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ARTICLE 586

TAXE DE PUBLICITE FONCIERE. - SALAIRE.

Liquidation. - Bail emphytéotique. - Charge augmentative du prix.
Obligation pour le preneur d'édifier des constructions qui deviendront, en fin de bail, la propriété du bailleur.

(Rép. Min. Fin. et Aff. Econ., 17 juin 1964 ; B.O.E.D. 1964-1-9229.)

Question. - M. Chauvet expose à M. le Ministre des Finances et des Affaires économiques que, dans le cas de location emphytéotique de terrains domaniaux en vue de la réalisation d'opérations d'urbanisme et de construction, il est fait abstraction, pour la perception du droit de bail et de la taxe de publicité foncière, de la charge que constitue l'obligation d'édifier des constructions devant revenir sans indemnité, en fin de bail, à l'Etat (Bulletin de l'Enregistrement, 1963-I-8799). Il lui demande si la même solution est applicable lorsqu'il s'agit de terrains communaux ou départementaux. (Question du 28 novembre 1963,)

Réponse. - Conformément aux dispositions de l'article 685 bis du Code général des Impôts, modifié implicitement par l'article 27 de la loi n° 63-254 du 15 mars 1961, les baux emphytéotiques qui ne peuvent être considérés comme concourant à la production ou à la livraison d'immeubles bâtis dont les trois quarts au moins de la superficie totale sont affectés ou destinés à être affectés à l'habitation, sont assujettis aux droits d'enregistrement établis pour les baux d'immeubles à durée limitée. En conséquence, les contrats dont il s'agit donnent ouverture au droit au bail ainsi qu'à la taxe de publicité foncière sur le prix exprimé augmenté des charges. Lorsque les constructions à édifier par le preneur doivent revenir gratuitement au bailleur à l'expiration du contrat, le prix du bail doit être considéré comme représenté à la fois par le montant nominal des redevances stipulées et par la valeur réelle des constructions en fin de bail, cette valeur étant déterminée par les parties sous le contrôle de l'Administration. Toutefois, eu égard à la durée normale d'amortissement des immeubles en cause, il a paru possible de faire abstraction pour le calcul du droit proportionnel (1 Cette expression vise à la fois le droit de bail et la taxe de publicité foncière. (B.O.E.D., 1964-1-9229) de la valeur réelle des constructions à l'expiration du bail, lorsque la durée de celui-ci est égale ou supérieure à vingt ans. Cette solution se substitue à celle qui est visée dans la question posée par l'honorable parlementaire. Quant aux baux emphytéotiques portant sur un terrain à bâtir ou un bien assimilé destiné à la construction d'immeubles dont les trois quarts au moins de la superficie totale seront affectés à l'habitation, ils donnent ouverture à la taxe sur la valeur ajoutée, à l'exclusion du droit d'enregistrement et de la taxe de publicité foncière, en application des dispositions de l'article 27 de la loi susvisée du 15 mars 1963 et de l'article 841 bis-8° du Code général des Impôts. La taxe sur la valeur ajoutée doit être assise, en principe, sur la valeur réelle, appréciée au jour du contrat et déterminée par une déclaration limitative des parties, soumise au contrôle de l'Administration, des deux éléments qui constituent la créance du bailleur à l'encontre de l'emphytéote : d'une part, montant des prestations stipulées pour la durée du contrat ; d'autre part, droit de reprise des constructions, lorsque celles-ci doivent devenir la propriété du bailleur à l'expiration du bail. Toutefois il est admis, par mesure de tempérament, qu'il soit fait abstraction, pour le calcul de la taxe sur la valeur ajoutée, de la valeur du premier de ces deux éléments lorsque les prestations stipulées au profit du bailleur sont constituées par les indemnités en espèces d'un même montant pour chacune des années d'exécution du contrat, et que la durée de celui-ci est au moins égale à quarante ans, correspondant à la durée d'amortissement généralement retenue pour les immeubles d'habitations. Pour les contrats répondant à cette dernière condition, la valeur du droit de reprise des constructions peut également être négligée. (J.O., 17 juin 1964, Déb. A.N., p. 1956, Col. 1 et 2).

Observations. - I. - Il ressort en premier lieu de la réponse qui précède que les baux emphytéotiques portant sur un terrain à bâtir ou un bien assimilé destiné à la construction d'immeubles dont les trois quarts au moins de la superficie totale seront affectés à l'habitation sont dispensés de la taxe de publicité foncière.

C'est là une extension de l'art. 854 bis-8° du Code général des Impôts (auquel l'art. 27 de la loi n° 63-254 du 15 mars 1963 n'a pas apporté de modification ; - Instruction générale du 14 août 1963 sur la réforme de la fiscalité immobilière, n° 101), lequel ne vise que les " acquisitions d'immeubles visés à l'art. 1371 ".

En conséquence, l'exonération de taxe dont bénéficieront désormais les baux emphytéotiques portant sur les immeubles visés à l'art. 1371 du Code général des Impôts (complété par l'art. 54 de la loi n° 63-254 du 15 mars 1963, précitée ; Bull. A.M.C., art. 555) lorsqu'ils sont destinés à la construction d'immeubles dont les trois quarts au moins sont affectés à l'habitation, est subordonnée aux conditions déjà prévues au § II dudit art. 1371 , pour les acquisitions des mêmes immeubles.

