ", doivent être déposés dans chaque bureau. Cette règle est édictée à l'article 68-1 du décret du 14 octobre 1955 et les conservateurs sont tenus de veiller à son exacte application.

Ces principes, en l'espèce, n'ont pas été observés.

C'est ainsi que les divers écrits à publier n'ont pas été reproduits sur un seul et même document.

De même, le titre de propriété de la société absorbée et donc les procès-verbaux des assemblées des associés, n’ont pas été mis au rang des minutes du notaire ayant requis la publication, l'acte notarié complémentaire se bornant à résumer inutilement les opérations de fusion et à désigner et évaluer une partie des immeubles situés dans le ressort du bureau.

Enfin, les actes s.s.p. autres que les délibérations visées au second alinéa de l'article 4 du décret du 4 janvier 1955 n'auraient pu être acceptés que si, comme il est prévu à l'article 68-1 du décret du 14 octobre 1955, ils avaient été déposés en l'étude du notaire par toutes les parties avec reconnaissance d'écritures et de signatures et à condition que n'y figure aucun immeuble dépendant d'une autre conservation.

Il y avait également matière à refus dans la circonstance, signalée dans l’énoncé de la question, que les immeubles dont la désignation cadastrale et les références de la publication des droits du disposant, fournies en application de l’article 7 du décret du 4 janvier 1955 et de l’article 32 § 2 du décret du 14 octobre 1955, ne correspondaient qu’à une partie des biens qui se trouvaient dans le ressort du bureau, ces derniers étant énoncés par ailleurs dans le traité d’apport-fusion. Il convient de noter cependant que, dans la mesure où désormais les actes de l’espèce, comme tous les actes mixtes, relèvent de la formalité fusionnée, il n’apparaît pas que les usagers soient privés de la possibilité de limiter la publication à certains des immeubles objets de l’apport. Qu’il s’agisse de l’extrait visé à l’article 253 II de l’annexe III au CGI relatif au bureau où est opérée la formalité fusionnée, ou des extraits visés à l’article à l’article 68-1 relatifs aux autres bureaux concernés, les parties conservent toujours la faculté de n’y faire figurer que les immeubles à l’égard desquels elles entendent obtenir la publication des mutations qui les concernent.

On observera pourtant que cette faculté risque d’être d’un intérêt limité dans la mesure de l’existence du délai imparti pour procéder à la formalité par l’article 33 du décret du 4 janvier 1955.

En définitive, pour toutes les raisons exposées ci-dessus, notre collègue ne pouvait, comme il l'a fait, que refuser le dépôt.

Rapprocher : Bull. AMC art. 1546, 1547 et 1761.