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ARTICLE 1132

PROCEDURE.

Radiations. - Refus de radier. - Contestation.
Procédure instituée par l'article 26 du décret du 4 janvier 1955 inapplicable.

ARRET DE LA COUR DE CASSATION (3° ch. civile) DU 30 MAI 1978

LA COUR...,

Sur le moyen unique :

Attendu que des énonciations de l'arrêt infirmatif attaqué, il résulte que la dame Georges a vendu aux époux Albano, par acte du 21 juin 1971, une propriété lui appartenant, moyennant le prix de 190.000 F dont 140.000 F payés comptant, le surplus, soit 50.000 F, étant stipulé payable au plus tard le 30 juin 1972 ; que les acquéreurs ayant eu des difficultés avec leur venderesse à la suite de la revendication par un voisin d'une partie du fonds vendu, ont obtenu du juge des référés, par ordonnance du 10 août 1972, l'autorisation de verser le solde du prix de vente entre les mains du notaire Gruget, constitué séquestre, jusqu'à solution du litige concernant la revendication du voisin ; que la somme de 50.000 F a été versée par les acquéreurs audit notaire ; que les époux Albano ont assigné leur venderesse en dommages-intérêts pour l'éviction dont ils étaient victimes et en mainlevée de l'inscription du privilège du vendeur garantissant le paiement du solde de 50.000 F du prix de vente ; que par arrêt du 19 septembre 1975, les époux Albano ont notamment été déboutés de leur demande en radiation de l'inscription du privilège de la venderesse ; que, par ordonnance rendue le 5 décembre 1975, le juge des référés de Chartres a décidé, à la requête des acquéreurs, que dame Georges devait se faire remettre dans la huitaine de la signification de l'ordonnance, la somme de 50.000 F par le séquestre, à charge pour elle d'en donner quittance et mainlevée de l'inscription prise le 10 juin 1974 ; que, faute par elle de ce faire, le Conservateur des Hypothèques opérerait sur ses registres la radiation de cette inscription ; que cette ordonnance, signifiée le 23 décembre 1975 à dame Georges, n'a fait l'objet d'aucune voie de recours et est devenue irrévocable ; que par acte extra-judiciaire du 12 mars 1976, les époux Albano ont requis du Conservateur des Hypothèques la radiation de l'inscription en cause, mais que celui-ci a refusé de procéder à cette formalité en se fondant sur les dispositions de l'article 2157 du Code Civil et de l'article 76 du décret du 9 septembre 1971 concernant le caractère provisoire des ordonnances de référé, qui n'acquièrent pas, au principal, l'autorité de la chose jugée; qu'ayant assigné, en application de l'article 26 du décret du 4 janvier 1955, le Conservateur devant le Président du Tribunal de Grande Instance, celui-ci, par ordonnance du 16 avril 1976, a ordonné la radiation de l'inscription du privilège du vendeur, sans toutefois, assortir son ordonnance de l'exécution provisoire.

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les époux Albano de leur requête, alors, selon le moyen, que, d'une part l'article 26 du 4 janvier 1955, qui attribue compétence au Président du Tribunal de Grande Instance pour statuer au fond, s'applique non seulement en cas de rejet de la formalité, mais aussi de refus et vise expressément les inscriptions en marge des mainlevées et autres modifications; qu'il s'ensuit que l'arrêt attaqué devait examiner au fond la contestation tenant au refus du Conservateur des Hypothèques d'opérer la radiation demandée et ne pouvait se borner à renvoyer les époux Albano au principal en déclarant la contestation sérieuse ; que, d'autre part, l'article 2157 du Code Civil exige, pour que soit opérée la radiation d'une inscription, un jugement passé en force de chose jugée et que remplit cette condition une ordonnance de référé non frappée d'appel dans le délai requis ; qu'il s'ensuit que la contestation soulevée par le Conservateur des Hypothèques, selon laquelle les conditions prescrites par l'article 2157 du Code Civil n'étaient pas remplies, ne pouvait constituer une contestation sérieuse ;

Mais attendu que les juges du second degré, saisis sur appel, en la procédure spéciale instituée par l'article 26 du décret du 4 janvier 1955, du recours contre la décision du Conservateur des Hypothèques en cas de rejet d'une formalité de publicité par application des articles 2148, 2149 et 2154 nouveaux du Code Civil, retiennent que le refus opposé par le Conservateur à la demande de radiation présentée par les époux Albano ne relève pas de l'application dudit texte, qui ne vise pas la radiation des inscriptions prévue à l'article 2157 du Code Civil ; que les juges d'appel, qui ont considéré cette objection formulée par le Conservateur, non comme une exception d'incompétence, mais comme une contestation des pouvoirs du juge pouvant être soulevée pour la première fois en cause d'appel, ont pu estimer, dès lors, que les dispositions de l'article 26 restreignent expressément la recevabilité du recours au seul rejet de la formalité et qu'ainsi le Président du Tribunal statuant comme en matière de référé n'était pas habilité à statuer sur le refus de radiation du Conservateur; que par ce seul motif, la Cour d'Appel a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 17 novembre 1976 par la Cour d'Appel de Paris.

Observations. - Comme l'avait fait la Cour d'Appel de Paris, par son arrêt du 17 novembre 1976 (Bull. A.M.C., art. 1077), contre lequel était dirigé le pourvoi, la Cour de Cassation décide que la procédure spéciale instituée par l'article 26 du décret du 4 janvier 1955, n'est applicable qu'au cas où la contestation a pour objet le rejet d'une formalité fondé sur les articles 2148, 2149 et 2154 du Code Civil.

En cas de refus d'effectuer une formalité et plus spécialement de refus de procéder à la radiation d'une inscription, ce qui était le cas dans l'espèce soumise à la Cour Suprême, le litige doit être porté devant le Tribunal de Grande Instance.

Les décisions administratives ou judiciaires qui se sont déjà prononcées en ce sens (Bull. A.M.C., art. 290, 327, 328 et 972) se trouvent ainsi confirmées.

Annoter : C.M.L., 2° éd., n° 490 A r d.

Voir AMC n° 1296.