II. - Les baux emphytéotiques autres que ceux qui ont pour objet un terrain à bâtir ou un bien assimilé destiné à la construction d'immeubles dont les trois quarts au moins de la superficie seront affectés à l'habitation demeurent passibles de la taxe de publicité foncière.

La clause de tels baux stipulant que le preneur devra édifier sur le terrain loué des constructions qui deviendront en fin de bail la propriété du bailleur est génératrice d'une charge augmentative du prix qui doit être évaluée pour la perception de la taxe. En principe, le montant de cette charge est égal à la valeur qu'auront les constructions édifiées à l'époque où, à l'expiration du bail, elles seront abandonnées au bailleur. (Bull. A.M.C., art. 459).

Toutefois, par mesure de tempérament, la Direction Générale avait admis que, pour les baux emphytéotiques consentis par l'Etat, la taxe serait assise sur le montant du loyer stipulé augmenté des charges accessoires, abstraction faite de la charge de construire, ou sur la valeur locative du terrain si elle était supérieure, ce qui était le cas le plus fréquent (B.O.E.D.-18799; Bull. A.M.C., art. 544).

La réponse ministérielle reproduite ci-dessus modifie le régime sur deux points :

D'une part, pour ceux des baux emphytéotiques qu'elle vise, il est fait désormais abstraction pure et simple de la charge de construire, pour la liquidation de la taxe, lorsque la durée du bail est égale ou supérieure à vingt ans.

D'autre part, la mesure nouvelle n'est pas limitée, comme la précédente, aux baux consentis par l'Etat. On pourrait même être amené à penser qu'elle revêt un caractère général. Toutefois, étant donné qu'elle est motivée par " la durée normale d'amortissement des immeubles en cause ", il paraît plus conforme à l'intention des auteurs de la décision de considérer que sa portée doit être restreinte aux baux visés dans la question écrite, c'est-à-dire aux baux emphytéotiques consentis par l'Etat, les départements et les communes.

La décision ministérielle précise par ailleurs qu'elle se substitue à la solution publiée au B.O.E.D.-I-8799, laquelle est, par suite, abrogée, même, semble-t-il, pour les baux de moins de vingt ans consentis par l'Etat.

En résumé, la règle à suivre paraît désormais être la suivante :

1. Baux emphytéotiques consentis par l'Etat, les départements et les communes pour une durée égale ou supérieure à vingt ans : La taxe est assise sur le montant cumulé des loyers et des charges accessoires autres que la charge de construire.

2. Baux emphytéotiques consentis par l'Etat, les départements et les communes pour une durée inférieure à vingt ans ou par d'autres bailleurs, quelle qu'en soit la durée : La taxe est perçue sur le montant cumulé des loyers et des charges accessoires, y compris la charge de construire dont l'importance est égale à la valeur, à déterminer par une déclaration estimative, qu'auront les constructions à édifier à l'expiration du bail.

III. - Salaire. - La décision ministérielle du 17 juin 1964 est étrangère à la perception du salaire. On peut cependant se demander si les motifs sur lesquels elle s'appuie ne conduisent pas à adopter, en cette matière, une solution identique à celle qui a été retenue pour la perception de la taxe.

Selon les termes de cette décision si, pour les baux d'une durée égale ou supérieure à vingt ans, la valeur des constructions qui reviendront gratuitement au vendeur à l'expiration du bail n'est pas retenue pour l'assiette de la taxe de publicité foncière, c'est " eu égard à la durée normale d'amortissement des immeubles en cause ". On pourrait être tenté d'en induire que la durée normale d'amortissement des immeubles est de vingt ans. Mais cette interprétation est contredite par la seconde partie de la réponse, selon laquelle un laps de temps de quarante années serait la durée d'amortissement généralement retenue pour les immeubles d'habitation.

La décision ministérielle apparaît dès lors, selon ses propres termes, comme une mesure de tempérament dont l'effet doit par suite être limité à la matière fiscale. Pour la liquidation du salaire, il n'y a pas, en conséquence, à faire de distinction selon qu'il s'agit de baux emphytéotiques conclus ou non pour moins de vingt ans.

Il n'y a d'ailleurs pas non plus à distinguer selon que la durée du bail excède, ou non, quarante ans.

Si, en effet, comme l'affirme la réponse à la question écrite, les immeubles d'habitation s'amortissent généralement sur une durée de quarante ans; il s'agit là de l'aspect comptable de la question. En réalité, sauf circonstances exceptionnelles, une construction édifiée depuis plus de quarante ans conserve une valeur vénale effective et c'est le montant de cette valeur vénale qui représente l'importance réelle de l'avantage procuré au bailleur par la clause qui lui attribue gratuitement, en fin de bail, les construction édifiées par le preneur sur le terrain loué.

Pour les baux établis par le Service des Domaines, cette valeur est déterminée par ce Service ; elle est fixée forfaitairement à la différence entre la valeur locative réelle du terrain loué pour la durée du bail et le montant du loyer stipulé pour la même durée (Bull. A.M.C., art. 492). Pour les autres baux, la déclaration estimative est souscrite par le rédacteur de l'acte dans les conditions habituelles.

Annoter : C.M.L., 2° éd. n° 1917-B et 1996 bis.