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Art.1920

INSCRIPTIONS

Hypothèque conventionnelle consentie par un époux commun en biens seul avec intervention à l'acte de l'autre époux. Garantie portant sur la totalité de l'immeuble
1) Nécessité de bordereaux d'inscription distincts en l'absence de solidarité mentionnée dans le bordereau (non)
2) Epoux communs en biens - Mention " Débiteurs solidaires" nécessaire (non)


QUESTION : Un époux marié sous le régime légal de la communauté d'acquêts a contracté un emprunt et affecté à sa garantie un immeuble dépendant de la communauté. Conformément aux obligations posées par l'article 1424(1) du code civil, l'épouse est intervenue à l'acte pour donner son consentement à l'affectation hypothécaire, sans se porter caution solidaire ni renoncer au bénéfice de discussion et de division.
L'inscription a été requise sur un bordereau unique désignant les deux époux comme "propriétaires grevés" et leur identité certifiée. Elle est prise contre l'époux en tant que "débiteur" et contre l'épouse en tant que "conjoint du débiteur".
La question a été posée de savoir :
- 1) si ce bordereau unique pouvait être accepté en l'absence de solidarité exprimée, compte tenu des termes impératifs du deuxième alinéa de l'article 54-1 du décret du 14 octobre 1955(2).
- 2) subsidiairement, si la mention "débiteurs solidaires" doit toujours être exigée lorsque les propriétaires grevés sont des époux communs en biens et que cet état apparaît dans le bordereau.

REPONSE : Réponse positive sur le premier point et négative pour le second.
1) S'agissant de la prise en compte des exigences posées par le deuxième alinéa de l'article 54-1 du décret du 14 octobre 1955 en cas d'inscription grevant des propriétaires (débiteurs et cautions) non solidaires, l'AMC a exprimé sa doctrine à de nombreuses reprises (cf. articles 726, 727, 1665, 1870 et 1878 du Bulletin).
Elle estime que, lorsque des propriétaires indivis affectent par un même acte à la garantie d'une même créance l'immeuble qu'ils possèdent, on doit admettre que l'obligation qu'ils contractent ainsi collectivement revêt un caractère d'indivisibilité ayant pour conséquence que le droit hypothécaire à inscrire est un droit hypothécaire unique et que son inscription peut faire l'objet d'un seul bordereau (cf. article 726 du Bulletin notamment). Il en est ainsi que la solidarité entre les propriétaires (débiteurs ou cautions) ait été ou non exprimée.
Au cas particulier, on se trouve bien en présence d'une garantie prise en vertu d'un acte unique sur un même immeuble avec l'accord de l'ensemble des propriétaires, étant subsidiairement observé que l'immeuble offert en garantie étant un bien commun, l'inscription n'aurait pu valablement être prise sans le consentement de l'épouse en présence de l'article 1424 du code civil.
La production d'un bordereau unique doit donc être admise, même si l'épouse ne s'est pas portée caution solidaire et n'a pas renoncé au bénéfice de discussion ou de division.
2) S'agissant du second volet de la question, relatif à l'exigence de la mention "débiteurs solidaires" lorsque les propriétaires grevés sont des époux communs en biens et que cet état apparaît dans le bordereau, il a toujours été admis que le conservateur n'était pas juge de la validité d'un privilège et d'une hypothèque dont la publicité est requise. Depuis la suppression de l'obligation de la présentation du titre par la loi n° 98-261 du 6 avril 1998, même s'il doit s'assurer de l'existence au moins apparente du droit hypothécaire dont l'inscription est requise, le conservateur se borne désormais à accepter les indications telles qu'elles sont présentées dans le bordereau sous la responsabilité de l'inscrivant.
Au cas d'espèce, étant admis que, dans les conditions précédemment décrites, un bordereau unique peut être accepté en présence de propriétaires agissant à des titres différents (débiteurs, cautions ou simples garants, solidaires ou non), il n'y a pas lieu de faire modifier les mentions portées par le notaire sur le bordereau dès lors qu'elles décrivent précisément, la qualité en vertu de laquelle le propriétaire est grevé et que cette qualité justifie l'inscription à son encontre.


(1) Art. 1424 du code civil: " Les époux ne peuvent, l'un sans l'autre, aliéner ou grever de droits réels les immeubles, fonds de commerce et exploitations dépendant de la communauté, non plus que les droits sociaux non négociables et les meubles corporels dont l'aliénation est soumise à publicité. Ils ne peuvent, sans leur conjoint, percevoir les capitaux provenant de telles opérations."

(2) Art. 54-1 du décret du 14 octobre 1955 : " Chaque privilège ou hypothèque garantissant l'acquittement d'une obligation est inscrit, en application de l'article 2428 du code civil, sur le dépôt d'un bordereau établi en deux exemplaires.
Le dépôt est refusé si le bordereau porte réquisition d'inscrire plusieurs sûretés ou même une seule sûreté au profit de plusieurs créanciers ou à l'encontre de plusieurs propriétaires."